
xiv A V E R T I S S E M E N T .
mal combinés entr’eux , donnent de la gêne à la figure , & de la fatigue
au fpeftateur. Vous aimez h voir Hercule tenant le: géant Aiithée
fufpendu dans fes bras nerveux, & prêt à l’étouffer fur fon fein,; c’eft
que les loix de l’équilibre complettement obfervées dans ce grouppe,
vous rendent en quelque forte témoin de l’aftion, vous applaudiffez k
la défaite du monllre impie vaincu par le demi-Dieu.
Qui mieux que le Titien peut donner des leçons fur l’harmonie de
Ion art ? Qui dira mieux que lui comment les rayons dirigés du centre
lumineux vers les divers points de l’objet, y portent le jour, & font
terminés par les ombres; quelles font les loix de leur incidence & de
leurs reflets ; quelles font celles de la dégradation*des couleurs & de leurs
fympathies ; jufqu’a quel point les organes de Partifte influent fur le
ton de fes tableaux, & lur-tout avec quel foin ont doit éviter le faux
brillant qui, dans la peinture , comme dans la poéfie & dans toutes les
productions de l’efprit, diminue l’effet au lieu de l’augmenter.
De ces nuances bien failles réfultent la grâce ( i ) & la beauté, dégagées
de toutes les fantaifies delà mode & de la contrainte des manières ,
telles enfin qu’on les voit quelquefois fortir des mains de la nature, ou
telles qu’on les a vu naître fous les pinceaux • du Corrége & de
l’AIbane.
Ne faut-il pas encore que l’expreffion anime & varie les tableaux?
Ic i le Dominiquin & le Brun fe réunifient pour dévoiler les fecrets de
famé affe&ée par les pallions, & pour apprendre l’art d’en failir extérieurement
les caraétères. Mais, où trouver des fujets propres à ce genre
d’imitation? feroit-ce dans les villes, où les gefles & la phyfionomie
obéiffent k la convention dès l’enfance? Seroit-ce près des villes, où
tout ce qui les environne , les champs, les animaux & les arbres eux-«
mêmes, portent le fceau de la contrainte & de l’uniformité faciale ?
(i) La grâce, dit M, 'Wstelet, naît du jufte accord des fentimen* de l’ame ayeç l’aftipji
du corpjs,
a v e r t i s s e m e n t . ‘ w
Seroit-ce loin des villes , où les organes, fatigués & greffiers, ne reçoivent
qu’un petit nombre d’impreffions qu’ils favent aufft difiimuler ? Parmi
tant de caufes propres k mafquer la nature , feul modèle des arts, qui
retrouvera là trace des émotions du coeur humain , fi ce n’e f t l’obfervation
guidée par l’enfeignement des grands maîtres dans les Académies, où
l’on garde un fouvenir profond de ce que l’homme fût autrefois, & de
eéqù’il a perdu dans les grandes affiliations de force, de franchife
& de fimplicité ?
Efl-ii donc une étude plus grande & plus belle que celle de l’art de
peindre aïnfi confidéré ? Comme il s’unit'k-la philofophie par le tableau
des ïehfatîohs; k la morale, par celui des vertus & des vices“; k l’hiftoire
naturelle , par celui des attitudes & des gefles ; k la fèience de l’equilibre,
parles hens de fa pondération dès figures ; à l’optique, par les illufxons
de la jicrfpeclive; k l’anatomie, par le deffm des maffies & des articulations
; enfmv àda chymie, par la fabrication & le mélange des couleurs !
En lifant cer ouvrage j on eft étonné du grand nombre de penféei
& de vues refferrfe par d ’auteur dans auffi peu d’efpace. Ces réflexions
ne font en effet que le fommaire d’un grand traité auquel M. Watefet a
eonfacté fa vie , qu’il enfin rédigé fous la forme de Diflion naire &
dont ld':phblie 'jduira biehtor. Tout'ce qui concerne l’art de peindr’ë y
eft difcùté-Hns'Ibngueur & fâlrs ennui ; le précepte ne s’y montre' jamais
tiblé; on-wit pàr-tbütd’où il naît, & ce qu’il doit produire. L ’enthou--
fiàfme^ & fe goût font •affiijettis à quelques règles ; elles y font tracées,:
Nul ri-y guiférà fini doute ni cette- Vivé émotion dont famé tire fa‘ vigueur *t
nr ce taâr exquis d’un feris"intimé qui la' drîige: dans fes mouvemens -,
foâis cèux qui «n font pdurvus y trouveront des confeiïs dont ils fauronr
profiter. L ’art de peindre rèeonnoîfdeux origines; l’une naturelle:, l>m w
Æ ' f f i S É t t g B S f0n-d0raaiflè M deux mondes, dont l’um
reel, & 1 autre 'imaginaire ; il repréfente deux efpèces de beautés :
nt uné ëfl'vtaié;, & ’ flkùtrë feulement idéale. Tantôt il montre l i