» Vous voyez que je fuis nud & que je tremble de tous mes
» membres «. Lorfque cela eft fini, l’Enfant eft cenfé réconcilié
avec les démons ; autrement ils s’imaginent que cet enfant eft la
caufe des tempêtes & des ouragans.
Les Kamtchadals font fi curieux de fonges & y ont tant de foi,
que la première chofe qu’ils font le matin en s’éveillant, c’eft de fe
les raconter les uns aux autres, & c’eft par ces fonges qu’ils jugent de
ce qui doit leur arriver. Es ont des réglés fixes & invariables pour
l’interprétation de quelques fonges; comme, par exemple, s’ils ont
rêvé de vermines, ils s’attendent à voir le lendemain arriver les Co-
faques chez eux. Lorfqu’ils rêvent qu’ils font leurs néeeflïtés , ils
croient que c’eft un ligne qu’ils auront des Hôtes de leur Nation.
Quand ils rêvent qu’ils jouilfent d’une Femme, c’eft un préfage
d’une heureufe chalTe,
Outre la magie & les fortileges , ils font fort adonnés à la Chiromancie;
ils croient pouvoir prédire à un homme le bonheur ou
le malheur qui doit lui arriver , en regardant les.lignes qu’il a dans
la main ; mais ils cachent avec beaucoup de myftere les réglés de cet
art. S’il vient à paraître une ligne ou une tache fur la main de quelqu’un
d’eux, ou fi cette tache vient à difparoître, ils confultent aulfi-
tôt fur cela une vieille forciere. M. Steller lui-même s’en aifura
en feignant d’être endormi.
C H A P I T R E X I I I .
D e leurs Fêtes '& des Cérémonies qui s y ohfervent.
J. ' o u s les Kamtchadals n’ont qu’une Fête pendant l’année, dans>
laquelle ils fe purifient de leurs fautes. Cette Fête fe célébré ,
fans jamais y manquer, dans le mois de Novembre, qui s’appelle,
par cette raifon, le Mois de la purification des fautes. M. Steller
eft dans l’opinion qu’elle a été inftituée par leurs Ancêtres ,
pour remercier Dieu de fes bienfaits ; mais que dans la fuite lé
véritable principe de cette Fête a été.obfcurci par des fables auilï
folles que ridicules. Cela me paraît d’autant plus fondé , qu’après
avoir fini leurs travaux de l’Eté & de l’Automne, ils croiraient commettre
une grande faute de travailler,de fe vifiter les uns les autres ,
( ou même d’aller à la chaffe avant cette Fête. Si quelqu’un s’écarte
[de cette conduite, foit volontairement ou par néceffité, il eft ab-
f folument obligé d’expier fa faute & de fe purifier. C ’eft en quelque
! façon ce qui donne lieu de croire que leurs Ancêtres, après avoir
[préparé leurs provifions de bouche pour l’Hiver, avoient .coutume
d’offrir à Dieu les prémices de leurs travaux, & enfuite de fe réjouir
f enfemble en allant les uns chez les autres. Lorfqu’ils célèbrent cette
[Fête, ils y obfervent entr’autres chofesplufieurs minuties qui ne
mériteroient pas d’être rapportées. Cependant comme elle fe célebre
| fans jamais y manqiier , j’en donnerai un détail exaét depuis le commencement
jufqu a la fin, fans même en omettre la plus légère çir-
f confiance , non que je penfe faire plaifir à mes Leéteurs, car le re-
; cit de ces folles puérilités fera plus faftidieux qu’agréable ; mais
pour faire connoître jufqu’où va la fuperftition & l’extravagance de
ces Peuples,
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