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être Te permettre, dans les grands mouvelnefts
que produifent les grandes pallions, quelques légères
nuances d’une exagération qui ne peut cependant
être autorifée que par un talent fupé-
jpieur; mais fi cette inrra&ion aux lois de là
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raifon , aux principes de r&ftatèfti'e & de la
pondération, peut etre quelquefois pardonné©
d’après fon fuccès, elle ne peut être ni de
précepte , ni de confeit pour les artiftes. ( A r ticle
de M- IVa t e e e t . )
P a l e t t e ( fubft. fem. ) , planche de bois
de pommier, ou de noye r, fur laquelle le peintre
place fes couleurs & fait fes teintes, On en
parlera dans le ViOionnaire de Pratique.
Quand les couleurs ne font pas fondues
dans un ouvrage , quand elles rendent mal la
nature , quand elles femblent avoir été placées
fur le tableau , comme elles l’étoient fur
la palette , on dit que ce tableau fent la palette.
PANTOMIME. ( fubft. fem. ). L’ art de
tout imiter par le gefte. La connoiflan.ce de
cet art eft très-utile aux peintres , & aux
fculpteurs, puifque les perfonnages qu’ ils créent
ou repréfenrent font privés de la parole , &
doivent cependant parler aux fpeflateurs un
langage intelligible. C’ eft par le gefte qu.ils
le font entendre, & ce gefte doit être nmple ,
naturel, tel que celui de perfonnes qui parlent
& qui accompagnent leurs difeours d une
a&ioii modérée, & non pas femblable à celui
des muets qui n’ont que des mouvemens pour
langage. Quelquefois même la pantomime le
pafiè dugefte , proprement dit ; car on n’ appelle
gefte que l’ a&ion des membres , & la panto•
mime peut s’ exprimer éloquemment , & d’ une
-manière intelligible par l’ immobilité même ,
accompagnée d’ un regard.
Les idées fa r le gejle, qu’ a publiées en A llemagne
M. E n g e l, membre de l’ Académie de
Berlin , peuvent êtrefouvent utiles aux artiftes,
quoiqu’ il ne fe foit propofé que d’ inftruire les
comédiens. Tout ce que nous dirons dans cet
article fera généralement fondé fur _ce traite,
dont nous retrancherons tout ce qui n’ a rapport
qu’à l’ art théâtral. On peut le lire entier,
traduit en françois par M. Janfen , dans fon
Recueil de pièces intêrejfantes concernant les
antiquités, les beaux a r t s , &rc. T. I I I & IV .
L’ auteur définit la pantomime un art par le quel
on peut juger de la fituation de l’ame
par les mouvemens momentanés du corps.
Il ne fuffit pas à l’artifte pour exceller dans
l ’ expreflion de la pantomime de repréfenter les
pallions avec les cara&ères qu’ elles peuvent
offrir dans la première perfonne qui en feroit
affe&ée. La colère d’ un fage n’ eft pas celle d’ un
homme vulgaire : la douleur de Régulas , s’ il
eft vrai qu’ il ait été livré par les Carthaginois
aux plus affreux tourmens, n’a pu être celle
qu’auroit témoignée un efclaye condamnée au
Tome L Beaux-Arts»
P
même fupplice. D’ ailleurs l’ imitation , U copie
fidelle & fervile de la nature , ne fuffit dans
aucufi art. La nature , il eft v r a i, crée fou vent
les chofes avec une telle perfection, que 1 art
doit fe borner à les faifir telles qu elle nous
les préfente, & à les rendre avec la plus feru-
puleufe fidélité -, mais quelquefois aufli, meme
en développant toutes fes forces , elle n atteint
pas au degré de perfeaion néceffaire , & fés
productions font tantôt équivoques , tantôt
roibles, & tantôt outrées. Alors il eft du devoir
de Tart de corriger ce qu’ elle offre de défectueux,
d’ adoucir ce qu’elle a trop fortement
prononcé , de rendre la vigueur à ce qu’ elle
a trop foiblement exprimé. On y parviendra en
raflemblant une maffe d’obfervations que l’ art
doit avoir foin de re cu e illir, & dont il formera
( des principes qui en feront le réfultat.
1 L’ homme paffionné exprimera toujours fa paf-
fion d’une manière vraie par fes paroles ; mais
ces paroles pourront être baffes , peu intellig
ib le s, peu conformes au génie de la langue ;
& l’écrivain qui voudroit profiter de ces difeours,
feroit obligé d’ en changer le ftyle. Cèt
homme paffionné peut faire dans le gefte les
mêmes fautes qu’ il commet dans le langage ;
fon gefte aura donc befoin d’ être corrigé par
l’ artifte. . ,
Le grand artifte à qui l’antiquité dut la prin-
pale figure du grouppe de Laocoon, avoitfans
doute obfervé . des hommes dans les fouffrances
de; corps & d’ efprit ; mais ces hommes qu’il
avoit obfervés n’avoient pas la grande ame
qu’ il fuppofoit à Laocoon .* il fut donc obligé ,
pour créer fon chef-d’oeuvre , de modifier les
obfervations qu’ il avoit faites fur la nature ,
& de joindre l’idéal qu’il ne trouvoit que dans
fon génie, à la vérité infuffifante qu’ il rencon-
troit dans fes modèlest
Mais ne faudroit-il pas abandonner toute cette
partie aux obfervations & aux réflexions dés
artiftes , fans effayer de la foumettre à des
réglés ’ N ’e ft-il pas à craindre qu’ en fangeant
à obferver des règles , ils ne produifent des
ouvrages qui fendront la gêne & la fatigue?
I l eft bien vrai que tant que l’Artifte n’eft
I encore que difciple, tant cju’ il eft ob lig é , pour
opérer , de chercher la règle dans fon elprit ,
incertain de l’ application qu’ il en doit: fa ir e ,
& craignant toujours de l’enfreindre, il n’aura
qu’ une exécution imparfaite, & peut-être même
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