
Maniéré de
rétrécir le lit
(T un fleuve qui
s’eft trop étendu
en largeur,
PI. XXXV ,
fig. 13.
Vfage des
épis triangu-i
laires,pour retire
(fer unfleu*
ve qui s’eft
302 A rchitecture Hyd r au l iq u e , Livr e IV.
piles des ponts , l’eau ne laiffe jamais de depots, parce qu elle
les porte au-deffous , où fon lit eft plus ouvert. Il fuit de-là
que pour lui donner plus d’aftivité & de force , il faut non-
feulement en redreffer le cours, mais auffi en rétrécir le lit, afin
qu’elle puiffe charrier au loin , & s’il fe peut jufqu’à la mer,
les matières dont elle eft chargée. L’exemple des rivières qui
traverfent les villes en fait fentir la néceffité, car elles y font
toujours navigables, à caufe du rétréciffement où les quais les
reduifent, au lieu qu’il n’en eft pas de même dans les parties
extérieures. On peut cependant leur donner par-tout cette
propriété, mais à bien moindres frais , puifqu’au lieu de qùais
de maçonnerie, il fuffit quelles fbient encaiflees par des digues
de terre faites avec foin , comme l’on en va juger.
1020. Ayant une fleuve renfermé entre des rives fort écartées
H IK , C E F G , qu’on veut redreffer & rapprocher, comme
font les digues projettées A B , C D ,,d o n t la partie C E provenant
des anciens travaux peut-être confervée , parce qu’on
la fuppofe en bon état, & qu’elle eft fituée convenablement à
la réparation qu’on veut faire; il faut commencer par tracer les
nouvelles digues relativement au cours le plus avantageux qu’il
conviendra de faire prendre aux eaux, de maniéré que l’intervalle
& la hauteur de ces digues puiffent contenir les plus
grandes crues , ce qui fera aifé à déterminer en fe réglant fur
la largeur & la profondeur où le fleuve fe trouve réduit dans
les villes prochaines , obfervant cependant de lui donner un
peu plus d’aifance.
Voulant faire un ouvrage folide, il faut, fi l’on eft dans un
pays où le bois foit commun, commencer par faire un grand
amas de fafcines pour établir le pied des digues , afin d’empêcher
les terres de remblais d’être emportées par le cours de l’eau,
& conftruire par intervalle le long des mêmes digues , des épis
triangulaires L , M , formant des angles aigus oppofés au courant
; ce que l’on pratiquera dans les endroits où on le jugera
le plus néceffaire à maintenir le courant dans les limites
N O , P Q , pour que d’une part il s’y creufe un lit , tandis que
de l’autre les digues fe fortifieront de plus en plus par les dépôts
qui fe feront au pied.
1021. Il ne fuffit point de rétrécir le lit des fleuves pour
en augmenter la vîteffe, il faut auffi fupprimer tous les obf-
tacles qui la retardent ; à quoi contribuent les tortuofités qui
fe rencontrent, fur-tout quand elles n’ont point une douce in-
CHAP. I. DE LA NATURE DES FLEUVES. 303
flexion & qu’au contraire elles forment des replis ferrés, oc-
cafionnés le plus fouvent par un dépôt de matière dure , telle
que font les cailloux & graviers que certaines rivières charrient,
qui donnent lieu aux eaux de fe frayer un paffage nouveau
dans le terrein adjacent à la rive , contre laquelle elles fe font
rejettées en contournant une partie de I’obftacle, comme on
le remarque dans les figures 9 & 10 , au bas de la planche
X X X V I . On fuppofe dans la première que l’attériffement E LN
s’eft étendu au point de contraindre le fleuve de fe creufer un
nouveau lit K X Y S C , .en dehors de fon ancienne rive gauche
A C , au grand préjudice des propriétaires du champ vo ifin ,
dont la perte ne peut aller qu’en croiffant fi le terrein eft tendre
, & qu’il foit mis en valeur ; car il n’y a point de doute que
lé côté M FG ne s’étende de plus en plus, fi le .courant le long
de la nouvelle riye A B C fe trouve plus rapide, par confé-
quent plus profond que vers la droite.
Comme une telle réparation pourrait devenir impoffible’ en
fuivant les moyens ordinaires, malgré les dépenfes qu’on voudrait
y faire , par la difficultévde raferl’attériffement que je fuppofe
extrêmement vafte, & de combler toute la partie de la rivière
formant le coude, qui aura peut-être plus de mille toifes
de contour, c’eft ici l’occafion de montrer comment l’on peut
par des moyens fimples & peu difpendieux, obliger la nature
de fe charger feule du foin de remettre les ehofes dans leur ancien
état.
Ces moyens fe réduifent à faire dans le tems des baffes eaux
tin nombre d’épis bien alignés dans la largeur A Q de l’entrée
du coude, pour rejetter le courant fur l’attériffement, après l’avoir
entre-coupé par des tranchées droites & obliques, Q S ,
M N , EH , O P, qui produiront le même effet que ci-devant ;
enfuite à barrer la largeur du coude par un premier batardeau
conftruit vers le milieu B L , & par un fécond pofé à fon débouché
SW; obfervant que la hauteur de l’un & de l’autre fe
termine au niveau des moyennes eaux, pour que les grandes
crues puiffentpaffer par-deffus,de crainte quelles ne débordent
dans le pays.
1022. Ceci bien entendu , l’on voit que les eaux troubles
renfermées dans les efpaces A X FU T & L Y G W , 11’ayant plus
de mouvement, y dépoferont leur limon, ce que feront auffi
une partie de celles qui couleront au-deffus dans le tems des
crues ; ainfi le lit du coude fe relevera fucceflivement jufqu’au
écarté de fo n
cours naturel.
Pl.XXXVI,
fig. 9 & 1 o.
Explication
de la maniéré
dont le courant
remplira
d’une part le