
teintes ou de paflsges, mais l’ effet en doit être
regardé de loin.
Tout yo.Jjh.ge ou liaifon entre deux couleurs
qui femblèroient dures , fi elles fe touchoient,
a donc le droit d’ être nommé demi teinte, parce
qu’ il en produit, l’ effet.
On peut fentir combien, fi l’on hafardoit,
ne connoiflant que.Superficiellement les arts,
de rapprocher les demi-tons de la mufique des
demi-teintes de la peinture , combien , d i s - je ,
les idées qu’ on donneroit feroient peu exa&es*
Je ne puis me refufer d’obferver j autant que
j ’ en trouve l’occafion, qu’ il n’ eft que trop
commun aujourd’ hui d’employer ces rappro-
chemens, non-feulemént des différens arts en-
tr’eux., mais des idées mprales & politiques
avec: les expreflions 8c les idées, des I fciences
plus difficiles encore à appliquer avec juftefle*
parce qu’ il faut plus d’étude pour s’ inftruire de
la plupart des fciences, que. pour avoir quelques
connoiflances raisonnables des arts.
Pour revenir au terme qui fait le fujet de
cet article/, plus un ouvrage de peinture eft
foigné, ou plus il eft deftiné à être vu de près,
& plus le mot demi - teinte fe rapproche de fa
lignification littérale , car les dégradations
étant multipliées' d’ une, manière beaucoup plus
approchante de .celle qu’ offre la nature, chaque
couleur change de nuance , en faifant avec fes
voifines des partages & des mélanges graduels,
par l ’ effet des plans 8c du plus ou moins
d’éloignement de la lumière-
Mais, • pour. fe. former. une idée précité de
ces effets , obfervez avec attention , & s’ il fe
peut, en compagnie d’ un peintre , un corps
coloré qui foit rond-, la lumière , en éclairant
les points fur lefquels fon incidencefeva. plus
direé te , donnera à la, couleur de ce corps toute
la valeur dont e lle eft fufceptiblé -, e.nfuite
cette lumière gliflant fur les plans voifins, par
une incidence oblique , fera paroître la couleur
d’ une autre nuance : plus loin cette nuance
fera teintée & à demi altérée par là privation
plus fenfible d’une-partie de, la lumière. Alors
cette modification annoncera l’ ombte 'q u i la
fu it , & après l’ombre', le corps ; rond qui , •' en
courbant toujours fa furface y e ft enfin près
d’échapper à la vue., recevra les rejailliflèînens
dés couleurs & des lumiètes voifinas , kdonc
l ’ effet fera une autre forte, de demi- teinté^
qu’on appelle reflet.
Voilà l’ordre général dans' lequel fe préférite
nt à la vu ! les couleurs , les nuancés , les
teintes y les u em i- t e in t e s les i ombres ’8z lès
■ reflets dans tous, les objets dont les iiirfâces
me font .[as :abfolument planes.' Mais-on conçoit
que cet ordre, d’autant^plus -ex a i t -, que
îe corp s eft parfaitement ro n d , e ff auffi con-
tinuellement v a r ié , modifié, interrompit dans
les corps dont les furfaces fe .trouvent- irrégû-
Itères par leurs formes & par leurs plans. On
conçoit encore , fi l’on garde quelque fouvenir
de l’article c lair-o bfcur, que les moyens qui
lui font propres & ceux qu’offrent les demi-
teintes ont entr’ eux un très-grand rapport,
Aufli ne parvient - on pas à l’harmonie , fans
avoir une connoiflance approfondie de l’emploi
qu’il faut fa ire , 8c des demi-teintes y 8c
de la magie du clair-obfcur. Des explications-
que je viens de donner , réfui te cet important
précepte pour les jeunes, élèves.
« Obfervez la nature toujours avec une in-
» tention particulièrement relative à quel-
» qu’une des parties conftitutiônnelles de votre
» a r t , & n.^peliez bien alors à votre idée tout
» ce qui appartient à la partie qui vous oc-
» cupe. Si c’ eft - l ’harmonie , forcez votre at-
» tendon" à embrafler enfemble l’effet des demi-
» teintes , des reflets , du clair-obfcur général
>3 d’ une maffe d’objets , & de. ces mêmes pvar-
» ties fubordonnées dans chacun des objets
» particuliers qui forment la maffe. ( Article
» de M . JP^a t e l e t . ) -
D E S S IN , ( fubft. mafe. ) Le mot deffin ,.
regardé comme terme dé l’art de peinture
fait entendre deux chofes : il fignifie en premier
lieu la 'produ&ion qu’ un artifte met au
jouir avec le fecours du crayon de quelqu’e f-
pèce. qu’il fo it, ou de la plume.
Dans une fignification plus étendue , il veut
dire en général l’ art d’imiter , par des traits ,
les formés , & fur-tout lés ‘contours que les
objets préfentent à nos yeux.
C’ eft dans ce dernier féns qu’on employer
le mot deffin, lorfqu’on dit que le deffin eft
une des parties principales de la peinture , ou
plutôt que l’art de la peinture ne peut avoir
lieu fans l’ art du deffin.
I l s’èft élevé dans plufieurs tems des dif-
putes aflez vives , dans lefquell es il s’agifloit
de fixer lequel eft plus effenriel à la peinture ,
du deffin ou du coloris. On fendra facilement
qué ceux qui étoient plus fenfibles au charme:
de la coi.leur , qu’à celui du deffin y ou qui
étoient amis ou difciples d’un peintre-colorifle
dos noient la préférence à cette partie brillante
de l’ art de peindre, tandis que ceux qui
étoient affrétés diverfement, Ou dans des cir-
cônftaîices differentes, foutenoient le parti contraire^
Quë pouvoir-il arriver dé ces combats d’opinions
mai fondées? Ce qui refaite fi fréquemment
dés .difcùffibhsqu’élèvè la'partialité ou la,
fubtilité de l’ èfprit, abus de cette faculté qui
fujette à fe tromper 8c à tromper, fert rarement
au progrès'dès arts , & à l’utilité'générale.
'Pour- revenir- à la difpirtèrdpnt il s’a g it , 8c
pour là. réduire à fa juftè valeur , ii fufht d’ en-
yifager que -l’imitation dé la nature vifible quî
e ft le but dé la peinturé , unit iridiflolnblci.
ment l’imitation des formes des objets .& l ’imitation
de leur couleur. Vouloir décider d’ une
manière abftraite quelle eft de ces deux parties
la plus èflentielle à l ’art, eft la même .choie
que de vouloir décider fi c’ eft: l’ame ou le^corps t
de l’homme qui. e f t - le plus elicntiel a fon
exiftence. f !
Pour parvenir à bien deflineyr , il faut avoir
de la jufteffe dans les organes qu’on employé
& les former par l’ exercice & l’ habitude,
c’ eft-à-dire, en deflinant très-fréquemment.^
C’ eft par le deffin qu’on commence à s initier
dans les myftères de la peinturé . & ceux qui
s’ y deftinént, ou qu’on y dévoue, commencent
& doivent commencer a deffinêr des leur
première j eunefle > parce qu’ alors' la main docile
acquiert plus aifément la foiiplefle & les
différens mouvemens qu’ exige ce genre-de trav
a il. L’üfage a établi une méthode dé procédés
que je dois expofer.
Les premiers'eflais fe bornent à tracer des
lignés parallèles en tout fens avec un crayon ,
q-ui ., lé plus, ordinairement 9 eft. un morceau
de fanguine , c’ eft-à-dire , d’une pierre roüge ,
aflez tendre pour ' être taillee en pointe, &
qu’ on ènchaffe dans un porte - crayon. Ce
p o r te -c ra y o n , long d’ environ un demi-pied.,
eft un tuyau ou tube- de cuiv re , a-peu-pres
gros comme une forte plume. I l eft fendu par
les deux bouts de la longueur d’ un pouce &
d em i, pour qu’ il pùifle plus aifément recevoir
en s’accroiflant, autant qu’ il eft befoin, le.
crayon''qu’on y insère. Lorfqu oh a inferq le
crayon dans le. tube, ou porte-crayon , on l y
arrête au moyen d’ un anneau qui , à cha.que
bout, gliflant le long du porte-crayon , vient
ferrer les parties fendues qui embraflent le’
crayon. .
Lorfqu e le porte-crayon eft armé du morceau
de fanguine ? ou de quel qu’ autre matière propre
à tracer, on aiguife une d.ernière fois avec un
canif le crayon qu’on eft prêt à mettre en
ufage : après quoi l’ on pofe dans fes -doigts le
porte-crayon comme on tient une plume, a
cela près que les doigts qui tiennent le porte-
crayon font placés vers le m ilieu de fa longueur,
au lieu que pour écrire on tient la plume vers
fon extrémité taillée. Une autre différence,
c ’ eft qu’ on tienr la plume avec les trois premiers
doigts étendus, & que pour defliner on
tient le porte-crayon de deux doigts feulement
& que lé doigt du milieu fait une courbure
pour le foutënir.
I l faut obferver encore que les traits qu’on
fe propofe de former étant aflez ordinairement
de plus grande dimenfion que les lettres, on
ne doit pas fe borner à ce que peut donrief
d’étendue au crayon le développement des jointures
des doigts , en fuppofant le poignet arrêté t
mais qu’i l faut-que le poignet, rdéVehu lu i-
même Lonple & mobile , glifle fur lé papier ,
& parcoure , en fe portant de côté 8c d’aàtée
fans roideur, l’ étendue des traits qu’on fe propofe
de former. Cette manière de fe fervir du
porte-crayon,eft d’autant plus eflentielle,que l’on
doit avoir grand foin de commencer par copier
des deffins, dont la giandeur des contours 8c.
des hachûres développent la main.
Les premiers deffins qu’ on fait imiter au jeune
élève font ôrdinairemèht ôii doivent ê tre , autant
qu’il eft poffible , ceux qu’un habile maître
a faits lui-même d’ après nature , foit pour fon
étude , foit avec le but de les faire fervir de
modèles à ceux qu’ il inftrûit.
On doit faire defliner chaque partie du corps
au jeune deflinàtètir pendant lông-tems , avant
de lui permettre de aefiinerunë figure'entière.
I l faut le plier à deffiher ces partiel dans de
grandes dimenfions , & tout au moins dé grandeur
naturelle y premièrement, pour qu’ il en
connoifle mieux les formes & les détails , fe -
condement, pour l ’habituer à imiter la nature
telle qu’on la voit.
Après avoir long-tems defliné plufieurs parties,
telles que des në z, dés yeux , dés oreilles ,
des bouehéà , fous tous les âfpeéls dont ces parties
font fufceptiblès, ori fait defliner à l’élève
une tête entière, 8c cette étude qui réunit
dans' un enfemble lés parties" fur lefquelîes
l’élève s’ eft déjà exercé i, doit faire fon occupation
journalière & habituelle , jufqn’à ce
qu’enfin il parvienne à copier facilement 8c
jufte tous les deffins de ce genre qu’on lui
donne pour modèles. C’ eft pendant qu’ il eft occupé
de cette étude que je fouhaiterois qu’il
pût lire une forte dç cathéchifme court, bien
( c lair , qui lui donnât dés idées fimples & juftes
de ce qu’ il entreprend, c’ eft-à-dire de ce
qu’eft lé r e lie f ; de l ’exiftence néteflaîre des
ombres y lorfque le r e lie f eft: éclairé ; de la relation
qu’ont les hachures avec ces ombres, &
que les traits ont avec la forme ou figure dès
objets ; de la relation enfin qu’ a la touche aveb
lés accidens du trait q u i, félon fes courbures
ou directions , eft tantôt écîairé , tantôt dans
l’ ombre & plus ou moins, fuivant fa pofitiôn,
relativement à la lumière.
I l faudroit joindre à ces moyens d’ inftraction
> celui de faire copier à l’élève le deffin
anatomiquè de la tête qu’ il imite, dans la meme
proportion que cette tête, pour que le. dejfina-
teur s’habituât , comme machinalement * à ne
pas defliner l’ extérieur fans avoir prifenre l’ idée
de ce qui fe trouve fous la première furface.
Ce font les os qui décident en grande partie
8c tout au moins d’ une manière précife , les
•formes extérieures. Lorfqu’on connoît bien la
'ffrii&ûre des o s , leurs plans, leurs charnières,
la manière dont ils fe meuvent, on eft bien
A a ij