pré , & réciproquement
un
pré en terre labourable
Moyennant
un canal d’arrofage
, on ejl
parvenu a rendre
fertile la
plaine de Crau
en Provence.
'478 A r c h i t e c t u r e H y d r a u l iq u e , L iv r e IV.
pagne,ce qui caufe quelquefois la ruine de tout un pays. On ne
peut remédier au premier de ces deux inconvéniens ; mais il nous
relie au moins l’avantage de corriger le fécond par le moyen
des canaux d’arrofage : n’eft-ce pas beaucoup de pouvoir fe
préferver de la moitié du mal? Il n’y a guere de pays en France
plus froid & plus fujet à l’humidité que le haut Dauphiné, parce
qu’il eft rempli de montagnes chargées de neige prefque toute
l’année, & contre lefquelles les nuées viennent fe rompre, &
où l’hiver avec toutes fes rigueurs, dure au moins fept mois.
Cependant il n’y a point d’endroit où l'on arrofe les terres avec
plus de fo in, & dont on tire un meilleur parti. De même dans
les Pays-Bas, où l’on fait que les eaux font en grande abondance
, on n’eft pas moins attentif à remédier au tort que peuvent
caufer les grandes fécherelfes, en rempliffant d’eau les fofi
fçs ou watergçins, dont les campagnes font coupées , afin de
les rafraîchirpartranfpiration. Si dans des climats fi différens on
a befoin de Canaux d’arrofage', on peut conclure qu’il y en a
peu où ils ne foient abfolument néceffaires. En effet, eft-il rien
de plus avantageux que de pouvoir convertir les terres labourables
en prés, énfuite les prés en terres labourables ? Quand on
peut changer en prairie une piece de terre fatiguée de produire
du bled, elle en devient bien meilleure quelques années après,
pourvu qu’on la puiffe arrofer ; de même quand la terre d’un
pré vient à s’émoülfer, ce qui effun ligne certain qu’elle fe laffe,
la remettant en labour pendant quatre ou cinq ans , elle produit
enfuite du bled en abondance. D ’autre part cette mutation
donne lieu d’entretenir & d’élever beaucoup de bef-
tiaux, dont on connôît allez la néceffité.
1198. Rien ne prouve mieux le parti avantageux que l’on
peut tirer d’un canal d’arrofage, que l’exemple qu’offre la plaine
de Crau en Provence, entre 'Arles & Solon ; cette plaine de lix
lieues de long & d’environ trois de large, eft fi couverte de
cailloux, que l’on n’y voit prefque point de terre. Un nommé
Adam de Cràpone, gentilhomme Provençal, qui s’eft rendu fort
célébré par fon favoir qui lui avoit attiré la confiance de Henri
I I , dont il étoit Ingénieur des fortifications, ayant reconnu par
des nivellemens que la Durance prife près du village de la Roque
, à fix lieues au-deffus de fon .embouchure dans le Rhône,
étoit de beaucoup fupérieure à cette plaine, fit faire en 15 j8
un canal nommé encore aujourd’hui de Crapone , du nom de
fini auteur, pour arrofer un pays auffî aride. En effet, il eft par-
C hat?. X IV . d e s C a n a u x d ’a r r o s a g e . '479
Venu, par un grand nombre de rigoles tranfverfales, à faire naître
l ’abondance dans un canton qui n’en avoitpasparu fufceptible ;
on y a femé depuis du bled dans les endroits les plus favorables,
& les autres produifent entreies cailloux de l’herbe fucculente,
fervant à nourrirun grand nombre d"e troupeaux. De-là ce canal
ayant traverfé fur un aqueduc le territoire d’Arles ,. vient aboutir
dans le Rhône à un quart de lieue de la partie méridionale
de cette ville, après avoir fait tourner plufieurs moulins,Ce qui
paraît allez curieux, eft de voir qu’au-deffous de ce canal d’arrofage
, à l’endroit de l’aqueduc, paffe un autre canal pour l’e-
eoulemènt des eaux du pays,
n 99. Tandis que nous'en fommesfur la Provence, dont on
connoît la ftérilité des campagnes, caufées par les fréquentes
fécherelfes qui y régnant, il ne fera pas hors de propos de parler
d’un autre canal d’arrofage , propofé par le même de Crapone.
Ce projet a été renouvellé nombre dé fois depuis, & de
nos jours par le fieur Floquet, Provençal,, très-capable de le
conduire à fa perfection, fi l’on en juge par les écrits qu’il a publiés
à cette occafion. Ce projet fe réduit à dériver des eaux de
la-Durance dans un endroit près du bac de Mirabeau-, à travers
le roc de Canteperdrix. Là cette riviereeft bordée de deux rochers
élevés , dont celui de Canteperdrix fait partie ; avantage
unique ( ditlefieur Floquet). qui.rendra à jamais laprife des eaux
immuable & hors et atteinte, de toutes les inondations eaufées patente
rivière. Le canal qui les recevra & qu’on a deffein de rendre
navigable, aura fon cours par les terroirs de Joucques,Pey-
rolles , Meimrgues, Venelles , le P u y , Arnajon , Saint-Efieve 3
Janfon y Rognes , Saint-Canat,Egudles, & au-deffus de la ville
à’A i x , de-là fera conduit par ceux du Tkolonnet, de Meyreueil,
Gardanne, Bouc, Cabriés & Séptemes jufqu’à MarfeiUe, où il
dégorgera fes eaux dans la mer. Si fon exécution n’a pas eu lieu
juftju’ici, ce n’eft pas qu’on rien ait fenti toute la poffibilité &
les avantages qui en réfulteroient ; mais la dépenfe de plus de
fix millions , qu’il- coûteroit, rieft pas un petit obftaeie à
vaincre.
1.200. De la maniéré que la compagnie qui a deffein d’entreprendre
ce grand ouvrage veut le conduire, il fuffira d’avoir
une partie de cette foffime, pour être alluré de le finir dans l’ef-
pace de fix ans, parce qu’il procurerait des- revenus à rrïefure
qu’il avaucera, chaque partie pouvant fucceffivement former
elle-même un canal achevé, dont les eaux pourront être emp
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