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 très-fort cette route, m’assurant que les rivières,  
 gonflées  par  les  neiges  et  sans  pont J  m’arrêteraient  
 infailliblement.  Le Bergouchette,  surtout  
 grossi  par  1 'Akiéritchai,  était  débordé  (1).  Ils  
 me  pressèrent  de  suivre  plutôt  le  chemin  des  
 montagnes,  qui  n’offraient pas les mêmes  difficultés, 
  les ruisseaux pouvant être traversés à gué  
 •presque partout.  Je  suivis leur  conseil. 
 Nous commençâmes par atteindre la vallée du  
 Bergouchette  en  coupant  court  à  travers  un  
 grand  plateau  de  conglomérat  et  de  molasse,  
 élevé de  100  à  200  pieds  au-dessus  des vallées  
 du Tchalounder et du Bergouchette  qu’il sépare.  
 Le plateau,  très-uniforme,  était  déjà  couvert  de  
 Talares nomades  qui abandonnaient  en  ce moment  
 les plaines  et leurs demeures d’hiver, pour  
 aller jusque sur les  sommets  de  l’Alaghez,  chercher  
 des pâturages pour  leurs troupeaux. 
 Pour avoir une idée d’une de ces caravanes nomades, 
  qu’on se représente les tentes pliées à leurs  
 appuis, attachées sur le  dos des boeufs  ou tramées  
 par eux; les  nattes  en paille  sont  entassées  sur  
 d autres boeufs ; le chaudron couronne la charge;  
 de  glandes courgines  (sacs  de voyage)  contiennent  
 les  tapis  et  menus meubles  de  famille.  Le 
 (i )  La carte du général Kha tof écri t Bergousza t et Akara-  
 czai  . j ai écrit comme on prononce ces noms dans le pars. 
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 boeuf  paisible  porte  aussi  toute  une  famille,  
 comme  le chameau dans les  déserts de l’Afrique.  
 La mère tient son dernier-né  dans ses bras,  l’un  
 des  aînés  est  assis  devant,  l’autre  derrière,  se  
 serrant  contre ses jupons.  Une  grand’mère,  en  
 habits déchirés,  chemine  à  côté  avec son  favori  
 sur  ses bras.  Une jeune  femme  relève  le  mouchoir  
 qui préserve son  teint  des  ardeurs  du  soleil  
 pour me montrer ses jolis traits, et se retourne  
 vers  le  boeuf,  qu’elle  conduit  par  une  corde,  
 pour rassurer sa petite famille,  effrayée à la vue  
 des voyageurs  dont  je  fais  partie.  Sur des  chevaux, 
   de  jeunes  filles  rient  et  s’arrêtent  pomme  
 regarder;  les  gros  chiens  blancs,  maigres,  
 marchent  du  même  pas  et  me  regardent  avec  
 méfiance ;  les  génisses  bondissent ;  une  vieille  
 femme est sur son boeuf avec sa chèvre fatiguée ;  
 une  autre  avec  son  veau  ou  son  agneau;  les  
 grands  garçons mènent,avec  soin  les moutons;  
 le  chat  s’est  logé  sur  le  bagage,  et  les poules  
 montrent  la  tête  à  travers  l’ouverture  des  sacs  
 où on  les  a mises ;  les  hommes  à  pieds chassent  
 les plus  tardifs,  encouragent  les  plus  fatigués,  
 l’un, même, porte sa chèvre  sur  ses épaules et les  
 petits  garçons  caressent  les petits  agneaux fatigués  
 qu’ils  tiennent  dans  leurs bras. 
 Nous  débouchâmes  dans  la  belle  vallée  du  
 Bergouchette,  à  25  verst  de  T ir i,  auprès  du