
' Difficulté
tàujee par les
inondatiorts
pour la communication
des
quartiers
d'une armée
qui ajjtege une
place.
Avantage
qu'une garni-
fon ajjiegée
peut tirer de
f e s inondations
, pour
être fecourue ,.
ou pour fe dérober
au fo r t
fâcheux que
&ennemi lui
dejline.
250 A r c h i t e c t u r e H y d r a u l iq u e , L i v r e III.
fage difpofition de leurs éclufes. Ce n’eftpas que l’on ne puiffe
auffi fefervir utilement des rivières qui paiTentdans levoifinage
d’une place, quand elles n’en font que peu éloignées , mais
elles obligent à faire des ouvrages fort avancéspour foutenir les
éclufes; ce qui efteaufequ’en tems de fiege une garnifon s affoi-
blit par la néceffité de fe partager. . ' ,,
040. Il e ll bon de remarquer que quand une inondation s e-
tend fort loin de la ville qu’elle protégé, il y a cela de fâcheux
pour l’affiégeant, que ne pouvant la renfermer dans fa ligne de
circonvallation , à moins d’embraffer une trop grande etendue de
pays, il eft privé, à caufe du débordement de l’eau, de faire des
ponts fur la partie fupérieure de la riviere, pour la communication
des quartiers qu’elle fépare;il ne peut même trop compter
fur les ponts de la partie inférieure , parce que fi dans le tems
qu’une armée fe préfentera pour faire lever le fiege, la place
vient à lâcher fubitement les eaux retenues , „elles’ pourraient
bien détruire les mêmes ponts , & ôter par-là au côte attaque
tout moyen d’être fecouru.
Telle fut en 1674 la fituation du prince d’Orange devant Uu-
denarde ; après avoir perdu la bataille de Seneff, il entreprit,
pour pallier fon infortune, le fiege de cette place, qu’il leva en
grand défordre à l’arrivée de M. le prince de Condé, parce que
les quartiers féparés par l’inondation & l’Efcaut, ne pouvoient
fe communiquer pour foutenir la ligne qu’il avoit faite & qu il
fut contraint d’abandonner, vu la facilité qu’auroit eu M. le
Prince de la forcer. .
941. La difficulté d’inveftir également tous les environs d une
place dont les inondations s’étendent fort lo in , peut encore de-
venir bien favorable à une garnifon, foit pour recevoir des
rafraîchiffemens & du fecours_, ou pour échapper à l’ennemi
dans le cas où il voudroit lui impofer la dure, condition de ne
la recevoir que prifonniere de guerre. Une inondation n eft jamais
fi complette qu’elle ne laiffe quelques faux-foyans ,.dont
peut profiter pendant la nuit une troupe qui marche a la legere
& qui fait fans régret abondonner fes équipages ; d ailleurs ne
peut-on pas fans éclat laiffer écouler une partie des eaux du
chemin qu’on a deffein de parcourir ? Mais il faut bien con-
noître le pays, l’avoir fait fonder d’avance par des gens fors qui
puiffent enfoite fervir de guide & fe trouver à portée de gagner
une ville voifine : celle-ci peut de fon côte favonfer cette ret
r a ité e s que de part & d’autre les chefs fe feront bien concertes.
C har. XIII. d e l ’u s a g e d e s e a u x a l a g u e r r e . 2 51
Cela n’eft pas difficile, quand un gouverneur fait tout ce qu’il
faut pour être informé de ce qui fe paffe au dehors ; que rifque-
t-il ? Son pis aller fera peut-être de tomber dans un gros des
ennemis & d’effuyer le fort qu’on lui deftinoit ; encore cela
ne peut guere arriver que faute d’avoir allez de nerf pour fe
frayer un paffage aux dépens de la troupe que le hafard peut lui
faire rencontrer. Quel qu’en foit l’événement, fa conduite fera
toujours glorieufe ; mais tout femble annoncer qu’il s’en tirera
heureufement.
942. En 170 5 , for la fin de la campagne du Rhin, l’armée
impériale faifoit le fiege d’Haguenau , place d’une réfiftance
médiocre, fituée dans la baffe Alface, à fix lieues de Saverne ;
la breche étant faite, la garnifon de deux mille hommes étoit
en danger de fe voir emportée d’affaut, auffi-tôt la prife du
chemin couvert, qui ne tenoit plus à grand chofe, lorfque M.
Du pe ry, maréchal de camp, commandant dans la place , demanda
une capitulation honorable, offrant de fe rendre au bout
de treize jours s’il n’étoit fecouru ; la propofition fut rejettée
avec hauteur par le général Thungen, qui répondit que la garnifon
n’avoit point d’autre traitement à efpérer que d’être faite
prifonniere de guerre. M. Dupery, inftruit qu’il n’étoit pas in-
vefti du côté de Saverne, où ily avoit un marais inondé imparfaitement
, forma le deffein de s’échapper la nuit foivante , accompagné
de fa garnifon. Pourréuffir,il feignit de vouloir faire
une grande fortie, difpofatouten conféquence, & ordonna aux
bourgeois fous peine de la vie de relier renfermés chez eux depuis
le foleil couché jufqu’au lendemain matin : il affembia enfoite
tout fon monde & le fit paffer dans le chemin couvert,
d’où il défila vers les dix heures pour gagner le marais, ne laif-
fant du côté de l’attaque que deux cens hommes pour faire un
feu continuel, avec ordre de partir par pelotons dans des tems
marqués. Le tout réuffit parfaitement, M. Dupery arriva vers
les fix heures du matin à Saverne, fuivi du détachement qu’il
avoit laiffé en arriéré. u
943. Pour peu qu’on y faffë attention, on fentira que fi le
terrein fufceptible d’être inondé a une pente fort fenfible, l’inondation
n’aura pas beaucoup d’étendue, parce que du côté d’a-
rnontles eauxretomberontfur elles-mêmes vers la placedès qu’on
fera gonfler la riviere ; le parti que l’on prend eft de les.foutenir
par intervalle avec des digues placées à de juftes diftances les
une? des autres , pour former autant de vaftes baffins en cafca-
I i ij
Retraite mémorable
de la
garnifon d’H a-
guenau , ajfiè-
gee en 1705.
Maxime fur
la maniéré de
former les
inondations ,
pour la defen-
f e des places
dont le terrein
des environs a
beaucoup de
pente.