Le tremblement de terre commença le 6 Oétobre 1737 , vers les
trois heures du matin , & dura environ un quart-d’heure avec des
fecouffes fi violentes, que plufieurslourtes Kamtchadales & Balaga-
nes s’écroulèrent & furent renverfées. Pendant ce temps-là la mer
agitée avec un bruit effroyable, quitta iès bornes ordinaires, s’éleva
tout-à-coup fur la terre à la hauteur d’environ trois fagenes ou dix-
huit pieds; mais elle fe retira bientôt & s’éloigna à uned'iftancecon-
fidérable. La terre fut ébranlée une fécondé fois, & la mer fie déborda
avec autant de violence que la première fois ; puis en fe retirant
, elle recula fi loin qu’on ne pouvoit plus l’appercevoir. Ce fut
dans cette occafion que l’on vit au fond de l’eau dans, le détroit qui
eft entre la première & la fécondé Me des Kouriles., des chaînes de
montagnes que l’on n’avoit jamais apperçues , quoiqu’il y eût
déjà eu des tremblements de terre violents & des inondations. Au
bout d’un quart-d’heure, on reffentit des fecouffes terribles & bien
plus, violentes que-la première. La mer monta à trente fagenes de
hauteur, inonda toute la côte où elle relia auifi peuque la. première
fois. Elle fut long-temps agitée, fe retirant & revenant tour-atout?.
Chaque fecouffe fut précédée d’un murmure affreux , fem-
blable à des mugiffements que l’on entendait fortir de delfous
terre.
Tous les Habitants furent ruinés, & beaucoup y périrent mifé-
rablement. Il y eut quelques endroits où les prairies furent changées
en collines , & les champs en lacs ou en baies.
Ce tremblement de terre me fe fit point fentir avec autant de
de violence fur les côtes de la mer de Pengina , que fur les. côtes de
h mer orientale ; de forte que les Habitants de Bolchaia. Reka ny
trouvèrent rien d’extraordinaire l’on, ne fait point s’il y eut une
inondation dans l’embouchure de la B.olchaia Reka.. Ilne s y trou*
voit perfomne alors qui pût en rendre compte. On peut croire que
finondation, ¿il y en a eu , a été fort peu conûdérable dans cet endroit
; car les Balaganes fituéesfur le banc de fable n’en fouffrirent
point, & il n’y en eut pas un feul de renverfé.
Pendant ce temps-là nous faifions route d’Okhotsk pour nous
rendre à l’embouchure de la grande Riviere ( Bolchaia Reka ) ; &
é t a n t defeendu à terre le 14 Oétobre, nous fentîmes ce tremblement
; quelquefois il étoit fi violent , que nous avions bien de
la peine à nous tenir debout. On reffentit encore des fecouffes jusq
u 'a u Printemps de l’année 173 8. Il fut cependant plus fort, dans les
Iiles & à l’extrémité de Kourilskaia Lopatka, ou pointe méridionale
des Kouriles, & fur les côtes de la mer orientale, que dans les
endroits plus éloignés de la mer.
Les Cofaques de Bolchaia Reka qui étoient alors dans les Ifles des
Kouriles, m’ont dit qu’à la première fecouffe du tremblement, ils
seraient enfuis avec ces Infulaires fur les montagnes , & avoient
abandonné tous leurs effets ; qu’ils, les avoient perdus, & que toutes
les habitations deces Ifles avoient été détruites»
Le Volcan appellé. Tolbatcbl, eft fîtuée fur la langue de terré
qui eff entre la riviere de Kamtchatka & celle de Tolbatcjfik : il
jette de la fumée depuis plufieurs années. La fumee commença d’abord
à fortir de fon fommet, à ce que difent les Kamtchadals ; mais
depuis quarante ans il a ceffé de fumer, & depuis ce temps lamon»
tagne vomit dufeud’un fommet hériffé de rochers , par lequel elle
communique à une autre montagne. Au commencement de l’an*
nee 1739 , ¡1 en fortirpour la première fois un tourbillon de flammes
qui réduifit en cendres toutes les forêts des montagnes voifines»
Il s’éleva, enfuite du même endroit comme un nuage, qui s’étendant
& groififlànr toujours- de plus en plus ,, retomba en cendres*
& couvrit de t-ous côtés l’efpace de cinquante werfts la terre déjà,
couverte de neige» J’allois. alors au Kamtchatskoi-Oftrog inférieur
; Sc comme la cendre qui éroit fur la: neige avok prefqu&
mi demi-pouce, de hauteur* je fus obligé de reflet dans l’Ollrpg;