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» pour boire ; mais Strabon fait voir- le ridicule de la-Grainteque
» l’on avoit donnée à ces princes qui avoient commencé àper-
» cer cet iflhme, & nie formellement qu’il foit vrai- que les,
». eaux de la mer Rouge foient plus hautes que l’Egypte.Ç’eft.
». ce qu’ont fort bien prouvé Fournier & Riccioli, en doman-?..
» trant que toutes les mers, au moins celles dont les eaux ont
» flux & reflux, font dans le même équilibre. Enfin on ne peut
» s’empêcher de convenir que les éclufes que fit faire Pto-
» lomee Philadelphe dans le canal, afin de pouvoir introduire
» les eaux ou les arrêter, n’y furent mifes dans aucune autre vue
» que pour mettre dans le befoin de juftes bornes a la hauteur
» des eaux de lamer Rouge. Il eft à prefent facile de comprendre
» de quelle façon les vaill'eaux d’Hiram ont pu aller de T y r à
» Afiongaber; ilrfétoit pas à craindre que Pharaon roi d’Egypte
s, les troublât, d’autant que le roi Salomon t pour 1 intérêt^ de
„ qui cette flotte s'équipent, étoit fon gendre, & que peut-etre
» il devoir lui revenir quelque tribut fur les marchandifes que
» ces vaiffeaux apporteroient.
» C ’eft donc lans fondement que Vatable & Grotius fe font
avifés de dire, que c’étoit l’ifle de T y r dans la mer Erythe-
» rée, d’où Hiram avoit fait venir les vaifleaux quil fournit a
» Salomon, comme fi les Phéniciens avoient eu une flotte &
» des ports dans une petite ifle qui n’étoit prefque pas connue.
Autre dif- 1072. Quoique cet extrait du difcours de M. Huet foit des
fertaùon fur plus convainquant, je crois ne devoir pas négliger un fucroit
l™Tvî™il- de preuve, tiré de l’hiftoire de l’académie royale des fciences
mie royale des de l’année 170 2 , où M. de Fontenelle donne 1 extrait d un nie-
fM nCD e ilT moire de M. Delifle, le plus célébré géographe qui fut jamais ,
oit il confirme dont l’objet a été de prouver invinciblement l’ancienne exiflence
ce qui précède, de ce canal, comme on en va juger.
» M. le comte de Pontchartrain fe fervant de fon autorité
» pour aider au progrès des fciences , avoit envoyé en Egypte
» des mémoires faits par M. Delifle, qui marquoient ce qu il
» auroit fouhaité qu’on eût fait pour reâifier la carte de ce pays-
» là-. Ces mémoires étoient accompagnés de recommandations
» très-fortes aux confuls & aux vice-confuls ; ce fut en execu-
» tion des ordres de M. de Ponchartrain, que M. Bouder par-
» courut tout le Delta, & en envoya à ce miniftre une carte,
» avec une petite relation qui l’expliquoit & l’eclairciffoit. M.
» Delifle, à qui M. le comte de Pontchartrain avoir fait l’hon-
» nenr de renvoyer le to u t, en parla à l’academie ; mais ce
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„ y a de plus remarquable d-aps çette.-carte, c’eft un bout
„ de canal qui fort du bras le. plus oriental du N il, & que M.
» Delifle jugea devoir être une partie de celui qui faifoit autre-
» foisla communication du Nil & delà méditérranée avec la
» lamer Rouge.
„ Comme cette ancienne communication que M. Delifle
„ établiffoit pour un fait indubitable , eft ignorée aujourd’hui,
„ même deplufieurs fçavans ,.on futbien-aife de voir les preuves
» qu’il en avoit; & il les donna fi claires, & prifes, la plupart,
„ dans des lieux fi connus.,.que toute la difficulté qui relie, eft
» de fçavoir comment tout le monde ne les a pas remarquées.
» Hérodote, au fécond livre, dit qu’il y avoit dans la plaine
jj d’Egypte un canal tiré du n il, un peu au-deffus de la ville
» de Bubafte, & au-deffous d’une montagne qui alloit du côté
» de Memphis ; que ce canal s’étendoit bien loin d’occident
» en orient, qu’enfuite il rabattoit au midi & fe rendoit dans la
» mer Rouge; que Necus fils de Pfameticus avoit le premier
» entrepris cet ouvrage, où fix-vingt-mille hommes avoient
» péri ; qu’il l’avoit abandonné fur la réponfe d’un oracle, mais
» que Darius fils d’Hiftafpe l’avoit achevé; qu’il étoit de quatre
» journées de navigation, & que deux galères y pouvoientpaf-
» fer de front.' '
» Diodore en parle au premier livre de fa bibliothèque, &
» convient avec Hérodote , hormis en ce qu’il fait laiffer le
jj canal imparfait par Darius, â qui de très-mauvais ingénieurs
» repréfenterent que la mer R o u g e , plus haute que l’Egypte,
» l’inonderoit, & en ce qu’il ne fait achever l’ouvrage que par
» Ptolomée Philadelphe. Il ajoute qu’on avoit appellé ce ca-
» n a l, riviere de Ptolomée ; que ce prince avoit fait bâtir à
jj fon embouchure dans lamer R ou g e , une ville qu’il avoit
jj nommée Arfinoé, du nom d’une foeur qu’il aimoit, & que
» l’on pouvoit ouvrir ou fermer le canal, félon qu’il étoit né-
» ceffaire pour la navigation.
jj Strabon, liv. 17 de la géographie, s’accorde en tout avec
jj Diodore: il nerefte qu’à concilier Hérodote, qui fait achever
» l’ouvrage par Darius, avec Strabon & Diodore quin’en don-
jj nent l’honneur qu’à Ptolomée; mais il a pu arriver à un ou-
»> vrage de cette nature, dès qu’il a été achevé, un infinité d’in-
jj convéniens qui l’ont rendu inutile jufqu’à ce qu’on y ait fait
jj un nouveau travail.
» A la pointe du golfe qu’on appelle la mer Rouge étoient