
56 A r chitecture Hydrauliqu e , L ivr e III.
tement à l’eft , occupant la petite plaine qui fe trouve entre
deux. Ce port fera entièrement à l’abri des vents d’eft 8c d’oueft j
mais comme la mer du large eft fort orageufe quand ceux du
fùd régnent, on a cherché à le mettre à couvert de ce côté
là par un mole C D de deux cens cinquante toifes de longueur,
divifé en deux parties, la première CE élevée d’environ 30
pieds au-deffus de la furface de l’e au, terminée par un fort ou
château E , pour défendre l’entrée du p o r t, indépendamment
de l’artillerie qu’on peut placer le long de la plate-forme C G ,
& couverte d’un parapet de maçonnerie , comme on peut le
Voir aü profil rapporté fur la planche XXII. Quant à l’autre
partie FD de ce mole, elle ne doit être élevée, félon Je projet,
que de x o ou 12 pieds au-deffus du niveau de la mer.
Entre le port 8c l’avant-port, qui n’auront, à ce que l’on prétend
, que 18 pieds de profondeur d’eau , il y aura un chantier
de conftruâion, le tout accompagné de quais & d’édifices né-
ceffaires à la marine, fans parler d’une haute muraille HIK que
l’on fe propofe d’élevêr pour mettre à couvert des vents du fud
la partie de l’arriere-port qui ne fera pas abriée par le mole fu-
périeur CE.
A confidérêr la fituation du p o r t , on pencherait à croire
que fon entrée fera d’un difficile abord, & qu’elle ne peut être
praticable qu’avec le vent d’e f t , au beu qu’il paraît que fi on
lui en avoit ménagé deux oppofées, comme à Civita-Vecchia,
on eût eu l’avantage d’y entrer 8c d’en fortirpar plufieurs autres
airs de vent; mais ce défaut fera peut-être réparé par la rade de
Villefranche , à portée de recevoir les bâtimens , lorfque les
vents trop forts ou contraires ne leur permettront pas d’entrer
dans le port, parce que là ils pourront, en tems calme, fe
faire remorquer leur chaloupe, le trajet n’étant gueres que de
4 à 5000 toifes,
Tandis que nous touchons à la côte de Provence, il eft bien
jufte de décrire les ports de T o u lo n , de Marfeille & d’Antibes
, dont nous fommes en état de parler pour en avoir jugé
pendant le féjour que nous y avons fait, éclairés par le commerce
des plus habiles ingénieurs de la marine,
tfcripùon 6 53. Quoique Toulon foit un des meilleurs ports de la Më-
T r / “ ditçrranée 1 A ne ptfoît pas que les anciens y aient fait beau-
m' coup d’attention, ne teftartt aucun veftjge qui puiffe leur
être attribué. Ce n’eft güeres que depuis que ce port eft paffë
au pouvoir des rais de France, qu’il a commencé à devenir
de
c h a p . III. D es p o r t s é t a b l i s p a r l e s m o d e r n e s . 57
de conféquence. Louis X I I eft le premier qui a connu tout
l’avantage que fon royaume pouvdit en tirer; frappé de la bonté
de fa rade, il y fit conftruire, pour la défendre, la groffe to u r ,
telle qu on la voit encore aujourdhui ; enfuite François I ordonna
la fécondé, nommée tour de Balaguer.
En 1194 > Henri I V aggrandit & fortifia la ville. Comme
alors il n y avoit point de baffin féparé de la rade , il fit élever
a pierres perdues & par encaiffement, les deux grands moles
FEG & GH IK , pour envelopper ce qu’on appelle aujourd’hui
lanciennedarce, dont l’entrée eft en G.
Louis le Grand a depuis enchéri furies ouvrages de fes prédé-
ceffeurs, ayant fait aggrandir la ville du double de ce qu’elle étoit
auparavant, & fait conftruire en 1680 la nouvelle darce FEBD A ,
capable de recevoir les plus forts vaiffeaux. Son entrée eft
placée vers le milieu B , 8c défendue, ainfi que la précédente
G , par les baftions de l’enceinte que l’on a bâti à grands frais
fur des moles,élevés à pierres perdues. Ce nouveau port, qui
communique à l’endroit L avec l’ancien, eft bordé de magnifiques
quais, accompagnés de toutes les commodités convenables
à l’arcenal de la marine A N O M , propre à de grands arméniens,
comprenant une quantité d’édifices dont la majefté
annonce la grandeur du monarque qui les a ordonné. C ’eft
pourquoi ce port peut être appellé Port-Royal, pour le diftin-
guer des autres qui ne font que marchands. D ’autre part, pour
défendre encore mieux l’entrée de la rade, il y a fait conftruire
les forts de l’Eguillette 8c de S. Louis. Nous aurons occafion
flan s la fuite de parler plus en détail de tous ces grands travaux
pour en déduire des méthodes propres à ceux qui fe font dans
la Méditerranée.
654. La rade de T oulon jouit de tous les avantages que l’on
voit rarement reunis dans les autres , c’eft pourquoi nous la
rapportons comme exemple. Elle a une étendue allez confidé-
rable pour contenir une grande quantité de vaiffeaux de ligne à
couvert de la mer du large, n’effuyant qu’un peu de reffac qui
vient du côté de Ste Marguerite, mais qui ne fatigue pas trop.
Son fond eft par-tout de vafe, on peut s’y échouer fans rifquer
d’endommager les vaiffeaux, dans le cas où l’on ferait obligé
d’y entrer après avoir perdu toutes les ancres; l’on y mouille à
4 , 5 , 6 8c 7 braffes d’eau. Son entrée eft faine, 8c n’a qu’envi-
ron 600 toifes d’un rivage à l’autre , de forte que les feux des
Batteries établies de droite 8c de gauche, la croifent parfaitement.
Partie I I, Tome I I , H
Pl. III.
Defcription
de la rade de
Toulon 3 rapportée
pour
exemple com*
me une des
meilleures
qu il y ait.
Pl. VI.