auiïi-tôc, & les brûloienttous. Par ces ftratagêmes, ils firent périt
en deux endroits près de foixante-dix Cofaques ; ce qui, eu égard
au petit nombre de Soldats qui font dans ce Pays, peut être regardé
comme une grande perte pour les Ruflés. Il eft même quelquefois
arrivé que les Kamtchadals n’ayant point trouvé roecafion
de faire périr les Cofaques lorfqu’ils étoient venus les aifujettir pour
la première fois, payoient le tribut pendant deux ou trois années ,
& qu’ils égorgeoient enfuite ceux qui venoient en petit nombre
pour le recevoir.
Mais ces ftratagêmes autrefois fi funeftes aux Cofaques, les engagent
àfe tenir aujourd’hui fur leurs gardes. Us ne craignent jamais
plus les Kamtchadals, que quand ceux-ci les reçoivent avec grande
politeffe, & qu’ils leur font des careffes ; ils regardent cetaccoeuil
comme une marque infaillible de perfidie. Us ont les mêmes craintes
lorfque les femmes Kamtehadales fortent pendant la nuit de leurs
Iourtes ; car elles ne peuvent voir répandre le fang, & leurs Maris
ne tuent jamais perfonne en leur préfence, Lorfque les Kamtchadals
racontent leurs fonges , qu’ils ont vu des morts, & lorfqu’Hs vont
au loin fe vifiter les uns les autres, c’eft encore un indice qu’ils
trament quelque trahifon , ou qu’ils font prêts à fe révolter, & que
plufieurs Oftrogs ou Habitations font du complot.
Lorfque l’entreprife réuffit, les Kamtchadals égorgent tous les
Cofaques qu’ils rencontreht ,.auffi-bien que ceux de leurs Compas
triotes qui n’entrent point dans la révoke. S’ils apprennent qu’on
fait marcher des troupes contr’eux , ils ne fê préparent pas à fe défendre
en allant à leur rencontre; mais ils choififfent les endroits les
plus élevés & les plus efcarpés, y bâtiffent de petits Forts ou Oftrogs
, s’y retranchent & y attendent leurs ennemis. Us réfiftenc
avec valeur à ceux qui les attaquent, leur tirant des flèches, & employant
toutes fortes de moyens pour fe défendre. Lorfqu’ils voient
que 1 ennemi al avantage fur eux, Se qu’ils font hors d’état de réfifter,
chaque Kamtchadal commence par égorger fa Femme Sc fes
Enfants ; il fe jette enfuite dans des précipices, ou s’élance au milieu
des ennemis les armes à la main , pour ne pas mourir fans fe venger :
ils appellent cette action dans leur langue,y?faire un lit. En 1740,
on m’amena une Fille d’Outkolok, que les Rebelles de cet endroit
n’avoient pas eu le temps d’égorger, lorfqu’on emporta d’aifaut
leur habitation. Toutes les autres Femmes, depuis la plus âgée
jufqu’à la plus jeune , furent maflacrées, & les Rebelles fe précipitèrent
dans la Mer, du haut de la Montagne fur laquelle ils
s’étoient réfugiés.
Depuis le commencement de la conquête du Kamtchatka , il n’y
a eu que deux révoltes. La première arriva l’an 1 7 10 ,! Bolcherets-
koï Oftrog, & la fécondé en 17.1 3 , lorfqu’on envoyoit des troupes
pour foumêttre les Kamtchadals d’Awatcha. Ces révoltes leur ont
été toutes deux très funeftes. Dans la première , ils affiégerent Bol-
(heretskoï, avec tant de confiance dans leur grand nombre , qu’ils
fe vantpient d’ étouffer avec leurs bonnets feulement, les Cofaques
qui ( é t o i e n t renfermés dans cet Oftrog, au nombre de
foixante-dix. Cependant trente-cinq d’entr’eux firent une fprtie ;
&ç les Kamtchadals n’ayant pu fupporter leur choc , prirent la
fuite, & chacun chercha à fe fauver comme il put. En voulant
regagner leurs canots , ils s’y jettojent avec tant de précipitation,
qu’il s’en néya un grand nombre,, On tua dans cette occafîon une fi
grande quantité de Kamtchadals, que la riviere étoit couverte de corps
morts. Les Rebelles d’Awatcha n’avoienr pas moins d’efpéranee de
vaincre les Ruffes qui marchoient çontr’eux, puifqu’ils s’époient
munis de courroies pour les lier & les emmener ; mais il en arriva
tout autrement, ils furent eux-mêmes tués ou faits prifonniers, On
A voit envoyé cent vingt Coiàquesà l’expédition d’Awatcha, ¢
cinquante - amtchadals fideles ; ce qui peut faire juger quel ççoip le
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