
niés? Soyez prémièrement jufles, Incrédules, fi
vous voulez qu’on écoute vos argumens.
Et nous Chrétiens, de quelque Eglife que nous
foyons, comment pouvons-nous après cela ne
pas nous fupporter les uns les autres ! Pourquoi
contribuons - nous par notre conduite, à
perfuader ceux qui n’examinent point, qu’on
leur dit vrai, quand on accufe la Religion de
ces maux mêmes, qu’ on n’a faits que parce
qu’on ne la fui voit pas?
Sur ce point important de la Morale, comme
fur tous les autres, le Chritianisme avoit tout
en lui-même ; parce qu’ il n’avoit fait que Sanctionner,
ce que la Raifon fuprême avoit déjà
dit à I’H om m e , mais qu’ il avoit défiguré
: & il étoit bien injufie d’affedter de lui op-
pofer la Philofophie, qui ne fauroit parler que
le même langage. Mais la Providence fait tirer
le bien du mal. Les prédicateurs de Vindifférence,
s’étant trouvés d’abord un des partis perfé-
cutés, furent modeftes au début, & ne firent
pas connoître leurs mies. Leurs talens devinrent
ainfi un aide contre le Fanatisme, & ils
eurent d’honneur du fuccès. Maintenant ils en
abufent. Mais ja Religion leur réfiftera. La
Raifon réveillée empêchera le Fanatisme de
reprendre de l’ empire, & la Religion mieux; con-
pqç écartera déformais la perfécution. C’cft
d'elle feule que l’Humanité peut attendre le
Règne de la vraie Tolérance. Buter à produire
l’indifierence pour la Religion, afin d’accèléref
ce Règne, n’ eft point connoître l’Homme. SI
cette indifférence étouffoit les paiïïons dans fon
.coeur, elle le défigureroit: fi elle les laiffoit
Ifubfifter, elle leur ôteroit toute borne.
j Qu’ on étudie les hommes fimples ; ê t l’ on
[verra que la Religion femble attachée à leur na-
[ture. L ’Homme cherche D i e u , & fe le p e in t
[.plutôt fous les afpe&s les plus abfurdes, que
| de perdre ce point d’appui, que fa foibleffe
|& fes befoins lui rendent néceffaire. Qui donc
■rendra-t-on indifférent pour la Religion? Con-
[ fultons l’expérience.. Ce feront ceux qui ont le
[plus grand befoin du frein qu’elle peut mettre aux
«.pallions; c’ cft-à-dire, ceux qui, dans l’Eglife
[comme dans l’Etat, font les Gouverneurs des
[ hommes ; & à qui par conféquent, il ne man-
[que que l’indépendance d’un Juge fupreme,
[pour n’avoir plus de frein. Qu’auroit-on fait
I donc pour la Société, quand on les auroit déli-
Ivrés de la voix de la Confcience, qu’ ils e'touf-
Ifent fi aife'ment dès qu’ils n’ont plus de Reli-
Igion? Les auroit-on au-moins fendus toléransî
[ .
i Oui, tant que leur intérêt rfy feroit pas contrai-
I re. Mais dès qu’il faudroit écrafer un parti ou