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de la rcîne des fleurs l’objet principal d’ une
compofition.
Au refte chacune des deux manières dont j ’ai
parlé a fes écueils. En effet, fi le peintre du
genre le plus nob le, fier de fa prééminence,,,
traite avec une forte de dédain & d’ un pinceau
trop négligé des objets aufli précieux que lés
fleurs ; s’ il croît les rappeller affez par des à pèu-
p rè s , des formes' négligemment caradérifèes ,
deis teintes trop facrifiées , cette hrfüteur déplacée
nuira plus qu’on ne penfe à fon ouvragé.
D’une autre part, Je peintre'foigneux qui veut
rendre jufqu’aux plus petits détails de chaque
f le u r , de chaque feuille , de chaque fruit qu’il
repréfente , 8c qui en fait fucçelfivement peur
lui un objet principal, tandis qu’ il ne doit y
en avoir qu’ un Teul dans* fon ouvrage, rifque
d’être froid , & de manquex le faccès qu’il
defirë. .
On a vu plus d’ une fois les peintres àefleurs
prêter leur fecours aux peintres d’ un autre genre,
même à dés peintres d’ hiftoire. Ces unions peuvent
être avantageuses dans la peinture à ceux
qui les forment, fur-tout s’ il? font doués de
vrais ralens , 8c s’ ils pofsèdent les ccnnoiffahces
fondamentales de l’art. Car le peintre d’hiftoire
le trouve alors comme forcé de terminer davantage
, & le peintre de fleurs de mettre dans
,fon fa ir e plus de liberté 6c plus d’efprit. C’ eft
ainfi que les hommes aimables, lians & doux
acquèrent de l’énergie en fréquentant les hommes
auftères, 8c donnent à ceux-ci plus d’agrément
& de flexibilité. C’ eft ainfi que les unions
heureufes modifient les caradères êc rendent
plus parfaits ceux qui ont le bonheur de lés
former & d’en connoitre les avantages.
I l eft differens genres de perfeéiions propres
aux différentes manières dé traiter chaque obje
t ; mais il eft auffi des défauts qui leur font
attachés. La fechereffe , le froid , la molleffe
font les écueils du peintre précieux; findéci-
fion des formes , celle des teintes *,•une touche
trop prononcée , font les défauts que doit craindre
le peintre dont la manière eft plus fpirituelle
& phis libreï
Defportes , Baptifte , Michel - A nge des Batailles
, Mario de’ F io r i ont atteint dans leurs
beaux ouvrages la .perfedion de e^tte. manière
libre 8c favante. Van-Huyfom a Uittéxontre la
nature , ne fe concen.taftt pas de l’ indiquer.. &
voulant l ’égaler. Les premiers avec-une touché
fiere.r 'im pinceau mâle , un . procédé .prompf,
ont' lu tranfmettre l?idée , plutôt: qu’ils j ri’onî
donne ;la repréfentatiofi; précife. dei la légèreté:
des fle u r s , 8c des différentes fubftances dont
fontcompofés les fruits,; l’oeil croit toucher la.
molléffe,de,la figueen fa maturité , les rugofités
de l’écorce-du melon, la fraîcheur de.fa pulpe ,
quoique tout cela ne fo it, pour ainfi dire y que .
wfigné; Van-Hpyfum, avec moins é e preflige I
; F L O
& non moins d a r t of f r e effeéHvement le'du-
vet dè la pêche , le velouté fin .& tranfparent
de la rofe , la limpidité d’ une goutte d’eau ,
lès maffës prefqu’imperceptibles d’un nid d’oi-
feau ; & , dans l’ incertitude où vous jette fon
charme magique , tantôt vous êtes tenté de porter
la. main fur l’imitation trompeufe , tantôt
vous craignez ,de flétrir par le toucher le plus
délicat une image fi précieufe.
Jeune.s artiftes qui vous êtes confacrés à ce
genre, fi vous portez envie à la variété des autres
genres qui lémblent offrir la reffource d’un
plus grand nombre d’objets , & les richeffes
d’accidens plus multipliés , fi cette idée vous
refroidit fur les bornes qui vous femblent pref-
crites , fongez qu’elles font plutôt celles de
• votre talent que dé votre genre. Vous travailleriez
tout votre vie avec la plus grande affi-
duité, fans pouvoir épuifer les combinaifons
dans lefquelîes vous vous, êtes reftreint, 8c il
ne s’agit peut-être pour vous détromper & vous
rendre le courage, que de vous en ouvrir les
fources. ( Article de M . J ^ a t e lu t .)
FLOU. A confidcrerce mot grammaticalement
on ne fait à quelle clafle le rapporter. I l eft adverbe
dans, cette façon de s’ exprimer, il peint
f lo u ; il femble être ad jed if dans ces phrafes
cela eft flou , ceg tableau eft flo u ; cependant il
n a pas de féminin 8c on ne peut dire , cette
figure eft floue. (L-)
I l femble cependant que ce foit un vieux mot
qui vient de l ’adj&if latin fluidus ; il exprimé
la douceur , le goût moëleux, tendre & fuave
qu’ un peintre habile met dans fon ouvrage. On
trouve fioup dans Villon , 8c Borel croit qu’ il
. %nifie flouet , c’eft-à-dir.e mollet, délicat.
Quoiqu’il en foie, peindre flo u , c’ eft noyer les
teintes avec légèreté., avecfuavitè, avec amour;
c’ é ftle contraire dépeindre durement &:féche-
nient., ( Le Chevalier de J aucourt , dans l'a n cienne
Encyclopédie. )
Le moz flou n’a d’autre but que dé défip-ner
un certain caractère doux 8c un peu va<nie dans
l’ harmonie de la couleur d’ un tableau. On ne
peut dire autre chofe à ceux qui n’ ont pas un
grand ufage de la peinture, 8c qui ne s’occupent
p^s de la pratique de cet a r t , finon que ce mot
/étant fort difficile à bien comprendre , il eft à
propos qu’ ils n’ en ufent que bien rarement ,
: poux ne pas l’employer mal - à - propos. Quan t
aux* artiftes, & fur-tout aux élèves , s’ ils ont
du .penchant à peindre flou , ils ne doivent pas
j oublier que cette forte de mérite eft bien voisine
d’ un vice , & que s’ils ne rempliffent pas
'bien précifemenc. ce, qu’on • entend par peindre
fl,oit y ils tomberont dans un coloris indéterminé,
dans la molleffe du fa ire , & qu’ en cherchant-
à plaire à la portion du public dans- laquelle
.'ne fo trouvent pas leurs véritables ju g e s , ils.
F o i
^attireront la cenfure févère dé c.eux qui ont
le droit de prononcer fur leurs ouvrages. ( Ar?
tivle de M> XTa t e l e t . )
, F.xou., eft un terme qui ne fort pas des at-
teliers, & n’ eft guère entendu q;uç de.s gens
de l’art. I l n’ eft pas fynonyme du mot fo n d u ,
quoiqu’ il exprime un pinceau qnxfondlçs couleurs
& -les noyé les unes .dans les autres. La
différence entre ces deux mots eft i ° . que le
mot flou exprimé l’ excès, àu fo n d u , z0.,-Qu’il
fuppolé une grande légèreté de couleurs fur-tout
dans les .ombres. A in fi, plufieurs peintres des
différentes écoles 'd’I ta lie ; les Allemands • en
général, & en France le Bourdon , Louis Boul-
logne , Carie Vanloo fondoiënt toutes leurs couleurs
; mais ce n’étoit ni avec:cet excès:, ni avçc
cette '.légèreté' de tons dans le s ombres, qu’oit
pourroit exprimer par le mot flou. Carlo D olc e ,
&c chez nous Alexandre Grimou , Raotïx, & c.
ont vraiment peint flou . Les Italiens rendent
trèsrënérgiqtiement.ce genre de pinceau par le
mot sfumato ; telle eft la lignification bien dé-
terminéede ce qu’on entend par le met f lo u .
Ce genre de peindre a beaucoup de partifans *
dans le ipublic, parce qu’ il rend la couleur
î iffe fans nulle touche , ni j épaiffeur de couleurs
Ù & qu’il produit ( comme ce public s’exprimé)
une peinture bien douce. Mais cet éloge
affez mal fondé ne doit pas empêcher d’apprécier
cette maniéré 8c de montrer ce qu’ elle a dé
vicieux.
Ce flou Si flatteur à l’oeil n?eft ordinairement
que îe”fruit*â’ une pure habltéde & jamais celui
o if fa voir ni du fentiment; I l décele fouvent au
contraire l’ ignorance qui l’ adopte pour fe ca-
cher fous l’ombre d’une exécution aimable.
Le flo u ou \e fo n du exceflif difpenfo de rendre
par la’ toüché , dans les chairs, le fens desimuf-
c le s , leurs mouvemens & leur nature diverfo ;
celles des fëmmes>, des' hommes, des enfans^
fcnt toutes exprimées par un 'pinceau fiowRVeo .
le même féntiment ,-‘oU plutôt avec fa •.même:
abfénce-de feiitiment. La féchereffe naturelle! ■
des métaux & leur >piquante lumière ; le câffé; i
des plis du taffetas, le moëleux du velours , ‘
ie'fini du fatin , *l:a rondeur du drap, tout enfin ■
eft de la même exécution dans un tableau f lo u ,
&• les objéts n’y font guère différenciés que part -
leurs couleurs & leurs formes encore molle-i
ment fonties. > ' v \
Dé tout-ce que je viens d’ expofer, on peut
conclure que ce genre; eft la reffoutce des âmes
froides , des deflinàteurs médiocres, & doit
être regardé comme une manière vicieufe toutes
les foisqu?elle eft' géhérale & univerfellement
employée dans un-ouvrage. ( Article de M . R a *
mu* ) '
FO
FO IB LE . ( adj. ) C erao tnefe prend ôrdinai;.
F O I
rement dans un.fens abfolu qu*en parlant.de
l’ effet de la couleur. Ce tableau éft fo ib le ,
c’ eft-à-dire que la couleur en eft peu piquante ,
que l’ effet n’ en, eft pas vigoureux.
Si l’on veut parler de quelqu’autre forte de
foiblèjfe , il faut la fpécifier. Ce tableau eft
fo ib le de defïin, fo ib le de compofition y"fo iUe
d’exprefïjon.
-Un table.au fo ib le d’ effet,peut être écrafe par
un o,uvrage inférieur,, mais plus vigourei1^*
en eft .comme de ces hommes démérité à qui.
la timidité, permet à peine d’élevér la voix dans
la Société ; Us fe voyentfouyent préférer l’homme
dont le plus grand mérite eft cèlui de fe faire
valoir. ( ArticU d e M . L ev e sq u e ).
' FOIBLESSE. ( fubft. fém. ) Ce mot a une
lignification pxé.çifç dans les arts , qui demande
à être -expliquée. Ce feroit mal-à-propos qu’on
l’ employeroit pour dëfigherce qui e fj mauvais.
.. .U?n ouvrage à qui l’on reproche dé H fo i -
blejfe peut àtçe, celui d’ un talent qui entré dans
la route du. grand ; mais qui n’ eft,.pas encore
affez çpnfommé, pour avoir toute, la jpùrete qu
la fermeté qui caraéiérifent ies ouvrages au prë-
inier mérite , ou bien lafo ibleJfe eft la marque
de l ’âge & fe. font de fa caducité.
Pour.. exemple d e : la première lignification
du mot fo ibleJfe, nous citerons le tableau de
le Brun au .Palais Royal fa i t , dit-on, à dix-
huit ans.; ’ 1 eft plein de chaleur ; niais il mon-
t/e le défaut d’ à.cqujs dans-le; i delfiri., Cèlui
quq fe F-oüffnL a fait pour les Capucins.çfo Blois
g de; la moliefTe, -de. la difcordance, des inc.pr-
redions ; mais il décèle par-tout lé. jeune talent.
;~
Les quatre tableaux des faifons. de ce célèbre
artifte^ qui font dé la collédion du Roi ;
la Madeleine de Mignard aux Théatins , ont
de la molleffe & de la pefante,ur, vices des artiftes
vieillards.
Tous ces tableaux font fo ib le s , non parce
qu’ ils font fâux , vrai caractère des mauvais tà-
hleâux , mâisyparce que les vérités ÿ-font f o i -
blcpïent exprimées.
A in fi, telle eft la diftindion d*un ouvrage
de l’art qu’on nomme m auvais, d’avec celui
qui .eft foible , .que celui-ci fqut partir d’un ef*
prit Ju fte qiii entre dans la route dé la beauté,
ou qui, ne peut plus s’ y foiitenir , au lieu qu’ üiie
mauvaife produdion efr celle d’ un efprit qùl.
ne conn.oît le chemin du paturel dans auctfrie
partie , & qui néanmoins exécute’ avec une
hardieffe qui décèle le faux jugement & l’ef-
fronterie du charlatan. Les exemples de ces ira-
pofte,urs ne font rares ni en fculptùre n| en
peingiire. ,
Les , mots fp ib le $ foiblemeni , fo ib lir he jfopt
que de^ difièrenÿes gran^naticales de l2. foibUJfe