dans le temps du Bas-Empire, puifqüe le di-
gefte , qui eft l’afleniblago des loi'x qui avoient
précédé le fixieme fiè c le , temps auquel on les
a réunies , lait mention dans ces termes des
inftrumens qui fervoient à la peinture : L ’at-
telier d’ un peintre étant lé gu é , comprend les
c ir e s , les couleurs' & tout cé qui en dépend,
les pinceaux , les cautères, 8c les vafes propres
à contenir les couleurs ( i ) . Un autre auteur
dit aufli qu’un peintre, ayant légué l’on attelier^
a légué les couleurs, les pinceaux, les cautères,
& les vafes nécefiaires pour faire le mélange
des côulëuVsl
On ne trouve plus aucune mention de peinture
à l’ encaujlique depuis le 6 e fiècle jufqu’ à
nos jours , c’ eft-à-dire pendant environ onze
cents ans. Il eft cependant étonnant que, depuis
le renouvellement des arts , il le foit écoulé un
fi grand nombre d’ années fans que perfonne,
avant M. le Comte de Cayliis , ait remarqué
que la peinture encaujlique s’exéçutoit avec,dé
la cire , des couleurs & le feu. C’ eft donc àux
lumières de M; de - Câylus que là France a
obligation des premières vues du renouvellement
de cet art.
Cependant un auteur anonyme fit imprimer
un ouvrage en 1 7 5 5 , dans Lequel il s’ efforce
d’ enlever cette gloire à M. de Câylus ; ouvrage
dont nous rendrons un compté très-exaél, ainfî
que de tout ce qui s’ eft paffé depuis 1 7 5 1 jufqu’ à
ce jo u r , afin que la poftérité n’ ait pas, fur. le
renouvellement de la ' peinturé a Vencaùjïîque ,
le même embarras qu'ont éprouvé ceux qui ont.
travaillé à en débrouiller l’origine chez les
anciens.
Pour ne point m’ expofer à commettre d’ in-
juftice. envers perfonne en travaillant : d’après
des oui-dire , je commençai' par. écrire à M. Le
comte de Cayl us pour favoir comment M.Màjault,
doéleur en médecine de la Faculté' dé Paris,
partageoit avec lui la gloire de la'découverte
de la peinture à V encaùjlique, 8c dans quel tems
il avoit lu à l’ Académie des Infcriptions Ion premier
mémoire fur cette matière -, l’écrivis aufli
à M. Majault. Le premier me fir l’honneur de
me répondre, que, fans M. M ajault,il n’ eût jamais
trouvé les moyens de 'jpeindre à Vencaüjlique,
8 c q ue ' fon premier mémoire âvdit été lu à
l ’Académie des Belles - Lettres-en 1 7 5 z ; le
fé cond, q u e , fans M de Câylu s, il n’eût
jamais penfé à ce genre de peinture, & que cette
découverte étoit le produit de leurs travaux
faits en commun. J ’écrivis enfuite à M. Syl-
v e ftre , direéteur de l’Académie Royale de Pein-
(*) Picloris injlrumento '-legato > certz, colores Jimi-
liaque horumlegatario cedunt p en ic illi & cauteriaSf concha.
Ma rtian tit. de fundo inttitifto , L .: 17 .
Jnjlnimeato picloris legato 3 colorcs 3 penicilli, cauterlq
& temperandorum cplqruni vafa dtlegantur. J . pauius , L. 7.
tu re , pour obtenir des éclairciffemens fur le
même lu je t , afin de travailler toujours d’après
des pièces non équivoques* Voici, mot pour mot,
ce que M. Syl veftre me fit l’honneur de me
répondre -, par cette réponfe on jugera aifément
de mes demandes.
« Je réponds à votre première queftion ,
x> qu’avant la leélure du mémoire fur la pein-
» ture a l’encaujlique , que M. de Câylus fit
» en 1 7 5 3 > ^ n’avoit jamais été fait mention
» dans notre academie de ce genre de peinture
» ni de tous ceux dans lefqüels la cire fait l’office
» de l’huile. Je réponds à la fécondé, que
» quoique ce genre de peinture annoncé par
» M. de Câylus étonnât & méritât L'attention
>3 de tous les membres de notre académie par
» fa nouveauté & fa fin g a lante , aucun cepen-
» dant ne dit alors avoir employé 1 à cire au
>3 lieu de l’huile, pour peindre. A la troifième
>3 & dernière, je répondrai que,.depuis la le c -
» ture du mémoire de M. de Câylus faite en
» 1 7 5 3 , ju{’qu’ au tems de l ’ expcfition de la
>3 Minerve à l’ acadcmie des Beiles-Lettres en
» . 1 7 5 4 , il n’a pas été Fait mention qïi’àucun
33 de nos membres ait peint avec la c ire , ex'çep’të
>3 M. Vien , 8c que nous’n’ a vous vû de tableaux
» peints de cette manière , par MM, ‘Halîé'.
. 33 Bachelier & le Lorrain., que vers le ccm.-
» mencement de 1 7 5 5 V ces trois meflieurs font
» les feuls qui dans ce' tems ayent faits quel -
33 ques tentatives'dont j ’ ai.entendu parler parmi
>3 nous >3. Signé S y l v e s t r e .
Tous les membres de l’ acadcmie connoiflent
la droiture & les talens de M. Sylveftte. Ces
qualités lui ont mérité la place de dirëélëür qu’il
a occupée plufieurs années. Voyons maintenant
l hiftorique de ce qui eft arrivé depuis
le renouvellement de la peinture, à ï'encaujlique.
Notre deflein éft de ne blefier perfonne , mais
d’ expofer la vérité dans tout fon jour. La dàtb
des mémoires de M. de Câylus, rendue authentique
par la leéture dans deux académies, l ’ouvrage
de MM. de Câylus 8c Majault, auquel
ils ont mis leurs noms-, leurs lettres, celle de
M.- Sylveftre ferviront de pièces juftificatives.
On trouvera quelques répétitions dans les détails
que nous ferons, mais le leéteur fentira que
les reditès font inévitables, d’autant plus que
nous ayons cru devoir obferver dans notre narration
l’ ordre chronologique des événemens , fur-
tout ayant à .rapporter ce que contiennent des
écrits , q u i, quoiqu’ ils ayent paru en differens
tems , difent pourtant ou ies mêmes choies, ou
des chutes à peu près femblabîes.
M..: lé Comte de C ây lu s , qui a tant fourni
j de preuves de fon goût pour les beaux-arts1,
de qui nous avons de fi favânles recherchés
fur l’ antiquité , après avoir mûrement réfléchi
fur ce que Pline dit de la peinture a l'ën-
caujlique pratiquée chez les anciens, traita cette
matière
«Satïère dans un mémoire qu’ il lut eh 1 7 5 1 I
l ’àcadémië dès belles-lëttrës dont il èft meinprèj
11 lut aufli, en 1 7 5 3 9 a l’ académiè^ royale t}e
peinture un autre mémdi'rè fur- le meme fü jë t,
dans lequel il propofoit un moyen d’ exécuter
des tableaux avèc de la’ cire pure , des couleurs
& le feu ; mais les mejhfyés de cette académie
doutèrent de la poflib'ilité de peindre avec de
la cire.
N ’ètoït- il pas naturel, en comparant 'dette
nouveauté avec toutes les manières de peindre
connues, dé la Regarder comrtië difficile ou
même comme impoflible ? Cet art n’exiflaht
encore qu’ en fpéculatiôn, il étoit prudent de
ne s’en rapporter qu’ à l’expérience.
Cépendant M .; lé Comté de Câylus , pour fa-
tisfaire les artiftes .& l’on goût , déuroit de
mettre en pratique ce qu’ il avoit à peiné projette'.
Pouf remplir fés vu es, comme il le dit
lui-même dans fon mémoire, page 8 , il crut,
devoir affocier à fes travaux M. Majault,
doéleur en médecînè de la Faculté de Paris;
l ’amitié guida moins fon choix que lés connoif-
fâiïces qu’ il avoit des lumières de ce lavant
médecin. Ils travaillèrent de concert à découvrir
les moyens de peindre à l’ encaujlique.L e u r s
travaux eurent tout le fuccès qu’ ils pouvoient
defirer, & les conduifirent même au-delà de
ce qu’ ils avoient efpéré , puifqu’ ils firent 8c
ferfeélionnèrent la découverte de la peinture à
la cire. L’on vit enfin à l’académie des belles-
le ttre s, le ix novembre 1 7 5 4 , jour d’ une af-
femblée publique , un tableau repréfentant une
Minerve-, exécuté par M. V ie n , très - célèbre
artifte : la plus grande partie de cette peinture
^»roiivoit qu’ il étoit pofllble de faire des tableaux
à l’encaujlique. J e dis la plus grande partie,
parce que cett;è première produ&ion participoit
pour un quart de la peinture à la cire. Tout
Paris voulut voir cette nouveauté, 8c les peintres
enfin convaincus en furent les premiers
admirateurs. ( 1 )
MM. de Câylus & Majault travaillèrent à
perfeélionner la peinture à l’encaujlique 8c la
peinture à la cire j & à mettre le manuel de
ces nouveaux arts en état d’ être publié. Toutes'
-leurs expériences furent achevées au mois de
juin 1 7 5 5 . Elles firent en partie la matière d’un
mémoire que M. le Comte de Câylus lut à
l’ académie des belles-lettres le .juillet de,la
même année, c’ eft-à-dire huit mois dix-huit
jours après l’ expofition du tableau de la Minerve.
L’académie desbeliesTettres, perfuadée que cet
ouvrage pouvoit être utile aux artiftes, permit
O) M. Carie Vanloo,cec Arcifte fî connu par fes rares
salens, voyant pour la première fois'le tableau de la Minerve,
dit que Y encaujlique n’croit" pas une fi mauvaife chofe ,
& .qu’il vouloit,aufli peindre de cette manière.. On fçhç; de
•quel poids peut être l’approbation de M. Vftgfvo. ’Bwux-drss. Tome L
qu’ on lé tirât de fes régiftres & qu’on l’ imprimât.
On' y -joignit le mémoire fur la peinture
à la cire qui n’y avoit pas_ été lu , parce
que ce dernief ouvrage îftëroit pas de fon rélfort.
Les deux mémoires imprimés furent diftribués
air public dans un feul .volume le 2.5 août de la
même année , fous lé titre' dé Ménioïle fur^ la,
péintàré: à Péhcdujlique & fu r la peinture à là
cire , .ouvrage méthodiqüé 8c bien tîfili , qui
fera éternefieinént un honneur infini à^.fos
auteurs. Il eft bon de ré to rq u e r que y lors’ dé
la ledure ;du mémoire dont nous venons de.
parler, M. le Coînte de Câylus porta à l’ académie
dés inferiptions deux petits tableaux peints,'
l’ un félon la troifième , l’ autre félon la quatrième
manière de peindre à Veitcaujliqlie , dont
il n’avoit point encore fourni de preuves par'
expérience. Mais revenons à l’époque de l’ ex-
polidon du tableau de la Minerve.
Dès que ce premier effai eut paru à l’ académie
dés belles-lettres, ce nouvéau genre de
; peinture excita l’émulation & la curiofité, Par
quel moyen , fe difoierit’ entr’eux les membres'
les plus éclairés de l’académie royale de peinture,.
a-t-on pu parvenir à,peindre^ avec là cite 1 '
N i M. de Câylus , ni M. Majault, ne dirent
| alors quels en étoient les procédés.: c’ étoit un
tribut que M. de Câylus devoit à l’académie
des infcriptions avant ique de les rendre publics,
puifque leurs recherchés n’avoient pour objet -
que le renoüveilemërit d’un art connn chez les
anciens.
Cependant les peintres qui avoient beaucoup
touché , fenti 8c examiné le premier échantillon
de cette'peinture, y ayant trouvé un peu d’ odeur
d’eflence de térébenthine, crurent que tout
i ce tableau avoir été peint avec de là cire difloute
; dans bette eflénee ; car on ne s’ imaginoit point
alors qu’ il fût . pofllble de faire des tableaux
avèc de la cire oc dès couleurs fans'que la cire
fût diflbutë j & on ne connoifloit même pas la
diflblution d e 'la ciré dans l’ éflehçe de téré-
bëîïthiriè, quoiqu’ en ait dit un petit ouvrage :
anonyme dont nous parlerons dans la fuite, 8c
que M. Monnoÿè a fërieufenièht rapporté dans
le mémoire fur Ÿencaujlique qii’ il a fourni au
diélionnairé ericyclôpédiqùe.
Les peintrès qui à voient examiné la première
produélion dé cette peinture , s’entreteiïoient
avec ceux qui lié l’avoiènt, pas vue des remarques
qu’ ils'avoient pu faire , & quelques-uns
pfojèttereht d’ en faire des effais.
MM. H a lle , Bàchëlief & lé Lorrain furent
ceux qui firent les premières ’ tentatives ; ils J
broyèrent-Leurs couleurs avec de la cire difloute—
dans l’ eflence de térébenthine, peignirent 8ç
fo; hâtèrent de faire voir leurs premières pro- %
dtiélions. "Elles parurent dans les mois dé Jan- -
v îè r , F é v r iè f, Mars de 1 7 7 5 . MM. Halle 8c le 1
Lorrain g’ en tinrent à quelques pêtiis tableaûxV‘
I i r ^