
minee, & que l’on peut enfeigner des parties
qui ont été mal-à-propos décorées du nom de
g en ie , mais non qu’on puifle enfeigner-à avoir
u génie. On peut donner des leçons de toutes
les parties de J%rt jt.fi' l’on acquiert dés parties
nouvelles, on pourra leslbumettre encore
a des. principes j mais on n’ enfeignera jamais
a ie s pratiquer avec génie, parce qu’en ne'peut
apprendre à un jeune artifte à avoir de l’imagination,
de la fenfibilité, un efprit d’ une vafte
étendue & 'd’une grande profondeur Par quels
moyens M. Reynolds apprendroit-il à les élèves
1 art de mettre -dans leurs ouvrages,' l ’expref-
fion qui fait admirer fon tableau du Comte
U golino, exprefiion que toutes les parties de
1 ouvrage concourent à rendre plus profonde &
plus terrible ?
Comme celui qui parle, qui écrit avec génie
ne pourrait manifefter fes conceptions ,li les
hommes ne s’étoient pas fait un langage , î’ar-
tifte de génie ne pouvoit faire connoître les
lien nés avant que leiangage.de l’àrt fût formé. *
I lus ce langage a été borné, plus l’arcifte de génie
a éprouvé de gêne. Ainfi, tant que la peinture
a ete bornée au fimple trait, le génie pitto-
refquea eu peu de moyen de fe montrer.' 1
- ^ Giotto avoit autant de g énie que Raphaël,
comme les moyens qui forment le langage de
X art-étoient moins perfectionnés de fon tems ,
il n’a pu le manifefter de même. Comment
avec les lignes raides , inflexibles monotones
■ deflin, auroit-il rendu la v ie , le mouvement,
l’exprefïion de l ’homme, paiTionné ? 'Si
le langage de l ’art acquiert <à l’avenir dès perfections.
nouvelles, o?efr-a-dir.e, fi les moyens
de 1 art^ acquièrent une plus grande étendue,
les artiftes de génie tireront de nouveaux^ avan-
tages de ces nouvelles perfections, comme
l ’écrivain de génie trouve dans unë langue
plus riche des reflburces que lui rëfufoit unei
Japgue pauvre : des maîtres pourront leur en -l
feigner à en faire ufage ; mais ils ,auroht- le '
génie en eux-mêm^s, 8c o.n ne leur enfeignera
pas à en avoir. C’ eft ce qu’on peut répondre
au raiionnement de M. Reynolds,, ou plutôt
c’ eft ainfi qu’on doit l’ interpréter.
I l met le. talent d’ exprimer lès pallions au
nombre des choies qui fe peuvent enfeigner.
II eft vrai qu’on peut démontrer l’çxprêffion fur
la nature vivânte & lurles ouvrages des grands’
maîtres; qu’on peut en appuyer l.es principes!
fur la fcience de l’anatomie & fur celle de la
phyfiologie :tn jjs comme il faut fentir foi-même
pour bien exprimer les pallions , on ne peut
apprendre à perfonne à lesbien exprimer, puif.
qu’ on ne peut apprendre à perfonne à être fen-
fible.
I l en eft de même de l’imagination & de la
profondeur : on peut faire l ’analyfe de ces deux;
opérations de l ’e lprit, on geut en donner de
beaux exemples-, mais on n’ enfeignera pas à
imaginer fortement, à voir profondément.
Nous*rapporterons, pour terminer cet a rtic le ,'
ce que dit Mèngs du génie de Raphaël. « I l étoit,
» dit .l’artifte Saxon , doué fans doute, d’ un
” S eJ *-'f lupérieur ; non de celui qu’on c ro it, eh
» gênerai, propre à la peinture , & qui n’ eft
» q ; ' “ nn imagination brillante ; mais d’un génie,
» .réfléchi., ;Vafin & profond. C a r , pour devenir
)i un grand peintre , il n’eft pas-tant néceffairë
» ci avoir une grande vivacité d’efprît, qu’ un
» difeernement jufte , capable de diftinguer le
». bon du mauvais , avec uneame tendre & fen-
» .llble 1er laquelle tous les femimens font une
” prompte imprelfion, comme fur une cire molle,
P mais qui cependant ne change de forme qu’au
» gré de l’ artifte.
» T e l doit être le génie du peintre ; tel a
» ete celui de Raphaël. Car pour donner cette
» variété que. nous remarquons dans les compo-
» litions, il.falloitnécéflairement qu’il,pût modi-
» ner a 1 infini fes propres fenfations , puifque ,
» ans avoir bien conçu le mouvement que
» doit faire un homme,dans la fituation déter-
“ f " ne> où nous vie fuppofons, on ne fauroit
» le rèndre furla toile. L’ efprit préfide à toutes
» nos actions; par conféquent celui qui ne -fait
» pas le repréfenter vivement une chofe , fiura
» bien moins encore la peindre ; & fi l’on y
» parvenoit par quelque moyen artificiel, on
1 oe feroit aucune imprelfion fur l’efprit du
» fpeclateur ». ' ’
Ce que Mengs etablit ici s’ accorde parfaitement
avec la définition que nous avons donnée
du génie. {A r tic le de M. L e v e sq v e .)
GENRE ( fubft. marc. ) On nomme peintres
de genre \es, artiftes,qai fe font eonfacrés
particulièrement à repréfenter certains- obiers
Ile s goûts, particuliers & la difficultéd’embraf-
fer toute l’étendue de l’ art, ont occafionpé .c c te
divilion dans la pratique de la peinture. Les
mêmes caufes ont'formé dans ' d’autres arts des
divifions à-peu-pfès femblables.
Un pcëte qui auroit à lui feul les taiens hé-
ceffaues pour exceller dans tous les genres de
Poefie , feroit à-peu-près dans cet art, ce qu’eft
OU. î e. que devrdit-' être le .peintre à’Üifloire
■Mais les-uns s’adonnent plus particulièrement
aux 5 amorales : Hs/oat pdëtës payfagiftèi ; adx
compclitions anacreontiqu%s, ils s’approchent du
genre des peintres agréables; de même quelques
artiftes qui peignent les animaux , ont
des .rapports avec les fabuliftes. \Tàteau , Lancret
& quelques artiftes modernes qui ont pris
pour objet des aftions ou dès fcènés particulières
de la vie commune , peuvent fe comparer
aux auteurs de comédies, & les poètes def-
criptifs aux peintres de vues.
La peinture enfin appelle genres ce que la
pôëfîe appelle dû même nom, excepté qu’on né
dit pas des poètes de genre, mais dès poètes qui
s’occupent, d’un genre.
l ie n eft de même dans.l’éloquènce., dans la
mufiquè & dans tous les arts j mais pour donner
à ceux qui ont peu de' connoiffance de l’objet
de cet article, une idée plus preciPe de ce
crui caraétèrife & autorife cette divifion des
genres , je me fer virai d’une" image. Cette minière
de ‘s’ expliquer a quelque droit d’être ad-
mife en parlant dé la peinturé.'
I l eft peu deTe&ëurs, pour peu qu’ ils foient
tnftrurs., q u i f u r les pas du Taffe , n’ayent '
fulvi les Chevaliers Danois : dans le merveil- l
leux, féjôur d’Armide '9\où tous "les obje?j£ de
là nature ayoient été places'* avec choix & au
gré d’ un art qirë dirigéoit l’amour le plus in -’
génièirx; .
Tranfportons-noüs y quelques metnens &
reprëfentons nous les diveries' imprelTions qui
ont occupé fans doute fucc'èfiivement les deux
■ Pages, attentifs à. tout ce qui s’offiit à leurs'
regards. Ils apperçoivent, en approchant, iin
magnifique 8c vafte édifice j ils on t dû s’ arrêter
dans l’ endroit où ils ' pouvaient mieux î’obfer-
ver. Alors le fi te où fe trouvé c é . palais, fà
forme générale,3ënfuite fes parties, leurs déta
ils, lés effets qui en réfuitent concéntrént
leur attention 8c fixent leurs regards.
Transformez ces. obfervateùrs en artifires *, !
qu’ ils prennent leurs pinceaux pour imiter le.
genre de beautés qui les occupe 8c pour en
faire paffer le fentimeht^tel -qu’ ils l’éprouvent,
à ceux qui verront leur ouvrage j voilà des peintres
qui fe confacrent au genre de l’architeêiuré',
tel qéé l’ ont exécuté avec fuccès Pànini ,?:Sér-
vandoni 8c ceux qui marchent Çir leurs tra-
è-ës-.'
L.éur feùtiment & leur affeétion les portent
à regarder i comme objet principal de ' leurs
tableaux, la magnificence dés. fabriques & les
«fiers que leurs oTnemens donnent lieu"de produire
par le choix des-lumières & du clàîr-
•obfcury. ou bien ils fè plaifent à rêprcTenter lé
pittorefque des mohumens altérés par lë'téinsl,
îèufs :àtctdeni & leurs majeffiieufès ruines.- Ils
joignent à ces objets principaux de leurs com-
pofitions , ce que-.lès, plantes 8c 'les ëaux-pën-
■ yèfit y ajoùter ide beautés : ils ne fe refnfent
pas d’y aîïbcier quelques arbres qui, nés ; dans
les décombres 8c parvenus à leur terme v font
penfer aux effets du tems &: portent l’éfprit
du fpeftateur à l’ époque reculée' de fés defiruc-
tions.
Mais en fe permettant des acceffoires heureux
8c choifis, le peintre d’architeâure fait
toujours ën forte qu’ ils foient fubordonnés', &
qu’ils ne détournent point trop de l’objet principal
j auquel il confacre principalement fes'
foins*-
- PafTorls dans" l’ intérieur du fejour magique;
autres motifs d'e furprife 8c d’admiration ; nouvel
objét principal pour nos guerriers, comme
obfervateùrs, & pour nos peintres de genre comme
artiftes. Des intérieurs décorés de tout ce que
l’ art peut imaginer pour furpaffer la nature,
frappent les yeux 8c entraînent le peintre à
y confacrer fes taiens ; mais ce^ genre-, qui tient
de près au précédent, a befoin d’ une.imitation
plus exaéle du clair-dbfcur & des perfpeélives
liriealës &'aëriennes, pour produire fon illufion.
D’ailleurs, la régularité., la fymmétrie, la d i f - .
ficultë d’y trouver ‘ des- variétés .& des oppofi-
tions, rendent cq' genre plus frbid & moins
pratiqué; La: 'plupart de ceux qui l’ont exercé
avec, fuccèsy onr çhoifi pour objet dé leurs
repréfen&atioh's é r a f le s , dcs 'Eglîfes' le pjtis
foùvent gothiques, ' d p n t'lè s ëîevatians , les
jours myftérieux ;& lès points de vue pitroref-
qiies leur ont aidé à lutter contre • la difficulté
d’in ter ef.èr lès fpèéïateurs. En e ffet, les' regards
ne font arrêtés quelques momehs fur les
tableaux de Steeriwicît & de Pieters - Neefs
qiie par l ’ illufion de la pérfDeéiivè,; par une
grande vérité de couleur ou de lumières dégra-
\ dëes 8c enfin à l’aidé de qaelques détails de cé-
■i rémonies que cpmporte l’ ulage "de ces édifices.
Par-bes raifons , ce- qui pourrait rendre l ’intérieur
d’ un palais incérefrant, feroit ou quelque
i ceremonie, ou quëlque divertiffement & ces’
acceffoires néceffaires font fentir le défaut de ce
genre qui ne-peut fe fufiîvé à lui-même; I l eft
tel en effet que les Chevaliers , après’ avoir
âdmiréqu|;lqufes tableaux dont étoîtornéle beau
palais;folitàire, s’empréfsèrery: d’en fortir; mais
dans le moment où ils pénétrèrent dans les jard
ins, où l’art Caché difputoitde beauté, de variété,
d’aceidens agréables avec la plus belle
nature” & l’emportoit fur e lle , nos guerriers fô
I fentirent-attachés,* incéreffés plus vivement, &
; c’eft le fort des peintres qu’un penchant fecret
: porte à émbraflèr le genre du' payfage & q u i
5 cherchent , pour fe lluisfaire-, des fîtes heu-
retix. .m
■ Ils employent tontes, les refToùrces de l ’art
à 'repréfenter ces arbres choifis dans tous les
climats & dont lès formes»majeftueufes, ainfi
que la verdure admirable,- excitent leur ad*
mirâtion. Ils font arrêtés par la limpidité des
eaux , & par lés foeaux ’ reflets qui fembîent
'Vouloir ’les convaincre à quel ,dégré de per-
fe.éïion l ’on peut parvenir à repréfenter le re lie f
8c les difiances des objets réels fur une furface
platte : ils partagent leurs foins entre les gazons
& les fleurs.
Mais comme celles-ci font aufti parfaites-dans
leshjardins d’ Armide que-^dans ceux de Flore
même, l’obfervateùr de ces beautés diverfes
■s’ en approche. I l fixe particulièrement fes re-
■ gards fur chacune .d’ elles ; tranfporté d’admi