nombre des ennemis, puifqu’ils fe flattoient de prendre avec facilité
tous les Ruffes,
Leurs armes confiftent en arcs, fléchés, lances, piques Sc cottes de
maille. L’arc eft fait de bois de Mélefe ( I ) ; il eft couvert d ecorce
de bouleau, Sc les cordes font de nerfs de baleine. Les fléchés font
ordinairement de la longueur d’une Archine trois quarts, Sc font armées
de pointes faites d’os ou de pierres. Us les nomment différemment
, füivant la différence des bouts dont elles font garnies.
Une fleche avec un bout mince d’os eft appellée Pineh ; quand il
eft large Aglpinch ; lorfque le bout eft de pierre , Kauglatch, Sec,
Quoique leurs fléchés foient fort mauvaifes Sc mal faites, cependant
elles font très dangereufes , parce qu’elles font empoifonnées ; ce
qui fait enfler aufli-tôt la partie blefTée. Celui qui eft dans ce cas ,
meurt ordinairement dans les vingt-quatre heures , & il n’y a d’autre
remede que de fucer le poifon de la bleffure.
Leurs.lances font armées d’os ou de cailloux , comme on l’a deja
dit. Les piques , qu’ils appellent Oukarel, font armées de quatre
pointes ; elles font attachées à un manche que l’on fiche au bout de
longues
Leurs cottes d armes ou cuiralleslont faites de nattes,
ou de cuir de veau ou de cheval marin, qu’ils coupent en lanieres Sc
qu’ils joignent l’une fur l’autre de façon qu’elles peuvent fe plies
comme des baleines. Us les mettent du côté gauche, & les lient fur
le côté droit, comme unecamifole. De plus ils s’attachent deux ais
ou petites planches : celle de derrière eft plus haute ; elle fert a garantir
la tête , & l’autre met la poitrine à couvert.
Us ne fe fervent de leurs Chiens & de leurs traîneaux que pour
les longues marches, ou pour des voyages ; mais quand ils ne vont
pas loin, ils marchent à pied. Pendant l’Eté, ils fe fervent ordinaiperches.
renient de grands Canots qui peuvent contenir plufieurs perfonnes.
Une chofe fort finguliere, e’eft que lorfqu’ils marchent à pied ,
ils ne vont jamais deux de front, mais toujours feuls ; en allant à la
fíleles uns des autres, ils fuivënt toujours le même fentier, qui parla
devient fort creux & profond ; quelqu’un qui n’y feroit pas accoutumé
, ne pourrait y marcher qu’avec une extrême difficulté,
vu qu’ils font fort étroits, & qu’il n y a de place que pour y mettre
un pied à la fois ; car ces Peuples ne marchent qu’en mettant toujours
un pied précifément devant l’autre, & prefque fur la même
ligne.
M. Steller attribue la caufe des guerres inteftines qui régnent
entre ces Nations, à la haine & à la paffion de pofféder ce qui
peut flatter leurs fens. Nous dirons quelque chofe ici de fon opinion.
Quoiqu’il n’y eut point ci-devant de Chef, dit-il, au Kamtchatka,
Si que chacun y vécût dans l’indépendance , cependant deux paf-
fions, la haine & la cupidité, étoient caufe que les Kamtchadals
troubloient eux-mêmes leur repos & leur tranquillité en fe faifant la
guerre. Us fe détruifoient de temps en temps, Sc s’afFoibliifoient
confidérablement. Les femmes, l’ambition , l’envie de dominer ,
le befoin d’uftenfiles Sc des chofes néceffaires à la vie , les armoient
les uns contre les autres. Pour être en état de réfifter à l’ennemi,
ils fe foumettoient aux plus vieux , aux plus courageux Sc aux plus
prudents- Lorfqu’ils avoient remporté quelques victoires , ils montraient
à leurs Chefs tout l’attachement Sc le zele qu’il falloit pour
le but qu ils fe propofoient ; ce but confiftoit à augmenter leur puif-
lànce , a iatisfaire leur vengeance , à faire un grand butin Sc à partager
entre eux avec égalité les dépouilles de leurs ennemis.
- On trouve donc chez ces Peuples des preuves qu’ils Ont eu quelques
idees élevees ,'qu’ils ont afpiréà devenir conquérants, ce qui a
été caufe que la Nation s’eft diyifée en plufieurs branches également