les Caftors, les Lions marins, les Baleines , & le poiffon qu’au
appelle Orca.
Us grimpent fur les rochers & les montagnes comme les Veaux
marins : ils les failîifent avec leurs pattes de devant, en fe courbant
le corps & baiffant la tête, afin de fe plier avec plus de facilité.
Ces animaux, & fur-tout les femelles, nagent avec tant de rapidité,
que je ne crois pas que l’homme le plus agile à la courfe puiife courir
auffi vîte. S’ils couroient avec la même rapidité qu’ils nagent, ils
feroient périr beaucoup de perfonnes ; néanmoins il eft toujours
dangereux de fe battre avec eux dans une plaine, parce qu’on ne
leur échappe qu’avec peine ; ou du moins on ne fe met hors du
danger qu’en montant fur des endroits élevés, où ils ne peuvent
grimper que lentement.
Il y en a une fi grande quantité dans l’Ifle de Béring, que les
rivages en font couverts ; & pour les éviter, on eft fouvent obligé
d’abandonner le chemin le plus commode, & de paffer à travers les
rochers & les endroits les plus difficiles.
Les Caftors marins les craignent beaucoup, & l’on en voit rarement
parmi eux, non plus que des Veaux marins ; au-lieu que les
Lions marins vivent au milieu d’eux en grande troupe, malgré les
dangers qu'ils ont à craindre de leur part. Les Lions marins s’emparent
toujours des endroits les plus favorables, & les Chats marins
font rarement les agreffeurs, dans la crainte où ils font de leurs cruels
médiateurs; car on a obfervé que pendant le temps du combat, les
Lions marins profitoient de cette occafîon pour les attaquer. Les
Chats marins n’ofent même empêcher leurs femelles de jouer avec
les Lions marins.
Ce qui mérite d’être remarqué c’eft qu’on ne trouve pas de Chats
marins aux environs de toute l’Iile de Béring, comme on y voit des
Vaches marines, des Caftors, des Veaux & des Lions marins ; on
n’en rencontre qu’aux environs de la côte méridionale de cette Ifle ,
qui eft du côté du Kamtchatka. La raifon de cela eft que c’eft la
première terre qu’ils rencontrent en quittant le Cap Kronotskoi
pour s’avancer du côté de l’Orient ; & l’on ne voit fur la côte fep-
tentrionale de cette Ifle que ceux qui fe font égarés.
Voici la maniéré dont les attrapoient ceux qui pafferent l’hiver
dans l’Ifle de Béring. On commenqoit par leur crever les yeux à
coups de pierres, après quoi on les affommoit avec de gros bâtons :
mais ces animaux ont la vie fi dure, que deux ou trois hommes ont
de la peine à les tuer en leur donnant plus de deux cents coups fur
la tête avec de gros bâtons. On eft même obligé de reprendre haleine
à deux ou trois reprifes différentes ; & quoique toutes leurs
dents foient caffées , qu’on leur ait brifé le crâne , & que leur
cervelle forte prefque de tous côtés, cependant ils fe tiennent fur
leurs pieds de derrière, & fe défendent encore. On voulut faire l’épreuve
d’en laiffer aller un qu’on avoit mis dans cet état , il vécut
encore plus de deux femaines, pendant lefquelles il refta toujours
dans la même place comme une ftatue.
On voit rarement ces animaux venir fur les côtes aux environs
du Kamtchatka, de forte qu’on les prend fur mer avec de grands
canots ou baidares. On fait ufage pour cela d’un inftrument ordinairement
appellé harpon, qui eft femblable à une petite pique,
& qui fe fiche au bout d’une perche longue , afin de pouvoir
s’enfervir, comme d’un dard ou javelot, lorfqu’on eft proche
de l’animal " mais comme le fer de ce harpon ne tient point au
manche , le fer refte feul dans le corps de l’animal, & le bois fe
détache aifément du harpon. Une courroie très longue qui y eft
attachée , fert à tirer vers le canot l’animal bleffé ; mais on prend
bien garde qu’il ne faififfe l’extrémité du canot avec les pattes de
devant, & que par ce moyen il ne le renverfe. Pour prévenir cec
accident, quelques-uns des Pêcheurs fe tiennent tout prêts avec des
K k k i j