fut dirigée sur la capitale par Amiens et Creil *. Enfin, même en 1820,
le commerce d’Amiens songeait à expédier par Saint-Valery des
étoffes sur Buenos-Ayres 2. Ce rôle ambitieux de grand port
déchanges internationaux, Saint-Valery ne voulait pas y renoncer.
Les travaux de la Basse-Somme, exécutés à la fin du xvnie siècle,
étaient inspirés par ce*rêve. Mais ils se heurtaient à des difficultés
insurmontables. Et d’ailleurs, au moment même où ils auraient pu
porter leurs fruits, des événements d’ordre économique les rendaient
inutiles et détournaient de la Somme un trafic que les ingénieurs
s’efforçaient de maintenir artificiellement; grâce aux canaux de l’Oise
et du Nord, Dunkerque prenait son essor; puis, les voies ferrées, en
diminuant le prix et la durée des transports, attiraient les marchandises
vers des ports plus profonds et mieux outillés : Boulogne,
Calais, Dieppe, le Havre. Saint-Valery recevait encore 238 navires
et 21.006 tonnes en 1842, 548 navires et 47.222 tonnes en 18658. En
1901, l’importation se réduisait à 3.859 tonnes et 29 navires (bois du
Nord et houille anglaise) ; l’exportation, à 2.431 tonnes et 44 navires
(silex, phosphates, sucres bruts). D’Amiens à la mer, la Somme est
à peine fréquentée : les relations d’Amiens avec le Nord se font par
voie ferrée et par le canal de Saint-Quentin ; par suite, Saint-Valery
commande une route où personne n’entre plus et d’où personne ne
sort. Le silence règne le long de ses quais, et rien n’en trouble plus la
somnolence que, par intervalles, l ’annonce d’un petit chargement de
charbon ou de planches.
Désertée par le commerce, celte côte ne vit plus que de la pêche
et des bains de mer. Ignorante du mouvement et de la fièvre des
ports, elle connaît la tranquille et éphémère animation des plages. La
fortune de ces stations balnéaires est l’oeuvre des chemins de fer.
Partout la voie ferrée perce la chaîne des dunes et dépose les voyageurs
sur la plage, à Berck-Plage, à Paris-Plage. Chaque année on
voit s’élever sur la côte quelque ville nouvelle dont les chalets de
brique se peuplent et se dépeuplent avec les saisons : ville artificielle
que la mode a créée et qu’elle peut condamner ; en face de Camiers,
les hôtels immenses bâtis à Sainte-Cécile attendent toujours des habitants,
dans leur solitude de sables. Mais ces villes de bains ne sont
que des colonies d’étrangers. Les gens du pays, les marins, ceux qui
travaillent et ceux qui vivent de la mer, restent dans leur village. A
Berck, les habitations des marins sont à 2 km,5 de la mer (fig. 19). De
1 Arch. Somme, G, 106.
1 Arch. Nat. F 1 C III, 7 (Somme).
3 Ports maritimes, 266, I, p. 360 et sq.
même, les habitants de Camiers composent une partie des équipages
de la flottille d’Étaples : rien d’étonnant comme ce village de marins
perdu dans les terres, avec ses pauvres maisonnettes de torchis et de
briques aux volets multicolores,
avec ces nuées d’enfants
qu’on ne rencontre
plus dans les villages des
cultivateurs. C’est dans ces
pauvres villages ou dans les
plus .sombres quartiers des
ports que se recrutent les
pêcheurs. Il semble bien
que la pêche ait souffert des
mêmes nécessités économiques
que le commerce.
L’obligation de vendre le
poisson sur des marchés fréquentés
éloigne les bateaux
des petits ports qui les ont
Fig. 19.— Berck et Cayeux. Exemples d’agglo- , , , • ,
mérations dédoublées au contact de la mer. armés. Bien qu il existe a
Étapies une halle et des
mareyeurs, ses pêcheurs portent une partie de leur poisson à Boulogne.
De même, au Crotoy, les plus grands des bateaux de pêche ne
reviennent que tous les quinze jours : dans l’intervalle, selon les
parages où ils se trouvent, ils vendent leur poisson à Dieppe, auTré-
port ou à Boulogne. Les procédés de la pêche côtière ont du s’adapter
aux conditions naturelles de ces plages basses. Il faut mettre à