
dans l’âge , le fexe , les paillons des perfon-
nages ; contrajlc dans les mouvemens des différentes
figures ; contrajle dans le mouvement
des parties d’ une feule figure. C’ eft à ces deux
derniers objets que le mot contrajle eft plus
particulièrement confacré.
« Par contrajle, on entend en peinture la va-
» riété bien raifonnée de toutes les parties ;
» c ’eft l’ oppofé dë ce qu’on appelle répétition.
» S i , par exemple , dans un grcuppe de trois
» figures, l ’une fe montre de face, l’autre de pro-
» f i l , & la troifième par le dos, il y aura un bon
» contrajle. A in fi, chaque figure & chaque
» membre doit être en contrajle avec les autres
» du même grouppe, comme les différens
» grouppes d’ un tableau doivent contrafter
» ente’ eux. Mengs ».
Si plufieurs figures dans un même tableau
ont le même mouvement, f i , quoique leur mouvement
général foit varié , leurs jambes ou leurs
bras ou quelques autres parties tendent à décrire
des lignes femblables , le fpeélateur fera
juftement choqué que le peintre ait trouvé fi
peu de reffources dans fon a r t , quand la nature
lu i offre tant de variété. Les mouvemens doivent
donc être variés , mais cela ne fignifie pas
qu’ ils doivent être contraires les uns aux autres.
I l y a quelques circonftances où les principaux
mouvemens des différentes figures doivent
être lés mêmes, comme lorfqu’ elles concourent
enfemble' à tirer ou à pouffer quelque chofe.
Alors la variété ou le contrajle fe trouvera dans
des mouvemens acceffoires , dans l’ expreffion,
dans la différence des â g es, des formes , &c .
On recommande d’ obferver le contrajle ,
même dans une feule figure. Les deux épaules,
les deux hanches, les deux genoux lie doivent
pas être à une même hauteur. La tête s’ incline
du côté de l’épaüle la plus élevée; le bras fe porte
en avant du côté où la jambe eft portée en arrière
-, on voit le deffus d’une main & la paume
de l’autre. I l faut cependant obferver que la re- g
cherche- affectée & trop apparente des çon-
trajles ne feroit pas moins vicieufe que la fym-
métrie.
On a vu des peintres qui rendoient affreux
les vifages d’hommes pour les faire contrafter
avec les femmes. Cette reffource ne fuppofe
pas un grand art & ne mérite pas d’être adoptée.
On peut feulement en profiter quand elle eft
offerte par le fujet. La face de bouc, le teint
brûlé d’un fatyre contrajle fortement avec la
beauté d’une jeune nymphe & la blancheur de
fon teint ; le vifage ridé d’ une vieille nourrice
fa it un contrajle heureux avec les jeunes attraits ,
de Danaë.
On n’ a pas befoin de chercher les contraires
pour contrafter fuffifamm.ent. Le front chauve
d’ un v ie illa rd , l’ exprefiion de fon auftère fageffe
contrajlent bien avec le front ingénu d’ un
adolefcent que parent les boucles naturelles de-
fes cheveux. Les traits d’ une prudente mère qui
a la beauté de fon âge contrajlent avec la beauté
naiffante de fa modefte fille. La fière Junon &
la tendre Vénus, toutes deux également belles,
contrajlent par le caraélére différent de leur
beauté.
I l eft un autre contrajle trop négligé par les
peintres d’hiftoire : c’ eft celui des proportions.
On a mefuré un petit nombre de ftatues antiques,
& l’ on a donné pour règle d’ en fuivre les proportions
: on eft convenu d’éviter le trop d’ embonpoint
& la maigreur. Mais, comme le r e - -
marque le célèbre Mengs : « Les peintres doivent
» mettre infiniment plus de variété dans leurs
» productions que les fculpteurs, & font par-
» conféquent renfermés dans des bornes moins
» circonfcrites ». Raphaël femble avoir penfé
de même : il s’eft fervi de toutes fortes de proportions
, & l’on connoît de lui des figures qui
n’ont que fix têtes & demie de hauteur ; c’eft
encore le même artifte qui fait cette obferva-
tion.
Sans doute, fi l ’or, fait un tableau d’ un petit
nombre de figures, on doit leur donner $ fuivant
leur état, leur âge & leur fe x e , la plus élégante
proportion. Sans doute encore ce feroit
un défaut de repréfenter un guerrier chargé
d’embonpoint, à moins qu’on ne faffe un portrait
, parce que les exercices & les fatigues
d’ un homme de guerre lèmblent exclure une
corpulence qui fuppofe l’abondance 8c le repos.
Mais, dans une affemblée de magiftrats , de fa-
vans ; dans un concours de peuple , dans une
réunion d’ hommes , dont plufieurs mènent une
Vie fédentaire, tandis que d’ autres font livrés
à de rudes travaux , pourquoi ne raffëmbleroit-.
on pas toutes les proportions qui ne font ni r idicules
ni vicieulës? Pourquoi n’imiteroit-on
pas la variété de la nature ? N’ eft-cepas avertir
qu’on ne l’ imite pas que de mefurer tous les
hommes fur un meme module ? N ’ a-t-elle pas
des beautés véritables dans le nombre infini de
fes variétés ? Pourquoi dans une affemblée d’anciens
philofophes , Diogène, volontairement
miférable , ne feroit-il pas d’ une extrême maigreur;
le laborieux Ariftote un peu maigre ; le
voluptueux Ariftippe un peu trop g ra s, & le
faftueux Platon pourvu d’ un jufte embonpoint?
La proportion de Voltaire, celle de Montefquieu
feroient-elles déplacées dans une conférence de
gens de lettres? Puis-je croire que je vois un
peuple affemblé, fi je cherche envain des hommes
d’une haute Rature* s’élevant de la tête
prefqu’ entière au - deffus 4e quelques gens
d’une taille moyenne, tandis que ceux - ci
ont auprès d’eux des hommes d’ une proportion
courte 8ç ramaffée ? ( Article dç M, L e v e s ^ue )*
CON TRE -É PREUVE. (fu b ft. fem.) Terme
de deffin & de gravure. On couvre d une feuille
de papier blanf & mouillée le deffin, mouillé
lui-même, ou l’ épreuve d’une gtavure encore
fraîche , & on les paffe fous la prelffi d un
primeur’ en taille-douce -, alors le deffin o u i et tampe fe trouve répété en fens contraire fur 1
feuille de papier qui Y « o it appliquée Ce
double du deffin ou de l’ eftampe eft plusfoible
que ne l’étoit l’ eftampe ou le deffin qui eux
mêmes font plus ou Jo in s
la preffe étoit plus ou moins chaigee. Alois le
d e C e f t fix é , l’on ne craint plus qu’ l s’ efface
pat le frottement. Ce n’ eft pas pat la « p m e i a j
fon que l’ on tire une contre epreuve d une ef-
tampe, puifque le noir à l’ huile cp’ on emploie
po” t l’imprimer en affûte lui-meme la fixité :
mais cette opération eft utile aux | » v e u » ,
parce qu’ elle leur montre 1 eftampe a laquelle
B travaillent dans le même fens que le deffin
ou tableau qu’ ils copient, & qu elle leur fait
voir plus aifément s’ ils s en font écartés. Cependant
les graveurs négligent affez ordinairement
de fis procurer une contre-epreuve de leurs
e{lampes. Je ne condamne pas leur pratique: ;
mais je penfe qu’ il eft avantageux de regarder
fon ouvrage fous tous les alpeRs qu on peut fe
ménager, fur la planche , fur l’ epreuye , fur la contre-épreuve, & au miroir. ( Article de M.
L evesque ).
CO N VEN ANC E ( fubft. fém. ) Les conve.
nances n’appartiennent point à l’ effence de l’ars ;
mais elles en font une des plus importantes dépendances.
CO N T R E -H A CH ER , terme de deffin. C’ eft
couper par de nouvelles hachures l’es premières
hachures ou lignes de crayons qu on a tracées.
Ces nouvelles hachures fe nomment des concie-
'hachures. Elles doivent tendre a former avec
les premières plutôt des lozanges que des quart
s , ( Article de M . L evesque ).
CO N T R E -T A IL L E , terme de gravure. C’ eft
une leconde taille dont on coupe la première
que l’on a tracée. Si l’on veut la
pierre on coupe le premier rang de tailles de
manière que-les contre-tailles y forment des
quartés - mais pour imiter de la chair ou des
draperies , on affefte d’approcher plutôt du lo-
zange que du quarré. Cependant le lorange
outré devient défagréable parce que les fedions
que les contre-tailles font avec les tailles pro-
duifent un noir qui ne s accorde pas avec le
-relie du ton. Les graveurs difent çme ce travail maauerotte.-Le travail le plus agréable eft celui
quotient le milieu entre le quatre & le lozange.
Si l’ on hafardoit des lozanges outres a des-tra-
vaux qui devroient p rier a l’ eau-forte j elle
mordroit les fedions formées par les tailles &
les contre-tailles bien plus vivement .que le refte
du travail, & l’on rifqueroit d’être oblige de
recouvrir long-temps avant que la totalité de
l’ouvrage fût affez mordue. ( Article de M ■ L e-
l'a ïS S v S:
Un Tableau reliera toujours un e xcellent
ouvrage de peinture, fi les parties et*
fentielles de l’ art y font d’ une grande beauté ,
quoique le peintre y ait manqué aux convenances
d’hiftoire , de coftume , & c . : mais en jouiffant
de fes talens , on regrettera qu’ il n’ ait pas ob-
fervé les convenances. Les tableaux vénitiens font remplis d ana-
chronifmes , de fautes contre l’hiftoire & contre
le coftume: & quoique en même-temps ils
ne foient pas d’ une grande correaion de deffin ,
on leur pardonne toutes ces défeétuofires en faveur
du pinceau, de la couleur, & de 1 imitation
des plus riches étoffés.
Rembrandt deffinoit encore plus incorreâe-
ment que les Vénitiens : il étoit_ encore bien
plus bizarre & beaucoup moins riche dans le
coftume : on prétend qu’il appelloit fes antiques
de vieilles armures, de vieilles hardes barbares,
bien plus convenables a un cabinet du curiolucs,
qu’au cabinet d’étude d’ un artifte ; mais il réunifient
à un fi haut degré les qualités qui conf-
/ • - - J : - ----- f u Ë j f i g f l f fMÿM '
VOlt le s o u v r a g e s , vj--* ...
de liberté pour lui faire des reproches.
Mais fi les vrais connoiffeurs ont cette indulgence
en faveur de l’ignorance de quelques
artiftes, de leur humeur capricieufe , du goût de
leur école^ils proportionnent cependant cette indulgence
aux beautés,& montreroient avec jufti-
ce beaucoup plusdefévérité envers desartiftes qui
ne compenleroient pas les mêmes defauts par
un mirite é g a l, qui n’ auroient pas le degré
de talent qui fait pardonner le caprice, qui for-
tiroient d’ une école où ils ont appris les convenances
en même-temps que les regies de leur
art & qui vivroient dans un fiécle où la facilité
de s’ inftruire rend l’ ignorance inexcu-
fable,
Michel-Ange étoit loin d’ être ignorant : auflï,
malgré la fcience de fon deffin & la fierté de
fon cifeau , ne lui a-t on pas pardonné les défauts
des convenances qu’il s’eft permis , fans
qu’ils puffent lui fournir aucune beauté particulière.
On lui a juftement reproché d’ avoir introduit
Caron & fa barque dans le tableau du
jugement dernier : on. a févèrement condamné
l’ inconvenance de fon Moyfe à vifage de bouc
& vêtu comme un forçat. Ecoutons M. Falconet
fur ce dernier ouvrage ; Mengs ne lui eft pas
plus favorable:
« Un héros , le légiflateur , le ch e f d’ un peuple
doit être repréfenté dans l’ attitude la plus con- „ venable à la grande idée qu’on s’en en eft
« faire. Il doit avoir une aâion caradériftiaue .