
l’Homme, en lui montrant tout ce qui lui
refte de place pour de nouvelles collections,
& par quels moye'n il pourroit éviter de ras,
fembler à l’avenir tapt de chimères. Je fuis
bien loin de me croire en état d’entreprendre
une pareille tâche; mais les Magafinsdelâ Scien,
ce font ouverts & je vais y donner un coup,
d’oeil.
L ’Hommèc eft doué de diverfes facultés,
qu’il exerce dès que les occafions s'en préfen-
tcnt. Il eft curieux, il obferve, il compare,
il juge : & puisque ce font là des réfultats de
fa nature, il feroit bien inutile de vouloir en
empêcher les effets. }Hais pour refter vraiment
dans les bornes de fa nature, comme Etre intelligent
& qui raifonne, il faudroit qu’il domptât
fa curiofite' fur tout ce qui eft hors de fa
portée, qu’ il fût attentif quand il obferve, qu’il
comparât réellement, & qu’ il ne jugeât que;
lorsqu’ il feroit en état de juger. E ft-ce là ce
qu’il a fait?
En s’occupant des chofes qui étoient autour
ée lu i, il étoit bien naturel que l’Homme tournât
quelquefois fes regards fur lui-même. Tant
qu’il fe contenta de fentir, il éprouva fans dot-:
te peu de difficulté : nous pouvons en juger
par la multitude 4e çeujç qui n’ en éptQUvent
aucune. Se dlftinguer, foi, dé fes Organes, eft
un fentiment commun à toute l’Efpèce, & qui
n’embarraffe . point. „ Je fuis un individu de
„ d e l’Efpèce humaine, qui me connois, qui
„ ai du plaîfir, qui éprouve de la douleur, qui
„ ai avec les autres Etres telle & telle relation
} )........ Et qui fu is .... q u o i? ... Un Etre qui
n fe fent: je n’en fais pas davantage, fit cela
„n e m’empêche pas de jouir.” •
Mais l’Homme p eut-il çn refter là? Oui,
heureufement ; du moins la plupart des Hommes
; .& fans le trop grand loifir de quelques
unsd’entr’eux, toute l’Efpèce en feroit demeurée
là. Mais'■dans le îoifir on contemple tout,
& par conféquent foi “ même. Ainfi l’Homme,
.ignorant encore presque tout, defira de comprendre
, & foi & les autres Etres ; & dès qu'il»
tenta d’approfondir la nature des Effences, un
brouillard épais fe répandit fur l’Univers & cacha
tout ce qu’il y avoit de réel. L’ Imagination
alors créa fes fantômes, & l’Univers fut
tout ce qu’elle voulut. Les Contes des Fées
n’ont rien de plus extravagant, que l’Hiftoir©
des Syjlêmes de la Nature.
Cependant il fe confervoit toujours quelque,
lueur de Raifon dans le tems des plus grandes
chimères. La feule faculté de fe contempler, a
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