
jufqu’à cet enfoncement .qui borne la v u e , il
faut que le fpe&ateur.püiffe croire qu’ ilto u r -
neroit autour des objets qui font .reprél entés. On
ne peut d’ailleurs rien .établir fen général fur
V.enfancement que doit offrir un tableau. Quelquefois
Son enfoncement n’ a d’autres bornes
que celles de î’horifon, & quelquefois il eft
limité par le mur d’ une chambre peu profonde.
Ï 1 y a même des tableaux qui représentent dès
bas-reliefs, & l’on né dira pas qu’ ils ont de
Venfoncement ; mais ils doivent avoir une faillie
apparente, égale à celle qu’un fculpteur donne-
roit à ces fortes d’ouvrages. ( L . )
EN FUM É , noircipar la fumée & par lé temps.
On dit d’ un vieux tableau dont on ne distingue
plus le travail n i 1 les: objets , & que le tems
a couvert d’ainefaleténoiré 8c épaifle, qu’il eft
enfumé. On trouve des amateurs qui n’eftiment
les tableaux qu’ autant qu’ une forte couche de
fumée leur donne un extérieur vénérable d’antiquité.
Si le temps a refpeété une partie lumineiifo
qui tranche fortement avec la profonde obscurité
de tout le re fte ,' ils fuppofent dans ce
qu’on ne voit plus tout le charme (Puhe beauté
myftérieufe, &admirentd’autantplüScesténèferès
cp/elles font plus épaiffes. Ils ne manquent jamais
d’ être Servis Suivant leur gôût, & trouvent toujours
des charlatans prêts a leur offrir & à leur
vendre fort cher des tableaux récefls qu’ ils ont
eu foin _d3enfumer'. On enfume aufti des éeffins
nouvellement copiés 9 ou faits par des artiftes
vivans & ’quelquefois par des élèves , pour leur
donner l’apparence d’anciens originaux'. Comme
on connoît toujours l’ âge dés - eftampes, on a
foin au contraire de les laver oh'de bien nettoyer
la fumée dont elles peuvent être couvertes,
pour leur donner l’ apparence d’ une belle
conservation. On ne prend cette peine que pour
les amateurs , car les àrtiftes au contraire aiment
affez que les eftampes Soient légèrement enfumées,
c’ eft-4 -d ire , qü’ éllës ayent cojmraftéurie demi-
teinte roufsâtre, oart&qùe ce ton détruit l’oppo-
fition tranchante du noir de la gravure avec
la blancheur du papier ( L . )
ENG EN CEM ENT ( fubft. mafc. ) Ce dit
des draperies ou autres ajuftemens -, il lignifie
alors diSpofition. Des plis bien engencés font
des plis bien difpoles. I l Se dit aufïi d’ un affem-
blage d’objets qui Se trouvent rarement réunis
& dont fa composition eft à la fois Singulière
& piquante : ces chofes Sont Singulièrement,
font pittorefquement engenpées.
ENLUMINURE. ( fubft. fem. ) G;eft une
forte de peinture faite fur des eftampes avec des
couleurs délayées à la gomme. Il y a aufii des
papiers-tapifferies qui Sont enluminés, c’eft-à-
d ire , dont la planche n’a fourni que le trait,
St • donc lés couleurs ent été placés au pinceau.
On enlumine grofiièrement de «es mauvaifes
eftampes qu’on appelle images, pour l’ ufâge' du
peuple qui eft tou jours a peu près Sauvage, même'
chez les nations le? plus policées, & dont la
viie eft plus agréablement récréée par le fpe&acle
des couleurs dures & tranchantes, qu’ elle ne le
feroit par les tableaux les mieux fondus des
plus grands coloriftes. Pour rendre ces images
encore plus agréables à ceux à qui elles font
deftinéés’, on relève quelquefois en or lès" auréoles
des Saints & quelques parties des draperies.»
On applique aufïi de l’or & de l’argent moulu
à des enleminures plus_précieufes-, c?eft ce qu’on
appelle rehaujjèr. Pour donner à ces métaux tout
leur:éclat, on les brunit avec la dent de loup.
On enlumine plus ou moins de foin des
eftampes représentant des vu es, des intérieurs
de temples, &c . qu’on deftine à être regardées-
dans des machines d’optique'.
Quelquefois’, des curieux Sans goût ortt pris*
plaifir à faire enlumines de belles eftampes,
croyant qu’ elles aequerroient- un nouveau
p rix , & qu’elles approcheroient du mérite des
tableaux, quand elles Se roient barbouillées de
couleurs. Tout le fruit dé leur dépenfe étoit de
faire détruire le travail heureux du graveur par"
le travail routinier des enlumineufes.
Cependant, l’ enluminure faite avec- foin 8è
intelligence n’ eft pas toujours méprifable. Elle
eft fort utile à l’hiftoire naturelle. Des planches
d’oifeaux, de plantes, -de coquilles, inftruifent
fort imparfaitement, ficelles ne font pas accompagnées
des couleurs propres à l’ objet. Enfin-
1 'enluminure eft utile toutes les fois qu’on doit
montrer l ’objet colorié. Le graveur doit alors
renoncer à ^ambition de plaire, & confentir'
à voir les travaux de Son art couverts par le travail
des enlumineurs.
Il y a des enluminures, d’bifeaux, de coquilles,'
&rc , faites avec tant de Soin & tant d’art qu’on
peut les prendre au premier coup d’oeil pour des
miniatures ou des; peinturés à gouazze. I l eft
bon alors que les travaux de la gravure nef
Soient pas trop fortement prononcés , 8c que le'
joh de l’eftampe Soit fort doux.
Une enluminure commune peut; quelquefois
remplir Suffisamment Son objet, comme lorsqu’ il
s’âgit de faire connoître les couleurs des
uniformes de troupes, ou celles des pavillons'
& des flammes de vaiffeaux, & c . ( Article de
M. L epes-qur. )
ENNEMI ( a d j .) Se-dit des couleurs. On
appelle couleurs ennemies celles qui s’ accordent
ma l, 8c qui ne peuvent fubftfter en Semble Sans
effenfer la vue ou Sans ^e, détruire ën très-peu
dé temps. Le bleu ,&• le vermillon Sont dès
couleurs ennemies leur mélange produit- une
couleur a ig r e , dure & défagréabie.
Les habiles peintres fe font quelquefois jtîi jeu
de vaincre les difficultés qu’on prétend résulter
de l’affociation des couleurs ennemies| ; ce qui
■ feroit .Chez les ignorans une témérité qui ne
produiroitquedes effets mauffades, devient chez
le s habiles une hardieffe louable qui n’enfante
que des prodiges. ( Article de ïancienne E n cyclopédie.
)
E N S E M B L E . Voici un mot dont la
Signification , vague en apparence , renferme
une multitude de loix particulières impofées aux
a rtiftes, premièrement par la nature , ou , çe
qui revient au même, par la vérité ; 8c enfuite
par le raisonnement, qui doit être l ’ interprête
<ie la nature & de la vérité. -
Venfemble eft l’union des parties d’ un tout.
Venfemble de l’ univers eft cette chaîne
prefqii’entièremettt cachée à nos yeu-x, de laquelle
réfulte T’ exiftence harmonieuse de tout
ce dont nos Sens jouiffent.
Venfemble.d’ un-tableau eft l’union de toutes
les parties de l’art d’imiter les objets ; enchaînement
connu des artîftes;:créateurs , qui lé font
Servir de bafe à leurs produirons ; tiffu mystérieux
, invisible à la plupart des fpe&ateurs,
deftinés à jouir feulement des beautés qui en
résultent.
Venfemble de la composition dans un tableau
hiftoire eft de deux eipèces , comme la composition
elle-même, 8c pe;ut fe divifer par conséquent
eh enfémble pittorefque 8c en enfemble
poétique.
Les a ieu rs d’ une Scène hiftoriquë-peuvent
fans doute être fixés dans les ouvrages des
auteurs qui nous l’-oht tranfmife. La forme du lieu
où elle fè paSTe peut aufïi Se trouver très-exaétë-
ment déterminée par leur récit ; mais il n’ en
reftçra pas moins au choix de l’artiftë un
nombre infini de combinaisons que peuvent
éprouver entr’eux les perSonnages effehciels &
les objets décrits. C’ eft au peintre à créer cet
enfemble pittorefque, & je crois qu’on doit
moins craindre de voir s’ ëpuifer la variété dans
les compositions , que le talent d’ embraffer
toutes les combinaisons qui peuvent la produire.
Celle des combinaisons poSïibles à laquelle
on s’ arrête, éft donc dans tin tableau Son enfemble
pittorefque. I le ftp h is ou moins .parfait,
Selon-que l’on a plus ou moins réuffi à rendre
les grouppes vraiSemblables, les attitudes juftes,
les fonds agréables, les draperies naturelles ,
lès acceffoires bien çhoifis oc bien diSpoSés.
■ Venfemble poétique exige à Son tour cet intérêt
général, mais nuancé , qiie doivent prendre
à un événement tous ceux qui y participent.
L’efprit, l’ame dès Spedateurs veulent être Satisfaits,
ainfi que leurs yeux. Ils veulent que
les Sèntimçns dontl’ artifte a prétendu leur cranl1
mettre l’ idce aient, dans les figures qu’ il repror-
fente , une liaifon , uné conformité, une dépendance
, enfin un enfemble qui exifte dans la
nature. C ar , dans un événement qui occafionne
un contours de perfonnes de difterens âg es, de
différentes conditions, de différens Sexes, le
Sentiment qui réfulte du fpedacle préfent,
Semblable à un fluide qui tourbillonne , perd
de l’on adion en s’éloignant de Son centre : mitre
cela , il emprunte Ses apparences differentes de
la fo rc e , de la foibleffe, de la fenfibilité, de
l’éducation, qui font comme différens milieux
pâf lefquels il circule.
Dans cette multitude d’ obligations qu’ impo-
fent les loix de ŸeiiferiiMé, on juge bien que
la couleur revendique Ses droits.
'S o n union, fon accord, Sa dégradation in-
fenfible, forment fon enfemble : le clair-obfcur'
compofe le Sien des grouppes de lumière 8c
d’ombre, & de l’ enchaînement de Ses ma fies ^
mais ce Sujet mérite bien que l’on confulte les
articles qui Sont plus particulièrement deftinés
à les approfondir * ainfi je renverrai entr’autres,
pour l’ explication plus; étendue de ce genre
d,ëiifemblë, au mot Harmonie , qui l’ exprimé.
La couleur a des tons, des proportions, de?
intervall es-, il n’eSl donc pas étonnant que la peinture
emprunte de la mufique le mot harmonie,
qui exprime Si“ bien l’ effet que produisent ces.
différens rapports; la mulique à Son tour peut
adopter le mot coloris , en nommant ainft cetté
variété de ftyle qui l’ affranchit d’ une monotonie
à laquelle il Semble qu’ elle s’ abandonne
parmi nous.
Si je ne me fuis arrêté: qu’à des réflexions
générales fur le mot enfemble, on doit Sentir
que je l ’a i fait pour me conformer à l’ idée que
préférite ce terme. Cependant il devient d’ une
Signification moins vague & plus connue,
lorSqu’il s’ applique au deffm. C’ eft dans cetté
acception qu’ il eft plus communément employé
par les artiftes , 8c de cet ufage plus fréquent
doit naturellement réfulter une idée, plus nette
8c plus précife ; auffi n’ e ft -il pas d’ élève qui
ne Sache ce qu’ on'entend par Venfemble. d’ uoe
figure, tandis que peut-être fe trouŸeroit-il des
artiftes qui auroient peine à rendre compte de
ce que Signifient enfmble poétique 8c enfemble
pittorefque.
Cet ufage , plus ou moins, fréquent des
termes de Sciences & d’ arts, eft un des obstacles
les plus difficiles à vaincre pour paryenir
à fixer les idées des hommes fur leurs différentes
connoiffances. Les mots Sont-ils peu ufîtes?
on ne connoît pas affez leur Signification. L e
deviennent-ils? bientôt ils le Sont trop. On les
détourne , on en abufe , au point qu’on ne fau-
roit plus en faire l’ ufage méthodique auquel
ils Sont deftinés.
Mais, Sans jn’ arrêrçr à citer des exemples trop