mains. Aaron fut d’un avis contraire, et dît
qu’on ne pouvait combattre sans avertir l’empereur
; qu’il fallait se retirer en Géorgie avec
les troupes, en attendant ses ordres, et se tenir
renfermés dans les châteaux et dans les villes
fortifiées ; son avis prévalut.
Libaride, fils de Rhad Orpélian, était alors
généralissime des troupes d’Abkhasie et de
Karthli, sous le roi Bagrat IV, qui était l’ami et
l’allié de l’empire grec. Il possédait une souveraineté
presque égale à celle des rois en Somkheth
autour de Chamchouildé (1). Son crédit
et sa puissance avaient été même affermis et
augmentés par les crimes de son propre roi qui
lui avait enlevé sa femme et l’avait violée. Le
prince Orpélian, outré de cette injure, avait
pris les armes , et avait usé de représailles sur
la mère de Bagrat, après avoir vaincu ce prince,
et l’avoir contraint de fuir à travers le Caucase
dans le pays des Abkhases.
Quand Libaride fut maître du royaume, il
envoya un message à Constantin Monomaque,
demanda et obtint alliance et amitié avec l ’empereur.
A l’ouïe de ces nouvelles, Bagrat fugitif, qui
avait passé par le pays des Touanes et la Col-
(A) Etienne O rpélian, trad. de Saint-Martin, t. II,
p. 69.
chide, descendit le Phase et vint en toute hâte à
Trébizonde, d’où il fit savoir à l’empereur qu’il
se rendait à Constantinople, pour conférer avec
lui sur les affaires de son royaume, se plaignant
de ce qu’on avait traité avec son sujet rebelle.
Il se soumit cependant à l’arbitrage de l’empereur
, qui régla que le roi posséderait toute la
Géorgie et le pays des Abkhases, tandis que
Libaride aurait toute la Meskhie pendant sa vie,
et reconnaîtrait Bagrat pour son souverain. La
Meskhie d’alors comprenait tout le pays d’A-
khaltsikhé et le Somkheth, ce que Strabon appelait
la Meskhie arménienne (1).
L’empereur , instruit du danger dans lequel
se trouvaient ses deux généraux, se hâta d’écrire
à Libaride, dont il connaissait la valeur et
la puissance, et qu’il avait pour allié, le pressant
de réunir toutes ses troupes pour venir
combattre un ennemi commun , et il ordonna à
ses généraux de n’ouvrir la campagne qu’à l’arrivée
du général géorgien.
Les Romains se retirèrent alors dans un endroit
de difficile accès , environné de tous côtés
de précipices et de lieux escarpés, pour y attendre
Libaride.
Ibrahim les voyant si bien fortifiés, cessa de
(1) Cédrenus, t. II, p. 770, et Saint-M artin, t. II,
p . 222.