cent à devenir châtains entre les pieds de derrière, Si au tout itltt
mois leur ventre & leurs flancs deviennent noirs. Les mâles viennent
au monde beaucoup plus gros & plus noirs, Si dans la fuite ils
reftent plus noirs que les femelles : celles-ci deviennent prefque
grifes en grandiiïant, avec quelques taches brunes entre les pattes de
devant. Elles différent tellement des mâles par leur groffeur, leur figure
Si par leurs forces, qu’un Obfervateur peu inftruit qui ne les
examineroit pas: avec attention , pourrait les croire d’une efpece
différente. D ’ailleurs elles font timides , Si n’ont point la férocité
des mâles. Elles ont une extrême tendreffe pour leurs petits.Les mâles,
fe tiennent en bande avec leurs petits fur le rivage, où ils font
prefque toujours endormis. Les petits, peu de temps après leur naif-
fance, fe mettent à jouer de différentes maniérés; ils montent les
uns fur les autres ,.fe battent enfemble ; & loriqu un d eux a renverfe
l’autre , le mâle qui eft préfent accourt en murmurant, lesfépare &
lèche le vainqueur. ILeffàie de le renverfer avec, fon mufeau , il te?
moigne plus d’aft’eéfion à celui qui réiifte avec courage , & s’applaudit
avec joie , pour ainfi dire, davoir un fils digne de lui. lime,
prife fort les pareffeux & ceux qui ne font pas agiles. Delà vient que
quelques-uns de ces petits fe tiennent toujours auprès du maie, Si
quelques autres auprès de la femelle^
Chaque mâle a depuis huit jufqu a quinze & cinquante femelles;
il les garde avec tant de jaloufie,. que pour peu qu’un Chat
marin s’approche de la femelle pour la carreffer , il entre fur-le.
champ dans la plus grande fureur ; & quoiqu’il y ait plufieurs milliers
de ces. animaux fur le même rivage ; cependant chaque mâle a
ià famille à part ; c’eft-à-dire fes femelles, fes. petits tant mâles que
femelles, avec Les. petits Chats marins d’un an qui n’ont point encore
de femelle ; deforte que l’on compte quelquefois dans une feule
famille jufqu’à cent vingt de ces animaux. Us nagent auffi fur la mer
en troupes nombreufes. Tous ceux qui ont des femelles ¿font encarç
forts & vigoureux ; mais ceux qui font vieux, vivent feuls Si paf-
fent le temps à dormir fans prendre aucune nourriture.
Les premiers que nos gens apperqurent dans fille Béring, étoient
des mâles vieux , exceffivement gras Si puants.- Ces vieux animaux
font très féroces. Us reftent dans un même endroit un mois entier
fans boire , & fans prendre aucune nourriture. Ils dorment toujours
& fe jettent avec une férocité extraordinaire fur ceux qui paifent
devant eux. Leur obftination & leur acharnement font fi grands
& fi extraordinaires, qu’ils fe feraient plutôt tuer , que de quitter
leur place : ainfi dès qu’ils voient venir quelqu’un , au-lieu de fui
lailfer'un paffage libre, les uns courent fe jetter fut ■8, tandis que
les autres fe tiennent pendant ce temps-là dans leurs places, tout
prêts à combattre. Lorfque la néceffité oblige de paffer devant eux,
il faut fe préparer à leur livrer un combat : ils faillirent, comme les
Chiens, les pierres qu’on jette fur eux, les mordent de rage, Si s’élancent
en pouffant des rugiffements horribles Si avec la plus grande
fureur fur ceux- qui les ont jettées. On a beau leureaffer les denrs ou
leur crever les yeux , ils ne quittent pas pour cela leur pofte ; ils
riofent même le faire, parce que s’ils rèculoient d’un feul pas, ceux
qui 11e font que fpeâateurs du. combat, fe jetteraient fur eux Si
les égorgeraient. S’il arrive qu’un de ces animaux fe retire , auffi-
tôt les autres s’avancent pour empêcher qu’il ne s’enfuie. Il arrive
alors une chofe fort plaifante : chacun de ces animaux foupqonnant
fon voffin de vouloir prendre la fuite , fe met à l’attaquer. Ces ef-
peces de duels deviennent bientôt fi générales , que dans fefpace
dune werft, & quelquefois davantage , l’on ne voit de tous côtés
que des combats fanglants, Si l’on n’entend que d’horribles rugilfe-
fiients. Pendant qu’ils font occupés à fe battre ainfi enfemble , on
peut paffer fans rien craindre. Si deux de ces animaux en attaquent
*i feul, les autres vont au fecours du plus foible ; comme s’ils
étaient indignés de l’inégalité du combat. Les Chats marins qui nâ