
goût de Cal loi , dont on croit qu’il étoit élève.
Charles-Nicolas cultiva la peinture jufqu’à Page
de vingt-deux ans. Il étoit bon deflinateur, 8c gravoit avec beaucoup d’efprit & de goût -, fur-
tout quand les figures de (es eftampes étoient ■"
d’une grandeur médiocre. Ii n’a pas eu le même
fuccès dans le grand , parce qu’il confervoit le
même genre de travaux en leur donnant plus
de largeur, 8c qu’ils n’avoient pas alors affez
de repos & de fermeté.
( 12$ ) Simon-HenriThomassjn , né à Taris
en 1688 , mort en 1 7 4 1 , étoit fils de Simon
Thomaffin, bon graveur, qu’ilfurpaflà. Il avoit
une manière libre & pittorefque ; on en peut
voir un bel exemple dans fon e(lampe du M agnificat
d’après Jouvenet. Son portrait de Thierry
, fculpteur , d’après Largilliere , ouvrage ef-
timé des artiftes, fuffiroit pour prouver, fi cela
avoit befoin de preuve , qu’on peut, avec fuccès
, avancer des portraits à l’eau-forte. On
connoît fon bufte du Cardinal de Fleury,
foutenu par Diogène , qui a enfin trouvé un
homme. Le tableau eft de Rigaud.
' (126) Anne-Claude-?hilippe de Tüeieres,
Comte de Caylüs, né à Paris en 169a, mort
en 17^5, a beaucoup gravé à l’eau-forte avec x
plus de zèle que de talent. Ses eaux- fortes
d’après Bouchardon ont été retouchées par le
graveur Etienne Feffard ou par fes élèves, fans
que les travaux réunis de l’amateur & de ces
artiftes en aient fait de bonnes eftampes. Elles
méritent cependant d’être recueillies, parce que
toutes les beautés des deffins d’après lefquels
elles ont été faites n’ont pu être détruites.
M. de Caylus a rendu plus de ferviee aux arts
en confervant, par fa gravure, des traits & des
croquis de -quelques anciens maîtres.
(127 ) Jacques Chéreau , né à Blois en
1694, mort à Paris en 1759., étoit frère de
François. . l i a gravé de fort beaux portraits,
entr’autres -celui de Jean Soanem, Evêque de
Sénez,. d’après Raoux. Son David d’après le
Feti , fuffiroit pour affûter fa. réputation. Il ne
manque à fa célébrité que d’avoir fait un plus
grand nombre d’ouvrages:, mais il quitta de
bonne heure les arts pour le commerce.
(.128) Fre'dsric Hqrtemels , mérite d’être-
diftîngué par le moèlleux qu’il a fu donner à
quelques-uns de fes ouvrages. Cette partie de
l’art eft importante, & commence à etre trop
peu .connue. La timidité, l’amour d’une ex-
ceflive propreté feront toujours ennemis du
moëlleux dans la gravure. Le graveur ne peut
y parvenir qu’en donnant de la largeur à .fes
travaux, fans-craindre de les gâter en les nour-
jâffant, comme le peintre , ne fera jamais moëL
leux dans fon art, s’il craint de charger fa
broffe de couleur. On peut reprocher à Hortemels
d’avoir trop faK ufage des gros points ronds
dan3 les shairs. jt/arie - Madeleine , fa fille,
époufe de Ch.-Nie. Cocliin père, doit être
comprife entre les bons graveurs.
( 129) N icolas D upuis , né vers 159$ , &
mort en 1770 , grava d’abord, ainfi que Du-
change fon maître, & Charles Dupuis fon frère,
à l’eau-forte & au burin. Croyant enfuite que
fes yeux étoient.bleffes par l’éclat du cuivre
fous le vernis, & que la vapeur de l’eau-forte
nuifoit à fafanté, il fe mit à graver au burin
pur , 8c conferva dans ce genre la liberté de
l’eau - forte. C’eft ainfi qu’il a gravé Enée &
Anchife, très - bonne enampe d’après Carie
Vanloo, 11 aimoit à annoncer fortement les
plans, & modeloit en quelque forte les travaux
de fes planches.
( 13 01 Pierre D r ev e t fils, né à Paris en
1697 , mort en la même ville en 1739. On a
de lui une eftampe qu’il a gravée à l’âge de
treize-ans, & qui, dans bien des parties, peut
faire le défefpoir des graveurs confommés. On
peut, fans doute, graver plus fierement, plus
librement que lui-, on peut, même dans le
portrait, introduire des travaux -plus pittoref-
ques , &fe diftinguer par une touche plus hardie
; mais peut-être ne fera-t-il jamais furpaffé
- dans la gravure finie & précieufe. Il eft im-
'pofiible de revoir fans étonnement fon fameux
portrait de Boffuet qu’il fit à l’âge de vingt-
fix ans. On voit , dans ce(te eftampe , des cheveux
blancs, des. chairs, de l’hermine., du
linon , des dentelles / de la moëre , du velours,
des franges d’or , du bois travaillé par l’arc des-
ébéniftes, des bronzes, du marbre, du papier
, &c . -, chacun de ces objets eft gravé d’un
ca/aâère different, & ce cara&ère èftcelui qui
lui eft propre. Les curieux ne recherchent pas
moins fon portrait de Samuel Bernard. Il fallcit
; que cet artifte, pour traiter avec tant de perfection
tout ce qui peut-être l’objet delà gravure,
eût une grande pratique du burin -, mais nulle
part il n’affe&e de montrer fon habileté à manier
cet inftrument. Il favoit que cette habileté
eft un moyen de parvenir à la perfe&ion de
l’art, mais qu’elle n’en eft pas le but. Des
graveurs ont.ièmblé, dans la fuite , n.tg manier-
le burin que pour faire voir qu’ils lavoient le
manier, & autant auroitril valu qu’ils euffent
gravé des traits capricieux que des tableaux.
( 131 -) Jacques Houbracken , né à Dor-r
drécht en 1698 , mort dans un âge très-avancé,
graveur au burin , qui ne le cédoit pas à Drever
par la fineffe des travaux dans les têtes , 8c qui
l’emportoit par la hardieffe de la touche#: la-fierté
delà couleur. Avec une étonnante habileté dans
le maniement du burin , il fe plaifoit foiivent à
oppofer aux travaux des chairs , des travaux
bruts qui produifent l’effet le plus pittorefque.
On en peut voir un exemple dans fon beau portrait
de Thomas-Morus , d’après Holben. Il eft
malheureux qu’il fe foit quelquefois permis de
ncelîeer les accefloïres, & même de faire des
ouvrages entièrement médiocres : mais on n a
peut-être rien qu’on piaffe oppofer a fes beaux
morceaux. Il a beaucoup travaille a.la colleftion
des portraits des hommes iüujlres de la Grande-
Bretagne , dont le premier volume o. paru a
Londres en 1743 > & le fecond géneraIenient
inférieur eil 1752. .
( 13-2) Laurent Cars , mort a Paris vers
1766, l’un des meilleurs graveurs du dix-hui-
tième fiècle. Il mit dans fes ouvrages un goût
qui n’étoit par celui des graveurs du fiecle precedent
, qui peut-être ne lui doit pas être préféré,
qui même n’auroit pas convenu aux tableaux
que ces graveurs dévoient rendre , mais
qui fut infpiré a Cars par les gravures de le
Moine. Les tableaux des grands maîtres d Italie,
ceux de le Sueur , de le Brun , de M ignaid ,
avoient dans le faire une forte daufterité qui
auroit été mal exprimée par l ’aimable molleffe
que Cars introduifit jufques dans les maffes
d’ombre. Dans Gérard'Audran je ragoût domine
dans les parties de demi-teintes ; & dans
Cars, c’ eft dans les parties ombrées. Ses chefs-
d’oeuvre font les morceaux qu’ il a gravés d’ après
le Moyne , 8c fur - tout l’ ellampe d’Hercule filant
auprès d’Omphale. # On peut remarquer que depuis la mort des
artiftes qui contribuèrent à la fplendeur du
règne de Louis XIV , peu de graveurs ont rempli
les •efpéraiî'ces qu’avoient données leurs J)re-
iniers ouvrages. C’eft que l’amour du beau s’eft
perdu; c’eft que du temps de Louis XIV 1 a-
mour du prince pour le grand dirigeoit le goût
de la nation ; c’eli qu’alors on aimoit les oti'-
vrages des grands maîtres , 8c qu’on fe plaifoit
à les voir fe reproduire par la gravure. -Mais
dans le fiècle fuivant, on n’eut de goût que
fuivant la mode , on ne re.çhercha que les ouvrages
à la mode, & la modè eut toute 1 in-
conftance qui forme fon caraétere. Il en réfulta
<jue les graveurs furent obliges de fe prêter aü
caprice général pour fubfifter , 8c que plufieurs
d’entr’eux qui fe feroient diftingues par leurs
talens , fi les'circonftances les euffent fécondés
n’eurent pas même dans toute leur vie l’occa-
fion de faire un ouvrage capable de développer
leurs difpofitions. Sans parler de modes
plus fubalternes , on a vu naître 8c mourir celle
des mafearades de Watteau, celle des jeux d’en-
fans de Chardin, celle des paftoraîes de Boucher
, celle des yties.& des marines', &c. Que
obligé de graver des eftampes auxquelles il ne
mettoit fon nom qu’en rougifianr.
( 133 ) Pierre Subleyras , né à Uzès en 1690,
mort à Rome en 1749, eft^ du nombre' des
peintres qui ont manié la pointe avec le plus
d’efprii & de goût. Ses travaux font d’un excellent
pendant la durée de ces modes qui fe font fuc—
cédées fans interruption , un graveur eût pu-
hlié une eftampe d’après Raphaël, le Pouflin ,
le Dominiquin , le Carràche., &c. il n’eût pas
trouvé d’acheteurs. Les amateurs feuls peuvent
nourrir les arts , & (buvent leurs caprices les
tuent. Cars lui-même n’a rien gravé d’important
après fa jeunefle, 8c j’ai vu Nicolas Dupuis
choix, fans qu’il paroiffe s’être.occupe de
les choifiri II n’eft pas néceflaire de citer
d’autres preuves de fon talent en ce genre ,
que fon eau-forte du repas chez le Pharifien.
(134 Thomas W o r lid g e * né à Péterboroug
en 1700, mort à Hamershmirh en 1766, étoit
peintre & s’eft occupé de k gravure. Il a cher-^
ché le procédé'de Rembrandt, celui du moins
par lequel ce peintre c'achoit fes travaux-, 8c parvenoit à l’effet fans laiffer voir la marche
de fes tailles. Worlidge a trouvé ce procédé ; .
mais non l’efprit, le fentiment, l’art pittorefque
avec lefquels Rembrant en faifoit ufagé.
(13$) G. Wagner a gravé à Venife. Ses eftampes font remarquables par le grain flatteur
que forment fes tailles croifées en lozange. Sa
manière belle , large moëlleufe & facile, qu’il
paroît avoir imitée de Frey , a été perfeftionnée
par le célèbre M. Bartolozzi. Quoique Wagner
ait gravé plufieurs fois d’après de grands colo-
riftes, & entr’autres d’après Paul Véronèfe ;
je ne me fouviens pas d’avoir vu aucune de fes
eftampes qui fe diftingue par une couleur vi-
goureufe.
(136 ) François V iv a r è s , graveur fran-
~çôis établi à Londres, a très-bien traité le pày-
fage. On dit qu’il avoit commencé par être
tailleur d’habits, qu’il confacroit tous les loi-
| (1rs que lui laiffoit fa profeffion à defiiner le
payfage d’après nature ou d’après des eftampes,
8c qu’il fe livra fort tard à la gravure. On peut
dire que, dans fon .genre, il a furpaffé en gé- .
néral ceux qui l’avoient précédé.
(137) Jean Daullè , né à Abbeville en
1703 , 8c mort à Paris en 17^3 * ^on Pfemier
ouvrage eft d’après Mignard, & repréfente la
Comteffe de Feuquieres-, fille de ce peintre,
dont elle tient le portrait d’une main. Si Daullé
avoit fait encore des progrès, peu de graveurs
au burin auroient mérité de lui être préférés ;
il auroit eu même peu de concurrens s’il avoit
pu du moins fe foutenir : mais quoiqu’il n’ait
rien fait dans la fuite qu’on puiffe comparera
ce morceau , il doit être regardé comme un ar-
tifte fort eftimable. Dans un fiècle plus heureux
pour les arts , il fe feroit renfermé dans
le genre qui lui convenoit ;la néceffiré de Vivre
de" fon talent l’a obligé à cultiver les genres
auxquels il étoit le moins deftiné par la nature
, ou, ce qui revient au même, par les premières
impreffîom qu’il avoit reçues en entrant
dans la carrière des Vires.
(138 ) Jean-Marc P it t e r i , né à Venife en
1703 , mort dans la même ville en 1767,: a choifi