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ne choifilïbit-il de préférence pour fesfujets que
des repréfentations ae perfonnages héroïques qui
avoient laiffé un fouvenir précieux à la patrie,
tels que Théfée , Epaminondas , Périclès. Ses
tableaux h’étoient ordinairement que d’une
feule figure. On fait cependant qu’il peignit
un façrifice de boeufs.
(31) Mechophanes étoit aufii éleve de Paufias.
On'lui reprochoit de la dureté dans la couleur
; mais il réparoit ce défaut par une exactitude
qui ne pouvoit être bien appréciée que
par les artiftes.
(32) Socrate. Nous ne pouvons affurer qu’il
appartienne à cette époque : .nous le plaçons
ici parce que Pline le nomme après Mécho-
phanes. Cet artifte plaifoit à tout le monde &
méritoit de plaire. Il avoit repréfenté Efculape
avec fes filles , Hygia , Eglé , Panacée. On
avoit aufii de lui un tableau que les Grecs nom-
moient ocnos & que Pline appelle le parejfeux ;
il auroit dû plutôt le nommer le négligent,
le dilirait. Il repréfentoit un homme filant une
corde , qu’un ânè rongeoit à mefure qu’il la
tordoir. Cet homme n’étoit donc pas parefleux
puifqû’il s’occupoit, mais il étoit diftrait puisqu'il
ne s’appercevoit pas qu’un âne détruifoit
fon ouvrage à mefure qu’il croyoit l’avancer.
(33) Arte.mon y fi nous le plaçons ici, c’eft
parce que Pline nous apprend qu’il a peint la
reine Stratonice ; nous fuppofons qu’il l’a peintè
de Ion vivant 8c que cette Stratonice étoit celle
que Séleucus époufa 300 ans avant notre ere. Il
a peint Danaë.- Il a aufii repréfenté la reine
Stratonice que des pêcheurs admiroient 9 ( * )
on avoit encore de lui Hercule & Déjanire.
Mais les plus célèbres de fes ouvrages furent
ceux qui furent apportés à Rome & placés dans
le portique d’Oclavie. Ils repréfentoient Hercule
qui ayant dépouillé fur le mont (Eta, ce
qu’il avoit de mortel , entrôit dans le ciel du
confentement dès dieux , & l’hiftoire de Lao-
medon avec Neptune & Hercule.
(*) Si l’on fuit la ponûuation des éditions de Pline, il
faudra dire que c’ttoit Danaë qui étoit admirée par des
pêcheurs, pifeatoribus, ou même par des brigands, proe-
donibus j comme "on lit dans. !a plupart des éditions. Il
n’cft pas qifé de comprendre pourquoi le peimre auroit
cho fi des pêcbeuis ou des brigands pour admirateurs de
Danaë Mais en changeant la ponctuation, & rapportant
l’admiration des jfècheurs à Stratonice, ce traie aura rap
porc à upe aventure de cette Reine qui a été rèpréfentée,
con me nous allons le voir, par le peintre Cléfidès. Alors
il faudra lire & ponâue-r ainfi le partage de Piine : Artemon
p in x it Danciëm ; mirantibus tam pifeatoribus reginam
Stratori'cem ; Herculem & Deïaniram. La leçon pifeatoribus
«ft fondée fur de- manuferits, & le changement de la ponctuation
çft néceîfaire pour donner un feus raifounabU à la
pbrafo.
P E I ( 34) Clesides n’ étoit pas un peintre de la
première claflè ; mais on a lieu de croire qu il
n’étoit pas deftitué de talent , & il fe rendit
fur tout célèbre par l’infulte qu’ il ofa faire à
la reine Stratonice. Piqué de n’avoir pas été
accueilli de cêtte princefie avec la diftinétion
qu’ il croyoit mériter , il la peignit fe proftituant
à un pécheur que la voix publique lui donnoit
pour amant. I l expofa ce tableau dans le port
d’Ephefe , & s’ embarqua aufli-tôt. La reine ne*
voulut pas que ce tableau fut enlevé , parce
qu’elle fe trouva merveilleulement reflemblante
ainfi que l’objet de fon amour. C’ ëft à cette
aventure que le peintre Artémon , dont nouâ
venons de parler , fai foie allufion , quand il
repréfenta Statonice admirée par des pêcheurs.
(3$) T héodore contemporain de Démétrius
& vraifemblablement celui à qui Diogène Laër-
ce donne Athènes pour patrie. I l avoit peint un
homme qui fe frottoit d’huile en fortant du
bain ou avant de s’exercer à la lutte ; C ly -
temneftre & Egifthe tués par Orefte ; la guerre
de Troye en plufieurs tableaux , qui furent apportés
à Rome & placés dans le portique de
Philipe. I l avoit peint aufii Caflandre, qui étoit
placée à Rome dans le temple de la concorde»
On avoit encore de lui Démétrius, & Léontium>
maîtrefle d’Epicure , livrée à la méditation.
Pline parle d’ un Théodore de Samos éleve
d’ un Nicoftene , & Diogene Laërce parle d’un
peintre natif d’Ephefe , qui fe nommoit aufii
Théodore»
^36) NealcEs , contemporain d’Aratus ch ef
de la ligue Achéene , florifioit à peu-près deux
fiécles & demi avant l’ erevulgaire. Une Vénus
étoit du nombre des tableaux de cet artifte que
l’on remarquoit. C’étoit un peintre ingénieux.
Ayant à peindre un combat naval des Egyptiens
contre les Perfes , 8c craignant qu’on ne prît
le Nil pour la mer , il repréfenta fur le rivage
un âne qui fe défalteroit & un crocodile qui
le difpofoit à l’attaquer. Par cet épirode } ilvmon-
troit que le combat fe donnoit fur l ’eau douce
puilqu’ un quadrupède en b u voit, & que ce
fleuve étoit le N il qui nourrit des crocodiles.
( 37 ) Leontisque n’ eft connu que par les
fujets de deux de fes tableaux, l’un repréfen-
tant une joueufe de harpe & l’autre Aratus
viâiorieux avec un trophée. Nous fuppofons
qu’ il vivoit à peu-près dans le même temps que
celui dont il célebroit les viétoires.
( 38 ) Erigokus étoit un fimple broyeur de •couleurs chez Néalcès. I l fit dans l’art afiez de progrès pour laiffer dans fon temps, quouiqnu ed ilfec inpolem qduei fèfsu to ucvérlaègberes
£>it entièrement perdu. Cet éleve le nommoit
p e 1
Pafias. L’exemple d’Erigonus eft remarquable,
en ce qu’il prouve que le talent pouvoit faire
taire la loi qui ne permettoit qu’aux hommes
d’une condition diftinguée de fe livrer à la
peinture. La loi .étoit l’age en elle-même; elle
auroit été ,barbare , fi jamais elle n’eût été fuf-
ceptible d’exception.
( 3.9 ) Euphranor de l’Ifthme de Coyiiuhe.
Pline le met au premier rang entre le* p€ÉÉtres
qui fleurirent après Paufias ; époque indéterminée,
puilqu’il peut s’être écoulé plus ou moins
de temps après Paufias avant qu’il ait paru un
peintre d’un très grand talent. Suivant les éditions
de Pline, Euphranor floriffolt dans la 104e.
olympiade dont la première année répond à l’an
304 avant notre ere : époque vicieufe , puifque
Nicias éleve d’Antidot'e qui eût pour maître
.Euphranor vivoit dans le même temps qu’At-
talus : or le premier Attalus prit «le, titre de Roi
de Pergame 241 ans avant notre ere, fous la
134K olympiade. M. Falconet s’eft apperçu que
cette époque des éditions de Pline étoit.fautive«
V» fes notes lur le 35e. livre de Pline.
' Cet artifte a cpnfulté le man.ufcrit de Pline
de la bibliothèque de Saint-Pétersbourg : on y
lit olympiade centefimâ quinquagefimâ •primâ. je trouve, en marge dé l’édition de Pline de
Dalechatnp la leçon d’un autre manuferit qui
porté olympiade fcilicet quinqiui'jefima prima. Il eft bien certain qu’i'uphranor n’a pu vivre
dans la $ie. olympiade ; il eft donc clair que
le mot fcilicet a pris la place de centefimâ &
que ce manuferit s’accorde-avec celui de Saint
Petersbourg pour placer Euphranor fous la i$ie.,
olympiade.
La vérité de cette leçon eft prouvée par le
récit de Pline. Il raconte qu’Attale voulut
acheter de Nicias un de fes tableaux. Il eft au
moins très probâblè que cet Attâle , amateur
des arts, étoit le même quirégnôic du tëmpp
de la prife de Corinthe , & qui mit un très haut
prix à un tableau: d’Ariftide de Thebes qui
provenoit du pillage de cétté ville & que Mum-
mius retira. Corinrhe fut détruite1 146 ans avant
notre ère, la troifième année de la 158e. olympiade.
M'
Nicias fleuriflbit donc à peu-près 140 ans avant
notre ere ,• &:parconfécjuent Euphranor , maître
d’Antidote , dont Niciâi étôft Péfeve , pouvoit
jouir de toute fa réputation à peu-près 36 ans
plutôt, c’eft-à-dire. 176 ans avant notre ere y
ce qui répond à la première année de la 151e!
olympiade. La leçon des éditions de Pline doit
donc être corrigée d’après, lies manuferits que
nous avons cités , & d’après le récit de Pline
lui-même.
Quintilien après* avoir parlé des plus grands
peintres de l’antiquité j &'.d’Apelles lui-même, nomme enfin Euphranor, qu’il regarde comme
P E l ayant porté l’art au plus haut degré de perfection
; il entre enfuite dans le détail des orateurs
Romains , & finit par nommer Cicéron qui' parvint
à la perfeélion de l’arr oratoire 8c qu’il
compare à Euphranor. Il réfulte de ce pafiage
que Part de peindre n’étoit pas encore parfait
du temps d’Apelies , & que c’eft Euphranor
qui le premier a réuni toutes les parties qui
complettent fa perfe&ion , comme Cicéron a
réuni le premier-, chez les Romains , routes
les parties qui complettent l’éloquence. A t M.
fu llium non ilium habemus Euphranorem circa
plurium artium fpecies prceflantem. , f e d in om-.
hibus , quas in quoque laudanXur, eminentif-
fimum ? ( Inft. Grat. 1. 12. c. io. ) Ce;tç obfejr-
vatiori a été faite avant nous par M. Falconet.
Jamais artifte ne . fut plus docile ni plus
laborieux qu’Euphranor. Peintre & ftatuaire ,
U excelloit dans tous les genres, 8c étoit toujours
égal à lui-même. Ilparoifibit avoir expri^
mé ie premier la dignité défc hétos 8c avoir
atceint à l’entière perfeâion. C’eft au moins
ce que dit Pline s’il faut entendre par le mot
Jymmetria qu’il emploie., ce que nous entendons
par proportion : mais je foupçonne qu’il y a dans
là fignificaticn de ce mot fÿm m ètria une légère
nuance qui nous échappe , & qui le dïftingue
dés mots commenfus 9 proportio , &c. Les
nuances entre le fens des mots qui paroiflent
fynonymes feront toujours , dans les langues
anciennes, le défefpoir des favans. ^
Pline remarque qu’Euphranor faifoitles corps
un peu trop fveltes , & les têtes un peu trop
fortes ; ce qui feroit un vice contre la proportion.
Il eft vrai que fi Ton ofoit rètrâneher du
texte le mot f e d , on pourroit entendre qu’Euphranor
donnoit de la fveftefTe à fés figures,
& de la grandiofité à fes têt.es ; ce qui feroit
un éloge. Il avoit é«rit fur la fymmétrie & fur
les" couleurs.
Les ouvrages d’Euphranor dont les fujets nous
[ orit été confervés ' étoient les douze dieux , des
tableaux1 célèbres à Ephefe repréfentant Ulyfîe ,
qui' contrefaïfoit la démence 8c qui atteloit à
la charrue un boeuf avec un cheval ; des hommes
en manteau*, plongés dans la méditation ;
un général qui remettoit fon épée dans 1« four-
; reau ; il avoit peint aufii les exploits des Athéniens
à Manrinee; ouvrage plein d’enthoufial-
‘ me , une Junon , dont on admiroit la chevelure,
, & fous un portiqued’Athenes , la démocratie,
le peuple , 8c Théfée.: Je ne fai fi c’eft ce Théfée
qu’il compâroit avec celùi de Parrhafius, difant
que le liên étoit nourri de rofes & l’autre de
chair.
i -1(40) Cydias de Cythnos. On ne peut.apprécier
fon talent que par lefhaut prix«qu’Hor-
tenfius mit à l’un des tableaux de ce peintre ,
8i par l’honneur qu’Agrippa fît à ce même