D e s c r i p t i o n
& fi les endroits fitués depuis la pointe méridionale, en approchant
davantage du Nord , font plus abondants en bois & plus fertiles ;
c’eft parce que le Cap Tchoukotsk & la terre que l’on a remarquée
vis-à-vis t les mettent à couvert de la violence de ces vents.
C ’eft par la même raifon que l’on voit le poilfon remonter dans
les rivieres de l’Amérique plutôt que dans celle de Kamtchatka.
On y en a vu le zo Juillet une quantité prodigieufe , au-lieu que
dans tout ce temps-là il ne fait que commencer à parortre dans
cette derniere contrée.
On trouve auiïi fur les côtes de l’Amérique une efpece inconnue
de framboifes, dont les fruits font d’une groifeur & dun goût
particulier. D ’ailleurs on y voit des Gimoloft (i) , des Goulou-
bitfi (a), desTchernitfi (3), desBroufnitfi (4), des Chikchi (y) en
auffi grande quantité qu’au Kamtchatka.
Les naturels du Pays trouvent une allez grande quantité de Bêtes
propres à leur iiibfiftance ; c’eft-à-dire des Veaux, des Caftors marins
, des Baleines, des Akouli, des Marmotes, des Renards rouges
& noirs, qui ne font pas fi fauvages qu’ailleurs , par la raifon que
Ion en prend peut-être fort peu.
Parmi les Oifeaux connus, il y a des Pies , des Corbeaux, des
Hirondelles de mer ou Cormorans , des Canards de l’efpece appel
lée Ourïl, des Cygnes , des Canards ordinaires , des Plongeons,
des Bécalfes , des Pigeons de Groenland , des Mitchagatki ou
Canards du Nord , & plus de dix autres efpeces qui nous font inconnues.
On les diftingue aifémént de ceux de l’Europe par leur
couleur qui eft beaucoup plus vive.
Les Habitants de cette contrée font auffi fauvages que les Koria-
ques & les Tchouktehi ; ils font épais, trapus & robuftes ; ils ont fe
épaules larges ; leur taille eft moyenne ; leurs cheveux font noirs &
(1) Loriieerapedumulis bifîoris. Gmeî. £ 56. (1) M'utillusgrandis. (3) Wacdniuoi
ntgruiru (4) Faccinium*. linru Su.ec. Species j. (5-) Empetrum*
pendants; ils les portent épars : leur vifage eft plat & bafanné ;leurs
nez font écrafés fans être fort larges ; ils ont les yeux noirs comme
du charbon ; les levres épaiffes, peu de barbe & le cou court.
Ils portent des efpeces de chemifes avec des manches, elles leur def-
cendentau-deffous des genoux. Au lieu de ceintures, ils fe fervent de
courroies qu’ils attachent au-deifous du ventre.Leurs culottes & leurs
bottes ou chauffures font faites de peaux de Veau marin teinte avec
del’écorce d’aune; elles relfemblent beaucoup à celles des Kamtcha-
dals. Ils pendent à leur ceinture des couteaux de fer avec des manches
pareils à ceux que portent nos Payfans. Leurs chapeaux font
faits d’herbes entrelacées comme ceux des Kamtchadals ; non en
pointe, mais en forme de parafol : ils les peignent de verd & de rouge,
& les ornent par devant avec des plumes de Faucon , ou avec de
l’herbe frifée en forme de panache , tels qu’en portent les Américains
aux environs du Brefil. Ils fe nourrilfent de poiffons, de bêtes
marines & d’herbe douce, qu’ils apprêtent comme les Kamtchadals,
ils font encore fécher l’écorcc de peuplier & de pin. Dans les cas
de néceffité on mange de ces écorces non-feulement au Kamtchat-
J ka, mais dans toute la Sibérie & dans quelques contrées même de
laRuffie jufqu’à Viatka, Ville proche de Tobolsk. On a remarqué
auffi chez eux de l’Algue qu’ils avoient amaflfée en monceaux ; elle
reifemble à une courroie de cuir, & en a la dureté. Ils ne connoif-
fent ni l’ufage de l’eau-de-vie , ni celui du tabac ; ce qui prouve
qu’ils n’ont eu jufqu’ici aucun commerce avec les Européens.
Ils regardent comme un ornement particulier de fe faire des trous
dans les joues, & d’y mettre des pierres de différentes couleurs ou des
morceaux d’ivoire. Quelquesruns fe mettent dans les narines des
crayons d’ardoife delà longueur d’environ deux verchoks ; quelques
•autres portent des os d’une égale grandeur fous lalevre inférieure : il
yen a qui en portent de femblables fur leur front.
Les Naturels des Ifl.es qui font aux.environs du Çap Tchoukotsk.,