>j94 D e s c r i p t i o n
relient comme morts fur le rivage, jufqu a ce qu'ils foient revenus
de leur épuifement & qu’ils foient féchés ; enfuite ils continuent
leur marche. Le plus grand danger qu’ils courent, eft de devenir la
proie des Canards fauvages & de certains poiffons ( i ) voraces qui
les dévorent; mais quand ils font fur la terre, les Kamtchadals, loin
de chercher à leur faire du mal, ou à les tuer lorfqu’ils les trouvent
dans cet état d’affoibliiTement fur les bords des rivieres & des lacs,
font tout leur poflïble pour les fauver.
De la riviere Petigina ils vont vers le Midi, & arrivent a la mi-
juillet aux environs d’Okhota & de Joudoma. Ils font quelquefois
en fi grand nombre , qu’il faut attendre deux heures entières avant
qu’ils foient pafïés. Ils reviennent ordinairement dans le mois d Octobre;
deforte qu’il ne faut pas s’étonner du trajet immenfe que ces
petits animaux font dans un Eté. L’ordre & l’union qu ils obfervent
dans leur marche , & leur prévoyance de la faifon favorable pour fe
mettre en route, font également admirables.
Les Habitants du Kamtchatcha s’imaginent que lorfqu oft ne
voit plus de rats, ils font allés dans les Pays éloignés au-dela de la
mer. Ils croient que de certains coquillages qui ont à-peu-près la
forme d’une oreille, & que l’on trouve en grande quantité fur le rivage
, font les vaiffeaux fur lefquels ils s’embarquent ; delà vient
qu’ils ont appellé cette efpece de coquillages les canots des rats.
Quelques-uns d’eux in’ont affûté que ces animaux en quittant
leurs trous, couvroient leurs provifions de racines venimeufes pour
empoifonner les autres rats qui viendroient les leur voler, & que
ces rats, lorfqu'on leur enleve leurs provifions d’H i v e r , s’étranglent
de chagrin & de defefpoir, en mettant leurs cous dans les fentes 01f
dans les branches fourchues des arbriifeaux : c’eft pour cette raifon
que les Kamtchadals ne leur enlevent jamais entièrement leurs provifions,
& qu’ils mettent même dans leurs trous des oeufs de poiflon
(1 ) C eft une efpece de faumon nommé Motùki
fec, ou du caviar, pour témoigner combien ils s’intéreffentà leur con-
fervation. Mais quoique la vérité de ces faits nous ait été certifiée par
des témoins oculaires, nous croyons qu’on peut encore en douter,
& attendre qu’on ait d’autres témoins plus dignes de foi ; car on ne
doit pas ajouter foi aux contes des Kamtchadals,
Des Chiens du Kamtchatka.
Les Chiens font regardés au Kamtchatka comme des animaux
nécélTaires ; & l’on en fait autant de cas que des Rennes chez les Ko-
riaques ; des Moutons , des Chevaux , des Bêtes à cornes chez
d’autres Peuples. Les Kamtchadals s’en fervent au-lieu de Chevaux
, & la plupart de leurs habillements font faits de peaux de ces
animaux.
Les Chiens du Kamtchatka ne différent en rien de ceux de nos
Payfans. Us font plus communément blancs, noirs, tachetés de noir,
ou gris comme des loups : on en voit moins de fauves & d’autres
couleurs; Au-refle, on dit qu’ils font plus agiles & qu’ils vivent plus
long-temps que les autres; ce qu’on peut attribuer à leur nourriture
legeré, qui n’eft que de poilfons.
Dès que le Printemps elt venu, & qu’il n’y a plus de traînage,'
chacun lâche fes Chiens & les laiile aller : on ne s’embarraffe point
de ce qu’ils deviennent ; ainfi ils vont où ils veulent, & fe nour-
riifent de ce qu’ils trouvent. Us fouillent dans lès champs & attrapent
des rats , & vont comme les Ours aux bords des rivieres attraper
des poiffons.
Au mois d’Octobre chacun raflëmble fes Chiens, les attache autour
de fa hutte, où on les lie pour les faire maigrir , afin qu’ils
foient plus agiles & plus propres au traînage. Leurs travaux commencent
aux premières neiges, & alors on doit fe préparer à n’en-
tendre que des hurlements jour & nuit.
•On les nourrit pendant l’Hiver aveç de l’Opana & des arrêtes
J ) d d ij