Le s cour ans
qui n’arrivent
que dans certains
tems 3
peuvent être
attribués à
l ’afiion dès
vents qui régnent
alors.
Particularité
des courons
que l ’on remarque
dans
la Manche,
20 A r c h i t e c t u r e H y d r a u l iq u e , L i v r e IIL
l’orient. Ou remarque ce même effet dans l’Océan feptentrio-
n a l, avec cette différence qu’il eft moins fenfible & plus facile
à parcourir allant dans le levant à la faveur des vents de nord-
eft & de fud-eft. Quelques-uns attribuent la caufe de c e
courant au mouvement de révolution de la tente en 24 heures,,
qui ne fe communiquant pas entièrement à la mer , eft caufe
par conféquent qu’elle paroît aller en fens contraire. On croit
aufîi que ce mouvement continuel de la mer vers l’oueft, vient
de ce quelle eft pouffée par les vents alifés quifoufilent dans
le même fens.
606. Il y a d’autres courans qui n’arrivent que d'ans certain
tems, & qui n’ont point de faifon réglée : tels font ceux des
Maldives vers les ifles de R omero, ceux de Saint-Laurent dans
l’Archipel, tirant aux ifles Philippines, dont la rapidité eft fî
grande qu’on y a vu des vaiffeaux à l’ancre rompre les plus gros
cables. Au refte, il n’eft guere poffible d’aftigner de caufes po-
fitives à la multiplicité des couransirréguliers qui fe rencontrent ;
on peut cependant fuppofer qu’ils dépendent du fond de la
mer, diverfement entrecoupé par des bancs; alors les eaux
venant à être agitées de la part des vents, font pouffées avec im-
pétuofité contre les rochers qui les forcent, en fe réfléchiffant,.
de prendre des cours d’autant plus grands que l’impulfion en
eft plus forte & l’efpace entre les bancs plus étroit. Ainfi la
mer étant continuellement frappée par les vents, il eft naturel
que ceux qui font réglés produifent des courans conftamment
les mêmes, & que les vents périodiques forment des courans
qui leur reffemblent.
607. La pofition des ifles Angloifes, G e r fe y , Gernefey,
Sers, Hermes & Origny, qui divifent l’entrée de la Manche,
eft aufîi caufe de plufieurs courans très-dangereux auY navigateurs
; elle laiffe quelques paffages , entré autres celui le long
de la Normandie nommé laDéroute, qui eftdes plus périlleux.
On y a vu des navires mouillés en grandes malines à 10 & 12
braffes d’eau demeurer à fe c , la mer étant retirée; il eft plein
de rochers & de bancs qui forment des courans irréguliers ; s’il
furvient quelque tempête , le plus expérimenté pilote a peine à
fe garantir du naufrage, fur-tout s’il eft pris de vents contraires
qui l’empêchent de doubler le cap de la Hogue ; c’eft cependant
la route que tiennent ordinairement les navires François,
principalement en tems de guerre, afin d’éviter les frégates & ■
les corfaires Anglois qui croifent fans ceffe dans les autres
C h a t . L D u f lu x ë t r e f l u x d é La m er . 21
paffages. Ce ne font pas les feuls écueils à craindre ; les raz
Blanchard & de Barfleur ne font pas moins formidables, leurs
extrémités font hériffées de pointes de roches, contre lefquelles
on eft fouvent jette,. faute d’afyles affinés. Cette mer mérite
pourtant une grande attention, étant la plus fréquentée & la
plus utile au commerce de la France; cependant fa côte eft
dénuée de ports tels qu’il en faudroit pour faciliter la navigation.
De même les eaüx partagées par les ifles de la Grande-Bretagne
, venant à la heurter, font en partie renvoyées vers Terre-
N cuve, où elles montent de 10 à 12 braffes en quelqu’endroit
de l’Acadie. On remarque le long de ces côtes, dans les tempêtes,
un mouvement circulaire qui jette fouvent les navires
contre les bancs & les écueils qui s’y trouvent, ce qui arrive
communément dans l’arriere-faifon. Le conflit des courans op-
pofes peut bien produire cet effet ; la mer allant d’orient en
occident eft arrêtée par l’Amérique , y forme un flux qui s’étend
le long des côtes vers les pôles, lequel rencontrant celui
qui eft renvoyé du nord, fait gonfler prodigieufementles eaux
au Port-Royal & ailleurs. Ce feroit un travail infini que de
vouloir expofer toutes les vicifîitudes qu’on apperçoit dans la
vafte étendue des mers ; ce que nous venons de dire fuffit pour
donner une idée de leurs effets, afin de les appliquer utilement
au fujet que nous avons en vue,
608. O n peut encore envifager les vents comme le foutien
des courans qui fe diverfifient fuivant l’impulfion des premiers,
& eu égard à la pofition des côtes. En certains endroits ies rumbs
de vent font monter la mer plus haut que de coutume, &
d’autres l’effipêchent de fe retirer aufîi bas qu’elle feroit s’ils
étoient calmes, ou s’ils ne venoient point de ce côté-là. Ainfi
l’expérience de 4 ou 5 marées ne doit point fufîire pour en
afligner la hauteur pofitive, puifqu’on en peut à peine juger dans
le cours d’une année. D ’où il réfulte qu’il eft d’une extrême con-
féquence de bien étudier toutes les circonftances qui peuvent
contribuer à la bonté d’un port & d’une rade, en examinant fé-
rieufèment la fituation des lieux & comment l’on remédiera aux
défauts qu’on aura reconnu. Il faut pour cela une grande con-
noiffance de la mer, autrement il eft bien à craindre qu’on ne
commette des fautes préjudiciables au bien de l’Etat.
Nous n’entreprenons point de rechercher la caufe&la nature
des vents, ce feroit un travail qui ne feroit que nous écarter de
L e s Vents
peuvent beaucoup
contribuer
à augmenter
la hauteur
des marées
, dont on
ne peut bien
juger que par
une grande
fu ite d’ obfer-
vations.