* 4 2 P E I Caylus d’ avoir meme confondu les inftrumeris
cjue les Grecs eiri.pl oyoient à ce procédé, dont
le principal étoit un fer ardent qu’ ils appelloient
cautérion, 8c ai/quel on fubftitua quelquefois
un •feiï plus 'a&if encore, fait avec des noix
de gall.e allumées , pour forcer la çire à pénétrer
plus profondément dans le fond du tableau.
L’ouvrage .terminé -, on le liflpit jufqu’à ce ;
qu’ il eût acquis un .poli prefque auffi brillant
que celui d’ un miroir.
Dans cette méthode, il n’étoit pas poflible,
foivant M. de Pauw , de rompre fuffifamment
les couleurs, ce qui ne femble rien moins que
prouvé. En effet , fi les couleurs broyées à la
cire étoient aufli coulantes que les couleurs
broyées à l’huile , les anciens peintres à I’ en-
caufiiquè pouvoient, auffi bien que les peintres
modernes à l’huile , mélanger, fondre les
couleurs , noyèr lès téintes ; 8c cette fonte
n’auroit pas été détruite par le travail du lif- ;
fage. Mais dé ce qu’ ils le pouvoient, nous ne
conclurons pas qu’ils l’ ont fait. Enfuite^ ajoute !
M. de Pauw , de tels tableaux ne pouvoient
être vus que d’ un feül côté , fuivant la chiite
de la lumière';, .qui s’y reflétoit tellement, que
les fpedateurs placés dans un point oppofé au •
jo u r, ne difcërnoieiit exaélemerit aucune partie
ide l’ouvrage. On peut répondre que cet inconvénient
eft le même pour les tableaux en
h u ile , quand ils font vernis. I l en réfulte qu’ il
faut les expofer convenablement, ou fe mettre
foi-même dans une place convenable.
( 5 ) Miçgn étoit contemporain de Polygnote.
Les travaux du Pceçile lui furent adjugés
; mais Polygnote en fit généreufemerit
une partie confidérable 3 fans demander ni recevoir
aucun falaire. Les Amphiélyons, qui
étoient les États-Généraux de la Grece,, ne
furent pas infenfibles a,u procédé du peintre de I
Th a fo s , 8c pour lui en témoigner leur recon-
noiflarice , ils ordonnèrent qu’il auroit partout
Ton logement gratuit. Indépendamment de Tes
Tableaux du Poecile , Micon fit des ouvrages :
dans le temple de Théféé. Paufanias remarque
que .l’ une de ces peintures n’étoit pas entièrement
de fa main ; ainfi les peintres , dès lors ,
fe faifoient aider dans leurs entreprifes confi-
dérables, à moins que Micon ne fbit mort avant
d’avoir, fini fon tableau.
( 6 ) C’ eft auffi vers Ie_temps de Polygnote ,
qu’ il faut placer Paùson ou Paffon. Arifiote
dit que Polygnote , fit les hommes meilleurs
qu’ ils ne font ,. Paufon pires , & Dionyfius
te ls qu’ ils font en effet y ce qui femble figni-
fie r que Polygnot.è. relé va la nature humaine
par un caraélère idéal , que Paufon ne repré-
iènta qu’une nature .ignqble & pauvre , & que J
ü ionyfiue fe contenta d’ imiter la nature telle I
P E ï qu’ elle fe préfente ordinairement. On fera \é
cas que l’ on voudra d’ un vieux conte fur Paufon
qui fe trouve dans Elien. Ce compilateur
dit qu’on chargea le peintre de repréfenter un
cheval qui fe rouloit par terre ; que Paufon
fit un cheval courant , 8c que celui à qui
! etoit defliné l’ouvrage étant mécontent de ce
qu’on n’avoît pas rendu fa penfée ; » il n’y, a
» qu’ a renverfer le tableau , lui répondit le
» peintre , & ce fèra un cheval qui fe rou-
» le ». Si l’on admettoit ce corite , il fau-
droit fuppofer qu’ alors les peintres ne repré-
fentoient pas encore les ombres portées , &
qu ils ne faifoient voir aucune différence entre
le ciel 8c le terrein, Cette, fuppofition feroit
abiiirdé , puifque les tàbleaux de Polygnote
eflimés d-* Arifiote , l’étoient encore dans le
cinquième .fiècle de notre ere. Mais , pourroit-
on d ire , les tableaux de Paufon étoient inférieurs
a ceux de Polygnote. J ’en conviens :
mais s’ ils euffent été ablolument mauvais pour
leur temps , Arifiote n’avoit pas daigné Je.nom-
mer , & Ton nom n’auroit pas encore vécu du
temps d Elièri. On ne fait des contes que. fur
des hommes célèbres.
' ' (7) Diowysius de Colophon, imitoit la perfection
de Polygnote ; il repréfentôit les objets,
moins grands ; mais on voyoit d’ailleurs dans fes
ouvrages, dit Elien, la même expreffion, la même
obfervation des convenances, le même choix
des attitudes , le même écla.t dans les draperies.
Çe paffage d’Elien pourroit fervir de commentaire
à ',celui d’Ariftote ; 8c alors le phi-
lofophe' auroit dit feulement que Polygnote
faifoit- fes figures plus grandes que nature
Paufon plus petites , 8c Dionyfius égales -, ce
qui e fi en effet la traduâion littérale de la
phrafe d’ Arifiote. Si l ’on en croit Plutarque ,
on fentoit la peine & le travail danÿ les tableaux
de Dionyfius.
{ 8 ) Apollodore , Athénien , que Pline
fait plus jeune que Polygnote. I l dit de ce
peintre qu’il fut bien rendre le premier l ’apparence
des objets, que le premier'il contribua
à la gloire du pinceau., & qu’on ne voit aucun
tableau fait avant lui qui arrête les regards.
Cela, femble contredi/e ce qu’il avoir
établi lui-même fur le talent de - Polygnote.
8c ne le contredit pas en effet. Polygnote
s’écarta de la roideur des anciens peintres, il
vê tir, il coëfta les femmes mieux que fes pré-
déceiïeurs, il donna un grand caraâère à fes
figures , il fe diflingua par. l’ exprefïion : voilà
le mérite de Polygnote , que l ’on pourroit
comparer à celui de Raphaël. Mais Apollodore
montra plus d’art dans le maniement du pinceau
, comme Pline notas l’appirend ; mais
coipme le dit Plutarque, i l inyenta la fonte
p E I des couleurs & le véritable caraélère des om- i
bres : c’ eft un mérite différent qu’on pourroit
comparer à celui du Titien ; c’ eft la forte de
mérite qui appelle & fixé les regards. L a ‘couleur
de Polygnote étoit foible , dit Quinti-
lier* : Apollodore qui fut bien, r’endre les om- ;
b re s , qui trouva le moyen de-faire illufion en
exprimant l’ apparence des objets , qui porta
enfin la partie du clair-obfcur a un dégré que
nous ne pouvons apprécier , puîfquë nous ri’â-
vons pas fes ouvrages , put faire des tableaux
vigoureux. M, Cochin , qui rend jufiice- a :
Raphaël, dit qu’ il y a quantité de fes ouvrages
dont le premier afpeâ doit déplaire a qui- (
conque n’ eft pas connoiffeur. I l y a donc une
grande différence entre-un peintre d’ un grand ,
8c même d’un beau caraélère , & un peintre qui
attache les regards., On pourroit donc, fans fe
contredire , 1 après 'avoir fait l’élôgè de Michel-
Ange & de Raphaël, dire en parlant d’ un peintre1
colorifte , qu’ il fut le premier qui arrêtât
lefc regards.
■' On écrivit fur les ouvragés d’Apollodore :
» on l’ enviera plutôt qu’on ne l’ imitera >>. ..
( 9 ) Z eu x i^ d’Héraclée, étoit, fuivant Arif-
totç v cité par Suidas , contemporain d’ Ifocrate,
qui mourut dans un âge très avancé 378 ans
avant notre e re , dans la troifième annee de la
90e. olyiripiade. Pline rapporte qu’il reçut un
défi de Parrhafius , contemporain de -Socrate,
8c ce philofophe mourut 40-0 ans avant notre
ere : on peut donc croire qu’ il fleurit entre la
90e. & la 95e. olympiade. Peut-être plus jeune
que Polygnote , i l 6 7étoit fon contemporain.
Zeuxis , défie par Pàrrhafius, apporta des rai-
fins peints que des oifeaux vinrent becqueter:
Parrhafius apporta de fon côté un ridéau peint ,
qué fon rival lé pria de tirer , ;afin qu’on pût
juger de fon ouvrage. Zeuxis. fe déclara vaincu ,
parce que lui - même n’ avoit trompé que^ des
animaux , & que Parrhafius avoit trompé un
pêintre. Ce n’ eft pas fur cés petites illufions
d’un moment que l’on juge des ùuvr&ges de
l’art. Ce n’.eft pas fur la rèpréfentation d’ une
grappe de raifin 8c d’ un rideau ^ que les plus
grands peintres d’ un fiècle floriflarit par les
a rts, fe difputent le prix. Voyez l’ article I llusion.
Mais fi l’on fuppofe ;;qùe ce récit avoit
quelque fondement , il peut nous faire apprécier
les progrès que l’ art avoit faits dans les parties
néceffaires à des illufions femblabes.
Ce qui'pourroit notas donner uqe plus haute
idée 'du tarent de Zeuxis , ce ‘ font les vers |
qu’Apollodore fit à fa louange , & dont Pline
nous a çonfervé le fens : il s’y plaignoit que J
cet émule lu i avoit enlevé l’art & fe l’étoit |
réfervé. I l étoif beau d’étte loué par un artifio
q u i1 a reçu lui-mêmé tant 'd’ élogés.
Nou^atvons parlé dè la Genfaureffe de Zeüxis
p e r
à l’article Mythologie. Il fieparoît pas s’être-
principalement occupe , comme Polygnote 8c
Mycon j de grandes corripofitions fur des murailles
; il fe plut à faire des tableaux d’ un ^
tit‘ nombre de figures , & ce genre à été préféré
par fes fucceffeurs. Ses principaux ouvrages
l’ont une Pénélope , dans laquelle fuivant
Pline , I l paioiffoit avoir peint les moeurs de
bette- -princéfFe , ce qui fuppofe plus de talent
dans 1’'expreffion qu’Arifiote ne lui en accorde j
ce font un Athîete , un Jupiter fo r fon trône
chtôufé des Dieux ; un Hercule -enfanr qui
étrangle des ferpêns en preferice d’Amphitryon
8c d’Alcmene- »-’ une Hélene , un Marfÿas lié.
Chargé âe- faire une Hélene nüe pour les Cro-
toriiatês , il choifit les cinq plus; belles filles
de cé ’ périple potar réunir dans une feulé figure
ce que chacune d’ elles avoit de plus beau*
Ce fut ainfi que les Grecs , chez qui la nature
étoit féconde en beaux modèles , parvinrent' a
élever le s ’ ouvrages' de l’ art'.a la plus haute
bea'utél : ' '
QuOiqué les peintres , long-temps avant Zeuxis
, employaient différentes couleurs , il fit des
peintures monochromes ou camayeux en blanc
fur >un fond brun : c’ eft le procède .contraire à
celui de Polidore de Caravage qui faifoit enduire
de noir urië muraille, & la peignoiten enlevant
le noir par hachures. ^
Zeuxis; acquit de grandes richeffes-y 8c s’eti
fervît pour étaler un rafle impofant : il le mon-
troic aux jeux olympiques avec un manteau fur
lequel fon nom étoit brodé en lettres d’ or. Dès
lors il fit préfent dè fes ouvrages, croyant qu’ils
ne pouvoient être payes dignement. Si l’on
blâme fon o rgu e il, on peut avoir quelqu’ eftime
pour fa fierté ; elle ne meffied point aux grands
talens. J ’aime à voir le peintre Zeuxis impo-
l’er dë la reconnoiffance au-Roi Archélaüs , à
qui il fit préfent d’un tableau qui repréfentoiè
lé dieu Pan. I l donna aufli une Alcmene aux
Agrigentins. ’ ’ ' *’••• : :
■ Cfc peintre faifoit des modèles,en argille.- OA
tranfporta à Rome ceux qui reptéfentoient les
Mufes. Nous avons dit ailleurs combien ce tablent
eft utile' aux peintres, i
Ma'rius Viflotinus , qui vivoit au milieu di»
quatrième fiècle de notre' e re , dit qu’ il exiftoie
encore des ouvrages’ de-Zeuxis , ce qui fuppofe une durée de feptefiècles & demi, Un grand
nombre d’ouvrages; de nos’ grands maîtres ,
dont les plus anciens’ ont a ’peinè trois fièeles,
font déjà détruits'ou dégradés’ par 4a vétufté.
Pline reproche à Zeuxis d’avoir fait les têtes
trop fortes , & Quintilien d’avoir généralement
chargé les membres de fes figures.
( io > P a r r »Asius d’E ph è fe , fils & difciplè
d’ Evenor , ohferva le-premieraÿ dit Pline , la
proportion dans la peintutei, renditla finelTe dpi
* Mmmm y