
dont nous avons cru néceffaire de donner le
fcns précis. ( Article de M . R o b in . )
FO ND. ( fubft. mafc. ) Ce mot , en peinture,
lignifie ou les derniers plans efune compofition ,
ou le champ qui entoure un objet peint.
Ce dernier fens comprend les préparations
fur lefquelles on ébauche un tableau , c’ eft-à-
d ire , l’apprêt ou les premières couches de couleurs
dont on couvre la to ile , le bois , le cuivré
ou la muraille fur laquelle on veut peindre.
I l me femble que les artiftes laiffent fouvent
à l’ habitude, à l’exemple ou au hafard , à décider
de la couleur fur laquelle ils commencent
à ébaucher les ouvrages. Je crois cependant
que cette partie de leur a r t , ainfi que plufieurs
autres qui paroiffent de médiocre confé-
quence, devrait être quelquefois l’ objet de leurs
recherphes , de leurs épreuVes & de leurs réflexions.
I l eft vrai qu’il efl des peintres difficiles,
qui dans l’ indécifion de leur compofition, qu’ ils
n’ont point affez réfléchie, couvrent plusieurs
fois leurs ébauches, & fubft ituent des maifes
claires à des maffes (ombres, en cherchant leur
effet. Pour ces peintres , le premier apprêt ne
peut devenir l’objet de leur combinaifon ; mais
un peintre facile ou prudent, qui fe feroit une
loi de ne commencer un tableau qu’aprèsxune
efquiffe arrêtée , pourioit fe décider fur le premier
apprêt, pour rèndre par (on moyen (es
maffes claires plus brillantes 9 8c pourrait, en
ménageant fa couleur, leur donner un tranf-
parent q u i ferviroit à mieux imiter l ’éclat de
la lumière.
Rubens , cet artifte à lafois facile & profond,
cet homme de génie, qui a vu la peinture en
grand , a fu tirer parti du fond de (es tableaux
8c des g la c is , & c’eft aux artiftes de cette
«laffe que les pratiques même les plus dange-
reufes fourniffent des reffources & des beautés.
1 1 peignoit fouvent fur des fo n d s blancs /mais
pour éviter l’ inconvénient que peuvent avoir
les for\ds de cette couleur dans les grandes maffes
d’ombres, ne pourroit-on pas, d’après une ef-
quifle bien arrêtée , faire préparer fon fo n d par
grandes maffes blanches 8c brunes,. & cette
pratique ne vaudroit-elle pas mieux que celle
de peindre fur d es fo n d s g r is , brans ou rouges,
qu?on regarde comme des fo n d s indifférens 8c
qui en effet ne (ont favorables ni aux maffes
claires, ni aux maffes d’ombres?
Mais en voilà affez pour lès artiftes intelli-
gens , & trop pour ceux qui , efclavës de l’habitude
, croient que ce qu’ils n’ohtpaa vu faire
à leurs maîtres ne peut être bon.
Après avoir parlé de Fàpprêf qui fait le principal
fo n d général du tableau , je vais dire quelque,
chofe du champ particulier fur lequel fe
trouvent les objets que renferme un tableau.
Ce qui diftingue les objets les uns des autres,
c’eft l’ oppofition des nuances claires & obfcures.
Dans tous les objets qu’offre la nature, la nuance
que préfente le côté éclairé d’un corps , fait
paraître celui qui eft à côté plus teinté. La partie
ombrée produit l’ effet contraire. Sans cette loi
de la nature , les objets confondus enfemble ne
nous offriraient point ce que nous nommons le
t ra it , qui eft la ligne claire ou obfcure , qui
nous donne l’ idée de leur forme.
Un flocon de n e ig e, lorfque nous le diftin-
guons dans les a irs , fe détache en brun fur la
teinte que la lumière répand dans le ciel : fi ce
même flocon paffe devant un nuage obfcur , il
reparaît blanc, en raifon de l’oppofition du
fondant lequel il fe trouve ; s’il s’ interpole enfin
vis-à-vis d’un mur noirci par le temps., il prend
cette éclat dont nous ne devons l’ idée générale
qu’à la plus grande habitude que nous avons
de voir la neige en oppofition avec des objets
qui relèvent fon éclat. Une branche d’arbre,
examinée avec foin , donnera une idée jufte
de cet effet. Souvent dans un court efpace ,
elle fe détachera plufieurs fois , alternative-
vemént en clair & brun fur 1 e fo n d \ ce font
ces variétés , qui prêtent leur fecours au peintre ,
lôrfqu’ il veut chercher dans le« oppofitions des
reffources pour l’harmonie.
I l reconnoîtra, en examinant ce jeu des couleurs
caufé par les fo n d s , qu’ il peut à (bn
gré diftinguer plus ou moins les objets par des
combinaifons d’oppofitions dont il peut ablolu-
ment difpofer. I l trouvera aulli pour rendre
fon coloris plus brillant, que certaines couleurs
fe détruifent, tandis que d’autres fe font valoir.
L’incarnat devient pâle fur un fo n d rouge. L e
rouge pâle paraît v i f & ardent fur un fo n d
jaune. La nature des fo n d s étant le plus fouvent
à la volonté de l’ a rtifte , il eft autorifé à choi-
fir 8c à donner aux objets de fes premiers plans
& aux draperies de fes figures principales, les
fo n d s qui doivent leur être les plus favorables.
' Gette réflexion conduit naturellement à parler
de ce qu’on appelle fo n d s , lorfqu’on entend
par-là les derniers plans d’ une compofition.
Les diffétentes modifications qu’on ajoute
ordinairement à ce terme , lorfque l’on s’ en
fert dans ce fens , indiquent ce que l’artifte
doit obferver.
On dit d’ un tableau de payfage, qui repréfente
un fite très-étendu, dans lequel une dégradation
de plans infenfible & multipliée fe
fait appercevoir , que le fo n d de ce tableau eft
un fo n d vague.
.L ’artifte qui peint l’étendue des mers , d o it,
par un fo n d -aerien 3 faire fentir cette imraen-
ftté de lieu dont la diftance n’eft pas défignée
par des objets fuccèllifs. Un fo n d agre'able eft
celui qui nous offre l’image d’un lieu où no us
fouhaiterions nous trouver.
Un fo n d devient piquant par le choix de la
couleur du ciel 8c de l’inftant du jour.
I l eft f r a i s , s’ il repréfente le ton de 1 air au
matin -, il eft ch au d , fi le coucher du fbleil
lui donne une couleur ardente.
Le fondpittorefque eft celui dans lequel un
choix ingénieux raffemble des objets favorables
au peintre 8c agréable au (peâateur.
H faut dans certains fujets d’hiftoire des fo n d s
riches : Ce choix convient à une partie des actions
tirées de la fable ; à ceux que fourniffent
les hiftoires Afiatiques , aux triomphes, aux
fêtes y 8cc.
La fimplicîté, l’ auftérité même convient (
aux fo n d s des tableaux qui repfefentent les
objets de notre culte. I l font favorables auffi .a
la plupart des objets pathétiques. Rien ne doit
détourner de l ’ intérêt qu’ ils font naître ; c’ eft à
l ’a me qu’il faut parler principalement.
Cependant toutes ces Qualités différentes, que
la raifon & le goût diftinguent, font renfer-
. me es dans celle-ci : les fo n d s doivent etre toujours
convenables au fujet que l’on traite.
Voye\ le mot F abriqcb, dans l’explication
duquel il y a plufieurs chofes qui ont rapport
eu mot fond. ( Article de M . X^a t e l i t . )
F ond. Ce terme a plufieurs acceptions en peinture.
On appelle fo n d la matière fur laquelle on
fait le tableau : un fo n d de mur , de plâtre , de
■ cuivre , de bois , de marbre , & c .
On nomme de même l’apprêt ou l’ enduit
imprimé fur ces matières. En ce fens , on dit
un fo n d à l’ huile , un fo n d à la colle , un fo n d
. blanc , gris , rouge , 8cc. L e mot fo n d alors eft
fynonyme du mot imprejjîon.
Dire comment ces fo n d s ou imprejjions veulent
être faits , quels font les meilleurs, (oit
par rapport aux matières dont on doit les com-
pofer, foit eu égard à la teinte , quels ont ete
. les ufages des différentes écoles, quels font ceux
enfin qui conviennent aux diftërens fujets , aux
.divers genres, & à chaque efpece de peinture,
ce font des détails qui tiennent à la pratique,
& feront mieux placés à l’article imprejjîon.
F ond pour la peinture propre au théâtre fe
.dit quelquefois de la toile qui borne la feene
8c termine les couliffes,
Mais nous ne confidererons ici le mot fo n d
que relativement à l ’ art de peindre. Sous cette
acception on peut examiner le fo n d du tableau
dans toutes les parties de l ’art •, fa voir, par
rapport à l’ invention dans les compofitions pit-
torefques 8c poétiques, dans le coloris, dans l’ effe
t , dai\s l’exécution, & même dans l’expref-
(ion. Suivons donc le''mot fo n d (bus tous ces
points de vue.
Soit que le peintre doive repréfenter un fujet
g ra v e , tragique ou plaifant ; foit qu’ il traite
une fcène renfermée ou plein en air; foit qu’ entre
les parties du jour il choififfe le matin ou le
Joir ou la nuit ; dans quelque lieu, dans quelque
fiècle que fes figures doivent être (uppofées,
le fond de fon tableau peut contribuer -à lui
donner le caraélère le plus convenable.
L’artifte raifonnable fe reconnoît dans le
choix du fond. Veut-il peindre des folitaires
au milieu de leurs rochers, il ne montre que
des pins ou des chênes ; le ciel même eft coupé
de nuages fouettés 8c de maffes tranchantes.
Le#fofiers, les myrthes doivent meubler une
campagne habitée par la Déeffe des Amours ou
par de tendres Bergères -, alors des nuages légers
annonceront la pureté de l’ air qu’on y
refpire. Si l’artifte établit fon a&ion près d’ une
ville afliégée, il faut que par-tout l’herbe ait
été foulée aux pieds des chevaux 4 montrer fur
,ce théâtre de défaftres des arbres fur pied ,
des plantes vertes 8c fraîches,des prairies émaillées
, ce feroit une ineptie rebutante.
Un homme un peu inftruit place Alexandre
dani un temple orné des ordres de la Grèce,
& Numa dans un lieu paré d’ornemens & de
ftatues d’un genre étrufque -, les derniers Empereurs
& nos premiers Rois habitoient l’archi-
teâure dégradée du bas empire, on doit les y
placer; 8c ceux du huitième ou dixième fiècle
habiteront des palais d’une architecture gothique.
Enfin le fond doit contribuer , comme
tout le refte de l’ouvrage , à foutenir le çarac-
• tère du fujet.
. . . . . . fervttur ad itnum
Quali9 ab ineepto protejferit............
Horace, A rt. P vit.
Le peintre fera donc de»fonds propres à fes
a&eurs avec autant d’exaétitude & plus de recherche
qu’on n’en met communément fur les
théâtres.
Le fond n’eft pas feulement ce qui fe voit
derrière les figures , ni te dernier plan de la
compofition ; fouvent il entrecoupe la fcène 8c la
devance , il anime le fujet, lui donne du repos ,
& en indique les plans.
Mais fi par rapport à ce que la raifon 8c la
i convenance exigent du peintre, les loix de
l’art font connues : fi elles ont certaines limites ,
on n’en admet point pour la compofition pitto*
refque. Comme dans toutes les parties de Fart,
on ne peut à cet égard défigner le mieux pof-
fible , la tâche du peintre eft de le faire fentir.
La théorie fur 1 es fonds fe borne à quelques
principes généraux : par* exemple, la compofition
du fond doit contrafter avec les figures
8c les mettre en valeur ; c’ eft-à-dire , que fi
le plan général de la difpofition des figures eft
parallèle au bord du tableau , il faut que le
plan du fond foit circulaire ou triangulaire ; &
au contraire fi le plan des figures eft tour