
 
        
         
		68  H i s t o i r e 
 exemple, les Volcans, les hautes Montagnes, les Fontaines  bouillantes  
 , les Bois, &c. font  habités par des démons  qu’ils  craignent  
 & refpeélent plus que leurs Dieux. 
 Ils appellent les Dieux des Montagnes Kamouli , ou  petits Génies. 
   Ce  que  nous  nommons  Génie r  s’appelle  en  Kamtchadal  
 Kamouletch.  Ces-Dieux , ou, fuivant eux  ,  ces Génies malfaifants  
 habitent les grandes Montagnes , & particulièrement  les- Volcans;  
 auffi riofent-ils s’en approcher.  Ils prétendent que ces mauvais Génies  
 vivent desPoiffons qu’ils  attrapent  à  la pêche ;  ils defcendent  
 pendant  la  nuit  des Montagnes, & volent jufqua  la  Mer  pour y  
 chercher leur nourriture ;  ils emportent un Poiflon à chaque doigt,  
 ils les font cuire à  la  façon  des  Kamtchadals , & ils  fe  fervent de  
 graillé & d’os de Baleine, au lieu de bois.  Lorfque les Kamtchadals  
 pallènt par ces lieux,  ils y jettent toujours quelque  viéluaille  qu’ils  
 offrent  à ces mauvais Génies. 
 Les Dieux desBois s’appellent Quchaktchoü. Ilsdifent qu’ilsref-  
 femblent aux Hommes ; que leurs Femmes portent des Enfants qui  
 croiffent  fur leur dos , & qui pleurent fans celle.  Ces Efprits,  fui  
 vant l’opinion  fuperfticieufe de  ces  Peuples, égarent les  Hommes  
 de leur chemin, & leur font perdre l’efprit. 
 ■ Ils  appellent  le  Dieu  de  la  Mer  Mitg  ;  ils  lui  donnent  la  
 forme d’un Poiffon. Son Empire s’étend fur la  Mer & fur  les Poif-  
 fons ; il envoie les poiflbns dans lesrivieres, afin qu’ils y prennent du  
 bois pour  lui  conftruiredes Canots, & jamais dans l’intention qu’ils  
 fervent  de nourriture  aux  Hommes ; car  ces Peuples  ne  peuvent  
 croire qu’un Dieu puiffe leur faire du bien. 
 Ils racontent plufieurs fables fur Piliatehoutehi, dont nous avons  
 déjà parlé, &  que M. Steller appelle Bilioukai.  Ils  difent  qu’il habite  
 fur  les  nuées  avec plufieurs  Kamouli ,  que  c’eft  lui  qui fait  
 briller les éclairs, qu’il lance la foudre, & fait tomber la pluie. Us regardent  
 l’arc-en-ciel comme la bordure de fon habit. Ce Dieu, à ce 
 qü’ils  imaginent,  defcend  quelquefois  des  nuages  fur  les montagnes, 
   &  il  eft  dans  un  traîneau  tiré  par  des  perdrix.  11$  regardent  
 comme  un  grand  bonheur  d’àppereevoir  les  prétendus  
 traces que laiffe ce Bilioukai 5 elles ne font  autre  chofe que  de petits  
 filions que  le vent a laiffés fur la furface de la neige ;  ce qui arrive  
 fur-tout dans les ouragans : ils craignent aufli ce Dieu.  Ils prétendent  
 qu’il fait enlever leurs Enfants  dans des tourbillons  par fes  
 Satellites, pour  lui  fervir de  bras  ou de girandoles,  fur  lefquels il  
 fait mettre des  lampes remplies de graiffe  pour  éclairer  fon  Palais.  
 Sa femme eft appellée Tiranous. 
 Us reconnoiffent auifi un démon, fuivant M. Steller ; ils le repré-  
 fentent très rufé & trompeur ; ils l’appellent par cette raifon Kanna.  
 On montre  aux environs de l’Oftrog inférieur du Kamtchatka, uni  
 aune fort  élevé &  fort vieux, qui paffe pour  être  fa demeure.  Les  
 Kamtchadals décochent  toutes les  années des fléchés  contre cet arbre  
 ;~de forte qu’il en eft entièrement hériffé. 
 Gaetch eft, a ce qu’ils prétendent, le chef du monde fouterrain ,  
 où les hommes vont habiter après leur mort. Il a autrefois habité la'  
 terre ;  ils  donnent  à un des premiers  enfants  de  Koutkhou  l’empire  
 fur les vents, & ils attribuent à  fa femme Savina la création  de  
 l’Aurore & du Crépufcule. 
 Us  regardent  leur  Dieu  Touila,  comme  fauteur  dés  tremblements  
 de terre ,  étant perfuadés  qu’ils proviennent  de  ce que  fore  
 chien Ko^ei , qui le traîne quand il va fous  terre ,  fecoue la  neige  
 qu’il a fur le Corps. 
 Toutes les idées qu’ils ont de leurs  Dieux , &  de  leurs Démons  
 ou mauvais Génies,  font fans liaifon, fi abfurdes & fi ridicules, que  
 ceux qui ne connoiffent pas  ces Peuples auront de la peine à croire  
 ces faits ; ils tâchent cependant de rendre raifon le mieux qu’ils peuvent  
 de  tout ce  qui exïfte  :  ils cherchent  même à pénétrer ce que  
 peuvent penfer les Poillous &' les Oifeaux ; mais ils ont le défaut de