qui habitent dans dés Iflës éloignées les unes des autres. L'Eu-an,
gerquieft venu fur des canots , & celui qui eft forti de fa Iourte
pour l’aller recevoir, marchent avec beaucoup de cérémonie. Chacun
endoilè fes habits de guerre, prend fes armes & agite fon fabre
& fa lance. Ils bandent leur arc l’un contre l’autre , comme s’ils
alloient combattre , & ils s’approchent en danfant. Lorfqu’ils fe
font joints, ils fe donnent toutes fortes de marques d’amitié ; ils
s’embraifent avec les plus grandes démonftrations de tendefle ;
ils fe font réciproquement toutes fortes de carelfes , & verfent des
larmes de joie. Après cela ils conduifent leurs Convives dans leur
habitation , les font aiTeoir & les régalent, fe tenant debout devant
eux, & ils écoutent le récit des aventures qui leur font arrivées
pendant le temps qu’ils ne fe font point vus les uns les autres ; c’eft
toujours le plus âgé qui eft chargé de porter la parole. Us racontent
jufqu’aux moindres circonftancés de leurs chalTes, la maniéré
dont ils ont vécu, leurs voyages, ce qu’ils ont vu , le bonheur oule
malheur qui leur eft arrivé, qui font ceux qui ont été malades, ou ;
qui font morts, & quelle a été la caufe de leur maladie ou de leur
mort. Ce récit dure quelquefois plus de trois heures , & les autres
l’écoutent avec attention. Lorfque le Convive a fini de parler, le plus
âgé de ceux de l’habitation fait auffi à fon tour le récit de tout ce qui
leur eft arrivé : jufqu’à ce moment il n’eft permis à perfonne dt
parler. Après ces récits, ils s’affligent ou fe réjouilfent, fuivant la
nature des nouvelles qu'ils viennent d’apprendre. Enfin ils célèbrent
la Fête fuivant leur ufagg, mangent, danfent, chantent &
racontent deshiftoirës,
A l’égard des autres ufages qu’ils obfervent, foit qu’ils recherchent
une fille en mariage, foit dans leurs noces , foit a
la naiifance de leurs enfants, comme dans leur éducation } il*
font les mêmes que ceux des Kamtchadals. Ils ont jufqu a deux ou
trois femmes 5 ils ne vont les voir que pendant la nuit, comme à
la dérobée , à l’exemple des Tartares Mahométans , qui ne viennent
jamais voir que furtivement leurs Future? , jufqu a ce qu’ils
aient payé au pereje prix dont ils font convenus pour les obtenir.
Ils ont auffi des Koektchoutchi ou Concubines, comme les Ko-
riaques & les Kamtchadals.
Si quelqu’un eftfurpris en adultéré, les deux hommes fe battent
en duel avec des bâtons, de la maniéré fingulierë que voici. Le
mari de la femme adultéré appelle en duel fon adverfaire ; tous les
deux fe dépouillent de leurs habits fe mettent tout nuds. Celui
qui a fait l’appel, doit le premier recevoir fur l’épine du dos de
la part de fon adverfaire , trois coups d’un bâton qui eft à-peu-
près de la grollèur du bras , & environ de la longueur d’une ar-
chine ( ou de trois pieds ). Il reprend enfuite cette efpece de mat
fue, & frappe ion ennemi de la même maniéré ; ils y vont de toutes
leurs forces, & continuent ce manège tour à tour jufqua trois
reprifes différentes : ce combat coûte la vie à beaucoup d’entr’eux.
Le refus de ce duel feroit un deshonneur auffi grand dans leur façon
de penfer, que l’eft parmi quelques Peuples de l’Europe celui de fe
Lattre àl’épée. S’il fe trouve quelqu’un, qui dans de pareilles ciiv
confiances, préférant fa vie à fon honneur, refufe le combat, il
doit payer au mari de la femme adultéré tel dédommagement qu’il
exigé, foit en bêtes, habits , provifions de bouche, ou en autres
chofes,
Les femmes Kouriles accouchent plus difficilement que celles du
Kamtchatka , puifque de l’aveu même des Kouriles , il leur faut
trois mois pour fe rétablir. Ce font les Sages-F.emmes qui donnent
le nom aux enfants, Quand il y a deux jumeaux, on en fait toujours
périr un, .
Tome II; Y