auxquels on veut faire une retraite pour les récompenser
de leurs services ; ce motif très-noble
de la part du gouvernement, lait que l’on
tient moins aux petits revenus de ces domaines.
Le commissaire que Ton venait de nommer en
Cakketh, était un militaire qui avait passé ses
années de services dans le fond de la Russie, et
qui n’avait jamais vu de vignes. Très-zélé pour
sa nouvelle charge, il avait à coeur d’introduire
dans la manipulation du vin, les améliorations
qu’il étudiait dans les livres. Ainsi, par exemple,
voulant subtituer l’usage des tonneaux à celui
des outres et koupchines, il en fit faire autant
qu’il lui en fallait pour loger toute sa nouvelle
récolte; mais n’ayant pas su qu’il fallait étuver
ses tonneaux neufs à plusieurs reprises et à l’eau
bouillante, son vin rouge prit le goût du chêne
et fut détestable ; le blanc devint brun, et ne fut
pas meilleur que le rouge.
Après les princes Tchivtchévadzé, les princes
Réboutof ont aussi d’excellents vignobles en
Cakheth.
Pendant que M. Meyer conversait avec tous
les Arméniens de Signaghi, au sujet d’achats de
bourres de soie, je parcourais la contrée et je
dessinais. Malheureusement, lorsque le tremblement
de la fièvre me reprit, mon dessin n’était
qu’à peine ébauché ; je le terminai sous les in-r
fluences d’un violent paroxisme; mon courage
me soutint tant que mes yeux avides faisaient,
pour ainsi dire, la conquête de la contrée; mais
quand je voulus retourner chez moi, les forces
me manquèrent et j ’eus beaucoup de peine à me
traîner jusque-là, forcé de me coucher à chaque
instant sur le bord du chemin.
En retournant à Tiflis, nous prîmes dans notre
voiture à Marienfeld, le schultz du village.
Cet homme, qui avait reçu en Allemagne une
bonne éducation, nous raconta une multitude
die particularités sur leur migration et sur leur
établissement en Géorgie. Il avait été l’un des
principaux acteurs dans ce drame remarquable ,
qui peint si bien le pouvoir des préjugés sur
un® civilisation faussée par le bigotisme.
La plupart des Wurlembergeois protestants ,
épouvantés par la révolution française et par les
guerres sanglantes et sans fin de Napoléon,
avaient l’idée fixe que la fin du monde approchait.
L’an i 83o devait voir luire le grand jour
des peines et des récompenses. Les âmes effrayées
à l’approche du jugement de Dieu, voulurent se
rapprocher du tombeau de Notre Seigneur, pour
être plus près de la source de la grâce et du salut.
Poussé comme par un esprit de vertige,
chacun n’eut qu’une pensée, celle de se rendre
à Jérusalem pour y attendre son sort. Les Wur-
tembergeois savaient très-bien qu’on peut arriver
par mer; mais les Wurtembergeois n’aiment