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leur répondirent que par des injures & des invectives. Khartchin
fur-tout fe moquoit d’eux, & leur crioit du haut des remparts : Que
venez-vous faire ici ? Ignorez-vous que c’ ejl moi qui fais Comajf-
faire du Kamtchatka ? Je lèverai déformais les taxes fans vous, <§
vous n’êtes plus nécejfaires dans ce pays. On fut obligé de faire venir
quelques canons du vaiffeau ; & le de Juillet on commença
à battre le Fort avec tant de fuceès, qu’il y eut bientôt de grandes
breches. Les alfiégés en furent il confternés, que les femmes qui
étoient reliées prifonnieres en profitèrent pour s’échapper.
Khartchin voyant qu’il étoit hors d’état de réfifter, fe fauva dé-
guifé en femme. On le pourfuivit, mais on ne put l’atteindre : il
étoit fi léger à la courfe, qu’il pouvoit courir aulfi vîte que les Rennes
fauvages. Cela m’a été confirmé par plufieurs Cofaques, &
même par fon frere qui vivoit encore lorfque j’étois dans ce pays,
Trente hommes des alfiégés fe rendirent ; les autres furent tues :
mais Tchegetch, un des Chefs des environs dé Klioutchi, fe défendit
, avec un petit nombre des liens, jufqu-au dernier moment.
Le feu prit alors au magafin à poudre , & la Fortereffe, fut réduite
en cendres,, avec tous les effets & toutes; les richeffes qu’elle
renfermoit. Les Cofaques perdirent quatre hommes en montant
à l’alfaut, & en eurent quantité de bielles. On né put favoir à
quoi fe monta la perte-des Kamtchadals, parce que les cadavres de
ceux qui avoient été tués, furent confirmés par les flammes. Ceux
qui s’étoient rendus prifonniers avant qu’on montât à l’alTaut, furent
aulfi malfacrés. Les Cofaques, irrités des outrages faits à leurs femmes,
& de la perte de tous leurs effets & deleursbiens, les pafferent
tous au fil de l’épée, fans en épargner un feul-
■Le retour fubit des Ruffes contribua beaucoup à appaifer la révolte
dans fa naifiànce, en empêchant que l’incendie ne s’étendît
plus loin : autrement les Kamtchadals de l’Ollrog Kamakow, qui
fe montoient à plus de cent habitants, fe feraient joints à eux ; àc
quantité d’autres petites habitations fe feraient empreffées de fuivre
cet exemple, pour fe foullraire au danger dont elles étoient menacées.
Mais voyant les Ruffes de retour, ils furent obligés d’attendre
le dénouement de cette cataftrophe , en feignant de leur
être fideles, ou du moins d’être neutres. Cependant ces avantages
remportés fur les rebelles n’avofènt encore rien décidé. Khartchin
setant raffemblé en force avec plufieurs Chefs , prit le parti
de s’avancer du côté de la mer & d’attaquer les Ruffes. Il venait
de fe mettre en marche , lorfqu’il fut rencontré par ces derniers
, qui l’obligerent, après un léger combat, de fe retirer fur une
hauteur. Il fe retrancha fur la rive gauche de la riviere Klioutchi,
où le combat s’étoit donné, & les Cofaques campèrent fur la rive
droit*.
Khartchin eut beau mettre tout en ctuvre pour épouvanter les
Ruffes & les forcer à regagner la mer ; ceux-ci, loin de témoignai
la moindre crainte, ne cefferent de l’exhorter, lui & fes camarades,
à fe rendre. Enfin ils firent tant que Khartchin, un autre Chef &
fon frere, prêtèrent l’oreille à leurs propofitions. Kharchin parut
fur le bord de la riviere, & fie connoître qu’il fouhaitoit paifer dans
le camp des Cofaques , demandant qu’on donnât un otage pour fureté
de fa perforthe ; à quoi l’on confentit. Lorfqu’il fut dans le camp,
il demanda- qu’on épargnât les Kamtchadals 3 ajoutant que- pour lui
il vouloir vivre en paix, & qu’il âlloit engager fes parents & ceux
de fon parti à fuivre fon exemple. On le laiffa aller. Il envoya dire
qu’ils ne voulaient point entendre parler de paix : fon frere & un
autre Chef nommé Tawateh qui l’avoient accompagné, ne voulurent
plus retourner avec les leurs.
Le lendemain Khartchin parut fur le bord de la riviere aivec quelques
autres Chefs, priant les Cofaques de le paffer de leur côté, &
d’envoyer deux hommes pour otages. Pour le mieux tromper, ils,
feignirent d’y confentir 3 mais il ne fut pas plutôt defeendu à terre,