A coté de I église, s’élève une grande croix
arménienne, de la forme de celles de Djoulfa ,
avec l’inscription suivante :
« Moi y Chahin-Chah, fils d’Achod, j ’ai érigé
cette croix en mémoire de mon âme. Je demande
la communion de vos prières. »
Sur la tranche de la pierre, on lit la date 712 (1263 de J. C.) (î).
Occupé a dessiner et à contempler , de cet
observatoire, les églises, les villages qui bordaient
le Khatchintchaï, ma course fut plus longue
que je ne me le figurais ; je me trouvais encore
sur les pentes rapides de la montagne,
cherchant un sentier parmi les broussailles et
les ravins, quand la nuit vint me surprendre^.
La lune rouge, presque dans son plein, s’élevait
il est vrai, sur 1 horizon brumeux ; mais c’était
une faible lueur pour me retrouver au milieu
d’un labyrinthe de fossés pleins d’eau et bordés
de buissons, qui sillonnaient cette vaste plaine.
Rien ne fait reconnaître les approches d’un vil-
lage, ni tours, ni toits de tuiles, ni murailles
blanchies. Dans plusieurs directions, j ’entendais
les aboiements des énormes chiens tatares : j’é-
1 abbaye de Saint-Jean, près de Cerlier, la cathédrale et la
porte du pont de Bâle, etc.
(î) Je ne sais si la date est de la même époque que l’inscription
.
tais fort embarrassé. Je m’en tins à la direction
dans laquelle je supposais qu’était le village.
Après une heure et demie de tâtonnement, je
crus l’avoir atteint et je m’avançais très-content,
demandant ou était Ali, quand au lieu de me
répondre, deux cavaliers qui se trouvaient là
par hasard, m’insultent, me demandent d’où je
viens ainsi, seul, à cette heure, à pied, et se moquent
de moi comme d’un vagabond. Ils partent
sans daigner répondre à mes questions. Quand ils
furent loin, j ’insistai pour savoir où était Ali;
les propos de ces deux cavaliers avaient produit
un si mauvais effet en ma faveur, que personne
ne daigna me répondre ; il n’y eut dans la foule
qui m’entourait, qu’un pauvre Tatare qui, à
force de promesses, s’offrit à me mener auprès
de lui, me disant qu’il s’était arrêté au village
voisin. Il m’y mena en effet à travers champs et
fossés, me défendit contre les chiens furieux qui
sentaient l’approche d’un étranger, et nous arrivâmes
sans accident chez le seigneur tatare
gui logeait Ali. Mon compagnon de voyage était
dans la plus grande anxiété ; voyant que je n’arrivais
pas, il avait envoyé, dans son inquiétude ,
pour me chercher, précisément ces deux cavaliers
qui m’avaient si bien reçu au village voisin
: ils n’avaient pu croire qu’un homme à
pied, courant seul pendant la nuit, était l’homme
qui s’était perdu. Ils s’en doutèrent ensuite, car