
Inconvénient
de faire pajfer
un canal de
navigation au
pied des montagnes
dont la
pente f fl fort
rÿide,,
384 A r c h i t e c t u r e H y d r a u l iq u e , L iv r e IV.
quemment répétées pour juger de la qualité du terrein lur la
profondeur où il faudra fouiller, afin d’éviter, s’il eft poffible ,
les cantons marécageux & les bancs de pierre d’une trop grande
étendue, dont la fouille jetterait dans une exceffive dépenfe. Il
. nefaut pas non plus négliger les autres obfervations qui peuvent
mettre en état de comparer les avantages & les défavantages
dont les différentes routes qu’on peut fuivre font fufceptibles,
afin de ne fe déterminer qu’en faveur de la plus favorable.
Si après avoir fixé la route du canal, il devoit traverfer une
ou plufieurs montagnes qui ne fulfent point affez élevées pour
.en’être effrayé , il n’en faudroit pas moins examiner-de plus
près s’il n’y aurait pas moyen de les contourner. Pour ne point
fe déterminer trop légèrement,il convient,avant que de conftater
le projet général, de faire des bouts de cartes particulières relatives
à des mémoires, comprenant l’eftimation de la dépenfe
que cette partie du canal pourra coûter de telle ou telle façon,
y joindre des réflexions judicieufes fur ce qui peut mériter la
préférence, non-feulement eu égard à l’économie des fonds ,
mais principalement aux fuites que pourront avoir les chofes
après l’exécution, ne perdant point de vue les cirçonftances
qu’il convient d’envifager pour l’avenir.
1 -i 06. Il faut bien prendre garde qu’en évitant de traverfer
une montagne , foit en la coupant ou en la perçant pour, paffer
deffous, comme on a fait à.celle de Malpas ( article 1086 ) , on
ne tombe dans des incorivénietîs'beaucoup plus grands en voulant
la côtoyer. Les deux effentiels font, le premier, d’expofer
cette partie du canal à être entièrement ruinée par l’abondance
des eaux qui naiffentfubitement de la réunion des pluies d’orage,
ou de B fonte des neiges qui viendroient à tombenfur la montagne
, capables d’emporter le digue adjacente & de caufer un
dommage d’autant plus fâcheux qu’on y ferait plus fouvent
expofe. Il eft vrai qu’il femble que l’on peut s’en garantir par un
contrefoffé, ayant plufieurs aqueducs de décharge bien ménages
; mais fila montagne eft roide, aride, avec un penchant fort
étendu, les eaux s’aiffemblant avec beaucoup plus de promptitude
qu’elles ne s’écouleront, il pourrait arriver que le contre,
foffé ne fera point affez grandpour les recevoir, & qu’elles n’en
furmonteront pas moins les digues, pour fe répandre dans le
canalqu’elles combleraient en peu de tems par le limon quelles
eutraîneroient avec elles,
Le
Le fécond inconvénient, qui mérite encore plus de confidé-
ration, ferait de faire paffer un canal â mi-côte d’une montagne
qui aurait beaucoup de talud, parl’impoflibilité d el’affeoir
folidement, auffi-bien que les éclufes, aqueducs, déchargeoirs,
& c . fur des terres rapportées, tirées de l’excavation de la montagne
, & jettées de l’autre côté pour applanir le terrein.
Il eft vrai que cela s’eft pratiqué en quelques endroits feulement
où il n’y avoit que peu de pente ; autrement comment un
canal toujours plein d’e au, & qui humecterait fans celle des
terres nouvellement remuées, pourrait-il le foutenir ? D ’ailleurs
quelle prodigieufe quantité d’eau ne faudroit-il pas avoir en ré-
ferve pour fuppléer à celle qui fe perdrait par les tranfpirations ?
Et pourroit-on compter fur des eclufes dont la plus grande partie
ferait fondée fur un terrein de rapport ? Si l’on vouloit faire
un déblai affez large, dans lé,penchant d’une montagne, pour
placer toute la largeur du canal fur un terrein folide, dans
quelle prodigieufe dépenfe ne tomberait- on point, fans pour
cela être affuré du fuccès, puifqu’on n’auroit pas moins à redouter
les fuites du premier inconvénient !
1 107. Il feroit également dangereux de faire paffer un canal
dans un vallon refferré par des montagnes, parce qu’on l’expo-
feroit au courant des eaux qui s’y ramafferoient, & qui ne manqueraient
pas de caufer des torrens capables de produire de
grands défordres, fi le vallon avoit beaucoup de pente. Refferré
comme nous le fuppofons , on ferait peut-être obligé-, en bien
des endroits,d’affeoir le canal fur des terres rapportées, & même
d’établir les contrefoffés au-deffus du niveau de fes eaux ; ce
qui rendrait l’ouvrage fi vicieux de toute maniéré qu’on né
pourrait fe garantir des accidens qui en feraient inféparables.
Quand on veut faire paffer un canal par des endro’its plus bas
que n’en doit être le fond, il faut de néceffité relever le terrein
pour en gagner le niveau & . faire ces parties en l’air, ce qui eft
un défau t qu’on doit éviter autant qu’il eft poffible, parce quelles
font toujours fujettes à de grands accidens , comme je l’ai remarqué
au canal de Picardie ; c’eft pourquoi il faut tâcher que
les eaux du canal foient par-tout encaiffées dans le terrein ferme,
& ne pas fe laiffer féduire par une économie mal entendue. E11
effet, il arrive quelquefois qu’en voulantéluderune trop grande
fouille, 011 tombe dans une dépenfe encore plus forte pour le
tranfport des terres qu’il faut aller chercher au loin ; ainli on ne
fuirait trop examiner cmel doit être le parti qu’il faucha fuivre
Parti# I I . Tome I I . C c c
I l faut également
éviter de
faire o f f e r t e
canal dans des
vallons referrés
par des
montagnes.