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ils ont fait Krioukij des Crochets ; du mot Ououtou, ils ont fait
Qtitka , Canard ; de Kalikigue , ils- ont fait Kaliliki ; du mot
Kougi, ils ont fait Kourile , Habitant des Mes Kouriles, &e.
Quant à l’origine des Kamtchadals, à leur tranfmigration ,
Si aux lieux qu’ils ont d’abord habités, nous ne pouvons rien,
dire de pofitif à cet égard. Ces Peuples eux-mêmes n’en fa-
vent rien , Si n’ont d’autres preuves de leur ancienneté que des
traditions fabuleufes. Ils prétendent avoir été créés dans l’endroit
qu’ils habitent, par le Dieu Koutkou même , qui autrefois habitoic
le Ciel 3 comme on le dira dans la fuite : aufli le réverent-ils
comme le Créateur , & l’Auteur de leur Race.
Cependant les moeurs des Kamtchadals , leurs penchants , leurs
inclinations, leur extérieur , leurs coutumes , leur langue, leurs
noms, leurs habillements & d’autres circonftances, nous donnent
lieu de croire que ces Peuples font anciennement fortis de la Mun-
galie , pour s'établir dans les lieux qu’ils habitent. Voici les preuves
que donne M. Steller pour appuyer fon opinion.
Io. Les Kamtchadals n’ont aucune eonnoilfance de leur origine
, ils ont perdu toute tradition, Si c’eft-là ce qui leur a donné
lieu de croire que Koutkou les avoir créés dans ce Pays.
i° . Avant que les Ruflés vinflént chez eux , ils ne eonnoiffoient
d’autres Nations que leurs voifins les Koriaques & les Tchouktchi.
11 n’y avoit pas long-temps qu’ils avoient eonnoilfance des Japonois
Si des Kouriles , foit par le trafic qu’ils faifoient avec ceux-ci, foie
parce que des Vaifléaux Japonois avoient quelquefois été jettés fur
leurs Côtes.
3 °. Les Kamtchadals étoient très nombreux , quoique chaque
année il en périlfe une grande quantité, par la neige qui tombe des
Montagnes, par les ouragans , par les Bêtes féroces , par les inondations
, par le fuicide, & enfin par les guerres fréquentes qu’ils fe
font entr’eux.
4°- Ils ont une parfaire eonnoilfance des vertus Si de chaque propriété
des produ£Hons naturelles de leur Pays ; ce qui fuppofe une
longue expérience , principalement dans un Pays où la longueur
deTHiver & la brièveté de l’Eté ne laiflént pas plus de quatre mois
pour faire ces fortes d’obfervations. Encore faut-il qu’ils emploient
une partie de ce temps à la Pêche , qui eft leur principale occupation
, & d’où dépend leur nourriture pendanr l’hiver.
y0. Les inftruments Sc tous les uftenfiles dont ils fe fervent dans
leurs maifons , font différents de ceux des autres Nations. Mais vu
leurs befoins Si les différentes circonftances de leur maniéré de vivre
, ils font faits avec tant d’adrelfo , qu’un homme même ingénieux
, qui ne les auroit jamais vus , auroit bien de la peine à en.
inventer de pareils. Telle eft, par exemple , la façon dont ils font
tirer leurs traîneaux par les chiens , &c.
6°. Les Kamtchadals font greffiers dans leurs moeurs ; leurs inclinations
ne différent point de 1’inftinift des Bêtes ; ils font confif-
ter le fouverain bonheur dans les plaifirs corporels ; Si ils n’ont aucune
idée de la fpiritualité de l’ame.
Voici les raifons qui peuvent encore nous faire croire ;que ces
'Peuples tirent leur origine des Mungales, & qu’ils ne viennent ni
des Tartares qui habitent en deçà du Fleuve Amour , ni des Kouriles
, ni des Japonois. Il femble qu’ils ne peuvent point defeendre
des Tartares , parce que certainement, dans leur tranfmigration,
ils n auraient pas manqué de s’emparer de la partie des bords de la
Lena ,-qui eft actuellement au pouvoir des Iakoutes Si des Tun-
goufes , puifque ces Pays étoient alors déferts , & que par leur fertilité
ils dévoient naturellement leur mieux convenir que le Kamtchatka.
On dira peut-être queffedtivement -ils habitaient le long
de k Lena, Si que dans la fuite ils en ont été chaffés par les Iakoutes
, comme-les Tungoufes qui habitent préfentement entre les
Peuples Bratski & Iakoutes. Mais nous répondrons que les Ia-
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