
l’ intelligence, quand il prétend le çonnoître;
il n’ a aucun droit d’affirmer, qu’aucun autre Cau-
fe n’y agit que celles qu’il connoît, ou conjecture
, par des effets fenfibles ; qu’aucun autre
Effet n’exifte que ceux qu’il apperçoit ; que même
ceux qu’ il apperçoit compofent la plus grande
partie de F Univers; ni enfin que les Effets ap-
perçus ne font pas liés avec les Effets imperceptibles.
Des millions de claffes d’Etres, &
de rapports entre les Etres peuvent lui être absolument
inconnus, foit en tout, foit en partie:
tellement que tout ce qu’il affirme ou nie,
fur les rapports intimes des Etres qu’ il apperçoit,
ou qu’il foupçonne, peut-être également
chimérique; & que leur âétion les uns fur les
autres peut réfulter de mille efpèces d’intermédiaires
dont il n’a aucune idée.
Quelle ignorance, ou inattention fur lui-même,
ne montre donc pas cet Etre aux cinq Sens,
quand ii prétend décider qu’il a tout vu, fur
la propre Efience, fur lès rapports avec les
autres Etres, fur ia Caufe de tout! „ Reviens.
„ à toi, ô Etre foible! Songes que tu n’as que
■ des Teux pour foupçonner 1’U n i v e r s ,& ta
„ Confcience pour pénétrer dans une de fes parties,
„ qui eft Toi ! . . , . . Reconnoître ta . profonde
, ignorance, fera ton premier pas vers la Vérité” .’
On n’ a point affez réfléchi, ce me fcmble,
fur ce que nous n’avons réellement pu nous
former l’ idée d’ Univers, que par le Sens qui appartient
à ia Vue. C’eft lui feul qui nous
a fait appercevoir, la forme de Globe de notre
Terre, l'exiftence des Aftres, & les rapports de
toutes ces Sphères entr’elles ;en un mot, qui a étendu
nos idées au delà de ce que nous palpons. Si donc
ce Sens nous eût manqué,nous aurions invinciblement
ignoré l’exiftençe d’une multitude
¿’E t r e s , & furtout une claffe très diftincte
de rapports de ces E t r e s , entr’eux & avec
nous ; favoir, le rapport de viftble à Voyant.
Peut - on n’être pas frappé des conséquences
qui réfutent de cette feule considération?
Quoi! un feul Sens de plus, a û immen-
fément étendu nos connoiffances des E t r e s
& de leurs rapports, en comparaifon de ce
qu’elles auraient été fans cette aide ; & nous
croirions encore de çonnoître F Univers'. Quant
à moi *je trouve, que de tout ce que nous admettons
par la force de l’analogie, rien n’eft
•plus probable, que l’exîftence d’ une multitude
d’E t r è s , & de rapports entre les E t r e s
connus ou in c cm u s , qui ne fauroient nous
être enfeignés par nos cinq S e n s , quoique
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