des campagnes, recherchait déjà les moyens propres à améliorer le
sort des ouvriers agricoles. De nos jours ce sont encore les mêmes
termes. On en trouve une double preuve, d'abord dans le fait que
les communes les plus éprouvées par la décadence des métiers
ruraux sont aussi les plus éprouvées par la diminution de la natalité,
ensuite par le fait que certaines communes dont la population s’est
Fig. 40. — D é p a r t e m e n t d e l a S o m m e . Diminution de la population, de 1851 à 1901
Elle porte surtout sur le ray o n industriel d’Amiens et sur le domaine de la grosse
toile entre Abbeville et Doullens.
maintenue et même accrue ont conservé un grand nombre d’ouvriers
agricoles (fig. 40 et 41).
A Cayeux-en-Santerre (18S habitants), où la bonneterie résiste
péniblement, le nombre des naissances est inférieur au nombre des
décès ; en 1898, on enregistrait 1 naissance contre 9 décès; en 1897,
2 naissances contre 2 décès; au dire des habitants, il reste très
peu de jeunes ménages; presque tous émigrent vers Villers-Breton-
neux, Amiens et Paris. A Inchy-en-Artois, pour 1.000 habitants,
l’année moyenne donne à peine un excédent de 7 naissances qui
disparaît par l’émigration; depuis 1872, le village perd 100 habitants.
A Ribemont-sur-1’Ancre, la moyenne des naissances qui atteignait
20 de 1770 à 1840 tombe aujourd’hui à 10, ne faisant plus
équilibre aux décès ; plus de vingt maisons ont disparu depuis la
décadence de la bonneterie. A Mesnil-Eudin, près de Sénarpont,
aucune naissance ne fut déclarée en 1898 ; les jeunes gens émigrent
aux verreries de Normandie. A Moreuil, canton de Croisilles, d’où
s’éloignent chaque jour les tisseurs (411 habitants en 1815, 278 en
1901) on comptait en 1899 5 naissances contre 5 décès. A Écoust-
Saint-Mein (995, habitants en 1851, 744 en 1901), la même année
donnait 25 naissances contre 16 décès ; mais tous les jeunes partent,
Fig. 4 1 . — D é p a r t e m e n t d e l a S o m m e . Augmentation de la population, de 1 8 5 1 à 1 9 0 1 .
Elle porte surtout sur le Virneu, sur la vallée de la Nièvre (tissages), sur la banlieue
immédiate d’Amiens et sur la région betteravière entre Péronne et llam.
surtout aux mines ; les filles s’engagent comme domestiques. Au
Bosquel, canton de Conty, le mouvement de la population suit les
destinées des tissus de satin; tandis que, de 1792 à 1852, les naissances
dépassaient les décès de 337, ce sont les décès qui l ’emportent
de 136, de 1853 à 1899 ; depuis le milieu du siècle, le village a
perdu 250 personnes par émigration. On pourrait multiplier les
exemples de ce phénomène qui est général dans toutes les campagnes
industrielles : la population diminue non par le départ des
laboureurs, des cultivateurs-propriétaires, mais par l’émigration des
ouvriers ruraux et des petits ménagers.
Par contre, quand les ouvriers ruraux n ’émigrent pas, on
n’observe pas cette intensité de la dépopulation. Dans le Cambrésis
et le Yermandois, pays de culture intensive et d’industrie active, on
en remarque déjà les traces ; mais elle ne laisse pas des vides irré