des nattes qui leur fervent de couvertures & de rideaux.Les meilleures
couvertures font faites avec des carreaux ou avec d’autres figures qui
font entrelacées de fanons ou barbes de Baleine coupées en petits
morceaux. Ils font auiïi de cette herbe des manteaux tout-à-fait fetn-
blables aux anciens manteaux qu’on portoit autrefois en Ruflie : ils
font unis & liiles d’un côté , & velus de l’autre, afin que la pluie
puiife gliifer deifus. De tous les ouvrages qu’ils font avec cette
herbe, les plus parfaits & les plus jolis font de petits facs & de petites
corbeilles dans lefquels les femmes mettent les bagatelles qui
leur font nécelfaires : ils font travaillés avec tant d’art, qu’il n’y a
perfonne qui, au premier coup d’oeuil, ne croie qu’ils font faits
de canne. Ils font ornés de fanons de Baleine & de laine de différentes
couleurs. Quand elle eft verte , ils en font de grands
facs pour mettre leurs Poiilons, l’Herbe douce , le Kiprei & les
autres Provifions. Ils fe fervent auflï de cette Plante, de même
que de toutes les autres grandes herbes, pour couvrir leurs cabanes
& leurs habitations d’Eté Sc d’Hiver : ils la coupent avec une
efpece de faulx ou faucille faite d’une omoplate de baleine : ils
la rendent fi tranchante , en l’aiguifant fur des pierres, qu’ils
peuvent faucher une grande quantité d’herbes en fort peu de
temps.
La plante appellée Bolotnaïa, qui croît dans les marais, reiTem-
ble une peu à celle appellée Ofoka ( Cyperoides) : ils la préparent
pendant l’Automne, & la cardent de même que le lin, avec un
peigne à plufieurs dents, fait d’os d’Hirondelle de mer ; & voici lu-
fage qu’ils en font.
i e. Au défaut de chemifes & de langes, ils enveloppent dans
cette herbe , qui eft comme une efpece de Ouate, les enfants qui
viennent de naître.
i°. Ils la mettent fur l’ouverture qu’on laiife derrière leufs lan-,
ges j & lorfqu’elle eft humide, ils la retirent & la changent.
3°. Elle leur tient lieu de bas, & ils s’en entortillent les jambes
avec tant d adreife , qu’elle colle deifus comme un bas.
4°. Comme les femmes de ce Pays s’imaginent que la chaleur
lépândue dans les parties de la génération eft la eaufe de la fécondité
, elles emploient cette plante pour produire cet effet : elles en
font ufage fur-tout dans les temps périodiques,
y». On s’en fert aufli pour faire du feu, àu-lieu de charbon.
6°. Dans les grandes fêtes, ils en font des guirlandes & des couronnes,
qu’ils mettent au cou & fur la tête de leurs Idoles.
70. Lorfqu’ils font des offrandes , ou qu’ils tuent quelques animaux,
ils mettent à la viétime une couronne faite de cette plante,
afin qu’elle ne foit point irritée & ne faffe point de plainte à leurs
Parents. Ils faifoient autrefois la même chofefurla tête de leurs ennemis
, dont les Ruffes étoient du nombre : ils mettoient des couronnes
de cette plante, faifoient des fortiléges fur ces couronnes,
fuivant leur coutume fuperftitieufe, & les attachoient au bout d’une
perche. Cette herbe eft appellée Tonchitch & Miataia trava par les
Coliques. Les Kamtchadals deBolchaia Reka l’appellent Ègei ïS£
furies bords de la riviere du Kamtchatka elle eft appellée limt.
L’ortie eft dans ce Pays la principale plante pour l’ufage delà vie 3
car comme il n’y croît point de chanvre ni de lin , ils ne pourraient
fe palier de filets pour prendre des poiffons, qui fuppléent au défaut
de bled. Ils arrachent l’ortie dans le mois de Septembre, ou
meme dans le mois d’Août ; ils la lient en paquets & la font fécher
fous leurs Balaganes, ou huttes d’Eté. Lorfque le temps de la pêche
ell palfé, & qu’ils ont fait leurs provifions de baies & de racines, ils
fe mettent à la préparer ; ils la coupent en deux, ils en arrachent
fort adroitement l’écorce avec les dents, la battent, la nettoient,
la filent enfuite entre leurs mains, & entortillent le fil autour d’un
fufeau. Le fil qui n’eft point retors, leur fert pour coudre ; mais ils
retordent celui dont ils doivent faire leurs filets. Malgré cette pré