
Suite de l’art,
précédent, à
Voccafion des
ports qui f e
trouvent reculés
dans les
terres ,. avec
les attentions
qu’i l convient
d avoir aux
tirconflances
4u local.
1 4 A r c h i t e c t u r e H y d r a u l i q u e , L iv r e III.
port répond à l’embouchure d’un fleuve, comme eft celui du
Havre de Grâce, où la Seine eft caufe qu’il garde fes eaux plus
long-tems qu’aucun autre de la Manche. Ainli lorfque par la dit-
pofition desjettéeS il arrivera que les marées s’y feront plus tard,
elles doivent auffi y être moins confidérables, c’eft-à-dire, que
la mer doit monter moins haut & defcendre moins bas.
Cependant cette réglé n’eft pas fi générale qu’il n’y ait quelquefois
des caufes capables de produire le contraire ; par exemple
, ^A.'Caffîni rapporte dans les mémoires de l ’académie royale
des fciences , année 1 7 10 , que M. Baerte avoit remarqué , en
faifant fes obfervations à Dunkerque fur le flux & reflux de la
mer, que quoique la longueur du chenal fut de 1435 toifes
depuis fon embouchure, qui étoit alors de 3 5 toifes de largeur,
jufqu’à l’endroit le plus étroit, réduit à 16 feulement, il n’y
avoit aucune différence fenfible entre le tems de la haute mer
dans le port de la marine & celui de la haute mer vis-à;Vis le
risban, cé qu’on a effayé par cinq fois différentes aux plus
beaux jours de l’été. Ceci donneroit lieu à beaucoup de recherches
& d’examen, mais il faut toujours dans cette matière,
comme dans tant d’autres , fonder fes réflexions furies faits &
la connoiffance du local.
597. La quantité dont les ports font plus ou moins avancés
dans les terres, met auffi de la différence dans leur établiffement
ou dans l’heure des pleines mers ; c’eft de quoi l’entrée des rivières
nous fournit des exemples. Aux rivages de l’embouchure
de la Loire, la mer eft pleine les jours des conjonftions à 3
heures 45 minutes ; mais à Painboeuf, qui eft avancé de plu-
fieurs lieues en remontant cette riviere, l’établiffement eft' à 5
heures 3 o minutes ; & fi l’on remonte plus haut jufqu’à Nantes,
l’on verra que le flux met encore plus long-tems à s’y faire fen-
tir, & que l’établiffement y eft à 8 heures; mais comme les
marées dépendent toujours des mêmes caufes générales , cela
n’empêche pas que ce retardement ne foit par-tout le même
d’un jour à l’autre.
Pour avoir une connoiffance certaine du mouvement de là
mer le long des rivages, il faut non-feulement prendre garde
aux illes, aux écueils & aux promontoires qui font bticoler les
eaux en tout fens, mais encore confidérer les détroits & les embouchures
des fleuves qui s’y rencontrent auffi de tous côtés,
dont les diverfes fituations donnent lieu à une combinaifon de
mouvemens différens qu’on ne fauroit trop étudier avant que
CHAP. I. D u FLUX ET REFLUX DE LA MER. I 5
d’entamer un projet relatif à la côte pour fe conduire en confé-
quence.
On obferve, par exemple, que dans tous les détroits, embouchures
& golfes expofés à l’eft, l’Oçéan flue & reflue de l’ôueft
à l’eft, & de l’eft à l’oueft, & qu’au contraire ilflue & reflue
de l’eft à l’oueft & de l’oueft à l’eft dans tous les rivages placés
à l’oueft; & qu’il en eft de même des autres qui font au nord &
au fud, où l’Océan fe meut au contraire du fud au nord & du
nord au fud, & généralement de tous les biais imaginables ,
félon que la fituation des autres rivages, celle des embouchures
, des détroits & des golfes fe trouve orientée.
Il faut prendre garde que nous n’entendons pas feulement
parler en général dés longs côtés de l’Europe , de l’Afrique &
de l’Amérique orientés de la forte, mais auffi en particulier de
tous les rivages grands & petits qui y font compris, 8c qui forment
par leurs divers plis & replis des expofitions qui regardent
direâement ou de biais les quatres points cardinaux.
598. Pour bien concevoir la maniéré dont fe meuvent les eaux
de l’Océan le long des rivages, on peut les confidérer quand
elles fluent,- par exemple, de l’équateur vers les pôles comme
un grand fleuve qui croît & déborde de toute part; & au contraire
lorfqu’elles refluent des pôles vers l’équateur, comme
le même fleuve quand il décroît & rentre dans fon lit. Selon la
première fuppofition, un fleuve qui déborde par une grande
abondance d’eau a toujours trois mouvemens différens; l’un au
milieu, qui eft le fil de l’eau, & les deux autres vers fes rives où
il caufe le débordement provenant de l’accroiffement des eaux ;
de même quand l’Océan flue de l’équateur vers les pôles , ces
eaux ont auffi trois mouvemens différens , l’un en pleine mer
appellé le grand cours, & les deux autres entre ce même cours
& les rivages collatéraux, où ils rempliffent tous les golfes,
embouchures, bayes & autres lieux; ainfi c’eft par ces deux
derniers mouvemens qu’elle rejette & renvoie tout vers fes
bords.
Comme il arrive aux fleuves qui avoient débordé que , venant
à décroître, les eaux qui s’étoient écartées du courant principal
pour inonder les campagues circonvoifines , retournent
dans leur ancien lit ; de même lorfque les mers refluent &
diminuent d’un côté, toutes les eaux qui s’étoient détachées du
grand courant pour fluer vers les côtes , refluent alors vers la
pleine mer pour s’y réunir & la fuivre vers l’équateur,
Comparaîfott
des effets du
f lu x & reflux
de la mer , à
ceux d’un
grand fleuve
qui f e déborde
en croiffant y
& quife retire
enfuite.