
phaël. On ignore le temps de fa naiffance 8c celui de fa mort.
(17) Martin. R o t a , né à Sebenigo en Dàl-
matie , floriflbic quelques, années plus tard. Il
a gravé en petit le jugement dernier de Michel
Ange, & cette ellampe. efl juftemenc regardée
comme un chef-d’oeuvre , foit que l’on
confidère. la fineffe des travaux , foit qu’on admire
le deflin du maître conl'ervé dans une
proportion fi différence de l’original. Les Petits-
iYIaîtres, il efl vrai , l’ont emporté lur lui par
la fubtilité des tailles, mais il n’ont pas eu
comme lui l’avantage de graver Miche-l-Ange
& de s’appuyer fur un grand maître pour aller
à la poftérité. Il a fait beaucoup d’eflampes
d’après les propres deflins.
(tS) La gravure ne connoiflbit encore que.
des travaux fins’.& ferrés , propres aux eltampes
de petite proportion , dorique Corneille Cort ,
né à Horn en Hollande en 1536, vint à Rome
& y ouvrit la carrière à la gravure en grand.
Il efl le premier qui ait employé des tailles
larges & nourries ; il a trouvé le premier un
bon grain de travaux pour les draperies & a
bien traité le payfage au burin. C’en: annoncer
qu’il manioit cet outil avec une grande facilité ;
de cette facilité devoit naître une plus grande variété
de travaux , 8c par conféquent de nouvelles
refîburces pour l’art, & de nouveaux progrès
vers la perfection. On n’avoit pas encore le fecret
de donner de la couleur à la gravure; il ne
fera trouvé dans toute fon étendue que par les
artifles qui travailleront fous les yeux & la
direction de Rubens ; mais Corneille Cort
femble avoir fait les premiers pas vers cettè
découverte dans fon eftampe du martyre des in-
nocens d’après le Tintoret. Il mourut à Rome en
I 5 7 S ■ ! ;! ■ - - •'> - (19) Chérubin Albert, né A. Borgo fàn Sé-
polcro en 1551 , & mort en iéij ,- n’a pas étendu
la carrière de la gravure ., mais, il mérite la
reconnoiffance des amateurs des arts pour avoir
çonfervé par fes eflampes les belles frifes que
Polydore de Caravage, digne : élfve de Raphaël
, avoir peintes fur des façades de maifons ,
& que ,1e temps a détruites.^ '. J :
(zo) Tous les, artifles dont nous ayons- parlé
iufqu’ici ont gravé au burin pur , ou du moins
fi quelques-uns d’eux , tels qu?Albert Durer, &
Lucas de Leyde , ont fait des eaux-fortes , elles
n’ont contribué que foiblemeiyt à leur renommée.
Mais A ntoine T ejvîbeste , peintre. -Florentin
, né en 1555', doit principalement à fes
paux-fortes l’étendue de fa réputation. ,Sdn
oeuvre en ce genre efl très-confidérable.;ce
font en général des chaffes, ou des marches
& des combats de cavalerie. La fcience &c la
fureté du trait, la vivacité de la tquche_, la char
leur & 1 a fécondité de la compofition , la. fon s
jugement rechercher par les peintres. Quoique
la manoeuvre en foit peu remarquable , les gra*
veurs pourront y trouver des leçons utiles pour
étab lir les premiers plans de leurs travaux lorf-
qu’ils auront des chevaux* à tra ite r. 11 y a
d’ailleurs quelques pièces de Tempe fie q u i ,
même à ne confidérer que l’efprit de la pointe,
méritent d’être accueillies par les amateurs de
la g rav u re. Cet arcifle efl mort à Rome en
163ci. I l a louvent gravé fur l’étain.
( z i ) Le d eflin de la g ravure en Ita lie efl de
fleurir bien plus par les travaux des étrangers .,
que par ceux des a rtifles nationaux. Jean &
Raphaël. Sa d e l e r , frè re s , tous d eu x , nés à
B ru x e lle s, le premier en 1550 , & le fécond
en 1555, fuccédèrent à la profeflîon de leu r
père , damafquineur en ac ie r ; mais leu r goût &
leurs dil’pofitions les appelloient à un a rt plus
n o b le , & ils fe livrèrent à la g ravure. Ils firen
t enfemble le voyage de l’Allemagne & de
l’Ita lie , & p e rd ire n t, dans cette patrie des a r t s ,
une certaine fécherefle q u i en tra it dans leu r
première manière. Ils furpafsèrent tous' les graveurs
qui les avoient précédés, 8c dans c e rta ines
parties , ils ne peuvent être fùrpaflçs par
leurs iuccefleurs. On recherche avec raifon leu r
nombreufe.fuite des hermites repréfentés d’après
les deflins de Martin de Vos dans des payfage^
agreftes & très-variés ; les morceaux qu’ils ont
gravés d’après le Baflan , entreront toujours
dans les porte-feuilles choifis ; on ne connoît
guère de g ravure plus aimable que celle de
Raphaël Sadeler d’après le C h rifl au tombeau
de Jean van Achen : on peut critiq u e r le peintre
, le graveur e fl fans reproche. Mais on efl
fu r-to u t étonné du fueeès avec le q u e l les Sa-
delér ont gravé le payfage au burin pur : le s
vieux troncs d’arbres y font exprimés avec la
facilité du p in c eau ; fl leur feuille ne peut
avoir l’agréable badinage de l’e au-forte , il en
a la légèreté ; les eaux tombantes en cafcades ,
les roches brifées & menaçantes , les fombres
enfoncemens des forêts ne fauroient ê tre mieux
rendus par aucun des procédés de l’a rt ; les
plantes qui o rn en t les devans de ces eflampes
o n t le p o rt, la forme 8c la fouplefle de la natu
re ; les fabriques vues dans l.e loin tain fo n t
traitées avec g o û t; on n’e fl tenté de reg retter
l’eau-forte que pour les terraffes.
Ces deux excelfens graveurs furent cepen?
dant furpaffés de leur vivant ; mais ce fut par
leur élève. & leur nèveu•, Giles S’adeler , né
à Anvers en 157© .,•■.& qui s’appliqua quelque-
temps à la peinture. I l gra^oitidu burin le phi$
fin quand le fujët paroiflbit l ’ exiger ; mais il a
grayé du burin le plus largg-Te'Chrifl au tombeau
de Barroche \ & .il a donné de la force à
fon eflampe fans pouffer au noir aucune partie*
On defireroit feulement plus d’ harmonie & d’ac-
nord dans quelques-uns de fes ouvrages. I l a
quelquefois la fierté du burin & la coupe hardie
Re Goltaîüs & de Muller. On .peut voir dans
î’eftampe où il a gravé le peintre Sprangers
& Catherine Muller , défunte, époufe de cet
artifte, à quel degré il a porté la gravure du
portrait. Il a, en quelque forte , créé & conduit
a la perfeétion cette branche importante de
l’art.
Jean Sadeler efl mort à Vénifé en 1600,
Raphaël dans la même ville en 1617 8c Giles
a Prague en 1629. L’oeuvre des deux oncles &
du neveu efl au moins de deux mille eflam-
Dans le même temps floriffoient Pierre de
J ode , le vieux0 8c les trois Galle , 'Philipp
e , Théodore & Corneille.y dit le vieux.
(za) Corneille burin .pur. Les roGchaelsl ef oan tg freavrmé eles payfage au de la légèreté , le feuille a , la couleur efl agréable 8c vraie,
.chaque objet porte fon cara&ère , & tout .le
travail efl large & moelleux.
(2,3) Enfin un grand peintre Italien ne dédaigna
pas de difputer aux artifles de l’Allemagne
& des Pays-Bas le prix de la gravure.
;C’étoit A u gu ftin Carrache dont nous avons
parlé à l’article Ecole. On exige aprefentplus
de fini qu’il n’èn mettoit dans fes eflampes ,
mais on n’exigera jamais des travaux plus fa-
vamment établis. Il fera toujours un excellent
-objet d’étude pour les graveurs, 8c ils gagneront
à le regarder an moins comme lé meilleur
modèle qu’ils paiffent fe propofer pour l’ébauche
de leurs travaux , 8c fur-tout pour celle des
chairs. 1.1 ne fe piquoit pas d’exciter l’étonnement
en faifant tracer a fon burin des chemins
longs 8c difficiles ; mais il manioit cet
outil avec aflëz d’adreffe pour l’obliger a fui-
Vre favamment le fens des mufcles, & il met-
toit autant de goût que de fcience dans fa manoeuvre.
Enfin , fes eflampes font d’excellentes
•études de gravure & de deflin , & plufieurs
même d’enti’elles ,, fans être terminées a la manière
moderne , feront toujours regardées par
le petit nombre des connoi'fleurs comme les
ouvrages d’un artifle qui connoilfoit le point
jufte où il.efl bon de s’arrêter. M.Kuber connoît
une épreuve du Saint-Jérôme qui femble prouver
qu’Auguflin gravait au premier coup. Les parties
qui fe trouvent fur cette épreuve font terminées
, les autres ne font encore indiquées
que par un trait léger.
(24) Annïbal Carrache , fon frère , ne peut
être compté au nombre des peintres dont les
eaux-fortes ont ce charme auquel les artifles
donnent le nom de goujlofe ,* mais fon trait efl
sûr, hardi, favant & arrêté. Ses travaux font
fermes 8c bien établis. Dans fon ellampe de la
chafle Süzanne, les travaux qui forment le
fein & le bras gauche de cette figure, méri-
teroient, non d’être copiés, mais fuivis comme
une belle indication, fi l’on voulo.it faire d’a-
w eaux-A rts. Tome I.
près, le même tableau , une eflampe plus finie
8c plus foignée. La tête 8c la barbe du v ie illard
qui e fl le plus près de Suzanne , offrent
auffi ^indication des travaux les plus convenables
; il feroit de même impoffible de mieux
exprimer les cheveux courts de l’ autre v ie illard.
E nfin, les eflampes d’Annibal, très-pré-
cieufes pour les peintres qui les regardent
comme de bons deflins d’ un grand maître,
mériteroient aufïï d’ être confultées par les gra*
veurs : ils y apprendroient à joindre ce que
l’art a de favant & de pittorefque à ce que la
partie de leur talent qu’on appelle le métier,
peut avoir de flatteur. Le G u id e , éleve d’Annibal
, a anfîi gravé à l’ eau-forte & d’ une manière
plus aimable.
(25) François V il l am e u e , n a tif d’Affife „
fu t élève d’À ûguflin Carrache pour la g rav u re.
Sa manière peu chargée de tr a v a il, & dans
la q u e lle le travail e fl même trop économifé ,
in d iq u e p lu tô t des deflins d’un effet trè s-d o u x
que. des tableaux colqrés. E lle e fl d’ailleurs
propre & ag réab le; mais on fent qu’il efl plus
facile de conferver la propreté des travaux
quand on en m e t fi peu. Quoiqu’il ne manquât
pas abfolument de facilité dans le b u rin ,
i l n’avoit pas encore to u te celle q u e ce g en re
femble e x ig e r , ce qui donne à fe3 travaux un
fentiment de maigreur..Son deflin e fl manière
fu r-to u t pour les extrémités , 8c malgré fa rép
utation , il femble ne pouvoir être Pobjet d’une
étude fort u tile ni pour les peintres ni pour
les graveurs. Il e fl mort à Rome en 1 6 2 6 , &
y étoit venu vers 1585.
Les arts qui commencent à fleurir confervent
encore de la timidité : s’il s’élève alors q u e lques
artifles q u i combattent ce tte timidité par
un excès d’audace , ils préparent 'dé nouveaux
progrès en infpirant à leurs émules un ju fle
degré de hardiefle. On ne peut tro u v e r le m ilieu
fans connoître les deux extrêmes. Michel-
Ange en o u tra n t les fermes & les mouvemens,
apprit aux peintres 8c aux fculptetrrs q u e l é to it
le point où ils dévoient ten d re , & où il fa llo k
s’arrêter : Goltzius , 8c fea élèves p lu s audacieux
que lu i , n’o n t p eu t-être pas été moins utiles
aux graveurs.
(26) Henri G oltz , que nous appelions Golt
z iu s naquit à Muifcrrecht, dans le Duché de
Juliers en 1558, & e fl mort à Harlem en 16 17 .
I l étoit fils d’ un peintre fur verre qui fut fon
maître pour le deffm, & il reçut plutôt des
confeils que des leçons de gravure d’ un nommé
Coornhert qui doit aux talens de fon élève
toute fa célébrité. I l voyagea en Allemagne &
en Italie , & il étudia Raphaël & l’ antique ,
fans perdre une manière barbare que les A lle mands
s’étoient faite en croyant imiter Michel-
Ange. Savant dans le deflin , il détruifit par fon
! goût vicieux l’eflime que mériteroit fa fcience :