travers ces traces on tend une ficelle : cette ficelle, aufli-tot que quel-
que animal la touche de fes pattes de devant, fait débander l’atc ; la
fleche part & vient lui percer le coeur.
Ce font-là les moyens dont les Cofaques fe fervent. Quant aux
Kamtchadals, ils n’employ oient point ces rufes ; ils ne tuoient gueres
de ces animaux, parce qu’ils n’en préféraient point la fourure à la
peau des Chiens ordinaires. D ’ailleurs lorfqu’ils vouloient en tuer,
ils pouvoient le faire à coups de bâton ; car avant la conquête du
Kamtchatka, il y en avoit tant, fuivant la tradition, que lorfqu’on
donnoit à manger aux Chiens , il falloit les chaifer des auges ; ce
qui eft très croyable, puifqu’aujourd’hui il y en a encore une niiez
grande quantité, & qu’on les voit fouvent proche des habitations
où ils entrent pendant la nuit fans craindre les Chiens du
Pays, foit que ceux-ci ne puilfent les attraper, foit qu’ils ne foient
point dreflés à cela. Pendant que j’étois à Bolcheretskoi, un homme
en attrapa plufieurs près de fa cabane, dans une foiTe où.il y
avoit des poiiTons aigres. La meilleure chaiTe des Renards Si la plus
abondante , eft celle qui fe fait lorfque la terre eft gelée & que la
neige commence à tomber; car alors ils ne peuvent fouiller les nids
des rats dont ils fe nourrilTent, comme ils le font lorfque la terre eft
molle.
Les Kouriles qui habitent Kourilskaia Lopatka, la Pointe méridionale,
attrapent les Renards d’une maniéré toute particulière : ils
ont des filets faits de fanons ou barbes de Baleines, compofés d’une
grande quantité de mailles. Ils étendent un filet par terre & attachent
fortement le milieu à un petit pieu , auquel ils lient une hirondelle
vivante. Us paiTent enfuite une corde dans les petits anneaux
qui font autour du filet, & le Chaifeur qui tient le bout de
cette corde, va fe cacher dans un foifé. Quand le Renard fe jette
fur l’oifeau, le Chaifeur tire à lui la corde & l'enveloppe. L’animal
refte pris comme un poilfon dans un filet.
Des Zibelines.
Les Zibelines du Kamtchatka l’emportent fur toutes celles de SL
bérie par leur grandeur, par lepaifleur, le luifant & l’éclat de leurs
poils. Leur feul défaut eft qu’elles ne font pas fi noires que celles
d’Olekma Si de Vitime, & ce défaut eft fi confidérable , qu’elles
ne peuvent en aucune façon être comparées à celles de ces deux
endroits, ÿ i
C’eft la raifon pour laquelle il en vient fort peu en Rulïie, Si
quelles font prefque toutes tranfportéesà la Chine , où on les teint
& on les noircit fort bien. Les Zibelines de Tigil & d’Ouka paiÎent
parmi les Kamtchadals, pour les plus belles du Kamtchatka, & l’on a
peine à en trouver pour trente roubles la paire. M. Steller remarque
que les plus mauvaifes Zibelines de tout le Kamtchatka, font celles
des environs de la pointe méridionale & du lac KouriLCesZibelines,
& même les plus mauvaifes, ont des queues fort noires & fort garnies
, de façon que la queue feule fe vend quelquefois plus cher qu’une
Zibeline toute entiere. Il y avoit autrefois dans cet endroit une pro-
digieufe quantité de Zibelines. Un ChaiTeur pouvoir aifément en
prendre foixante-dix & quatre-vingts par année ; mais comme ils
n’eftimoientpas tant ces fourrures que celles des Chiens, ils tuoient
les Zibelines moins pour avoir leur peau , que pour fe nourrir de
leur chair. Auifi lorfque les Kamtchadals furent fournis, au-lieu de
difputer pour le tribut des Zibelines qu’on exigeoit d’eux , ils fe
moquèrent beaucoup des Cofaques , qui donnoient un couteau
pour huit Zibelines, & une hache pour dix-huit. Il eft très vrai que
dans le commencement que le Kamtchatka a été fournis, il y a eu des
Commis qui en une année ont gagné.j ufqu’à trente mille roubles, Si
même davantage, par le commerce des Pelleteries.On peut même dire
qu on y voit encore des Zibelines en plus grande quantité que dans
aucun autre Pays ; car tous ceux qui ont été au Kamtchatka, favent