«es ; de-là il s’étend fur la longueur d’environ feize lieues , & fe
joint à celui de Briare proche Montargis. Depuis lors M.le due
d ’O r lé a n s ,régent deFrance,pendant la minorité de Louis X V ,
informé qüe dans le tems des féchereffes la riviere de Loing
étoit fort baffe, la fit côtoyer par un nouveau canal qui e ft, à
le bien prendre, une prolongation du précédent , depuis Ce-
p o i, au-deffous de Montargis, jufqu’à Moret. Ce canal Achevé
en 1 7 14 , nourri des eaux de la riviere même, qui fe trouvent
ménagées par les éclufes, fait que la navigation de la Seine à
la Loire,prife près d’Orléans,eftpréfentement auffi bonne qu’on
peut le defirer, v .
En l’année 16 2 6 , Elifabeth Eugénie , foeur de Philippe I I ,
gouvernante des Pays-Bas, fit faire le fameux canal de Sainte-
M arie, qui joint le Rhin & la Meufe, en s’étendant depuis
Rhinberg jufqu’à Vanlo, afin de tranfporter par-la dans le Brabant,
toutes les marchandifes qui viennent d’Allemagne, & en
ôter le commerce aux Hollanaois *. Spinola & le comte de
Berg qui en avoient la conduite, prévoyant que ce canal ne
manquerait pas de caufer beaucoup d’ombrage aux ennemis,
firent faire vingt-quatre redoutes, placées a une jufte diftance les
unes des autres, & bien gardées, pour foutenir les travailleurs
au cas qu’on voulût les inquiéter. En effet, le prince d’Orange
vint plufieurs fois attaquer ces redoutes avec des fuCcès diffé-
rens; mais malgré tous fes efforts il ne put empecher que ce canal
ne fut mis dans fa perfe&ion.
Ce ferait trop entreprendre que de vouloir faire mention de
tous les canaux qui furent faits aux Pays-Bas, dans le courant
du dernier fiecle ; c’eft pourquoi je ne m’y arrêterai pas davantage
, pour ne parler que de ceux qu’on a exécutés & projettes
en France, dans le deffein de joindre la Méditerranée avec l'O céan,
On prétend que l’empereur Charlemagne eft le premier
qui en a fenti toute l’utilité , & qu’enfuite François I fongea a
l’exécuter ; mais comment en fut-on venu a bout, dans un tems
o ù les fas à éclufes n’étoient point encore d’ufage ? Auffi pàroît-il
que ce rieft que fous le régné de Henri IV qu on y a penfe fe-
rieufement,fur les repréfentations du cardinal de joyeufe, qui
avoit conçu, étant archevêque de Narbonne, que cette grande
entreprife pouvoir avoir lieu plus fûrement par le Languedoc
que par aucune autre province du royaume. Pour s en affurer,
le connétable de Montmorenci, qui en étoit gouverneur, fit
$ § trader, guerres 4e Flandres,
C h a f .V . d e s C a n a u x e x é c u t é s p a r l e s m o d e r n e s .} 59
exaâement vifiter les lieux par où le canal pouvoit être conduit
fans que ce projet eût d’autre fuite. Sous le régné fuivant,
te cardinal de Richelieu l’auroit entrepris en x 63 2 , fi les troubles
furvenus en Languedoc n’y avoient mis obflacle.
1082. De tous les grands travaux qui ont été exécutés fou's le
régné glorieux de Louis XIV, il n’y en a point eu de plus u tile,
de plus magnifique, ni qui faffe plus d’honneur à l’efprit humain,
que le canal de la jonftion des deux mers par le Languedoc,
En effet, y a-t-il rien dans le monde de plus digne d’admiration
que de voir des bâtimens paffer d’une mer à l’autre, en
parcourant une partie de pays, élevés de fixcens pieds au-deffiis
du port d’où ils font partis, Sf de les voir defcendre avec autant
de facilité qu’ils y font montés. Quoique le deffein d’une entreprife
auffi hardie eût déjà été conçu fous les régnés précé-
dens , M. Riquet n’a pas moins eu le mérite de mettre fon
projet en état de ne laiffer aucun doute fur l’infaillibilité du fuc-
cès, & d’être parvenu fous la proteftion de M. Colbert ( qui
fut frappé de la fupériorité de fon génie ) à furmonter les obfta-
cles que lui ont oppofés ceux dont les intérêts perfonnels l’env
portaient fur le bien général, comme cela n’arrive que trop foii-
vent.
Cependant ce canal, qui a coûté quatorze millions, fût peut-
être encore refté fans exécution, faute de compagnies affezpuif-
fantes pour l’entreprendre , parce qu’elles n’y auraient point
trouvé à beaucoup près l’intérêt de leurs avances, fi furies vives-
tepréfentations de M. Colbert, le roi n’en avoit fait la dépènfe-
par moitié avec la province du Languedoc. Ce monarque, pour
marquer encore mieux fa magnificence, en attribua à perpétuité
fans aucune réferve le fonds,le très-fonds,.& les revenus à
M. Riquet, ainfi qu’à fes defcendans ,à la feule charge de l’entretenir
en bon état. D ’un autre cô té ,. Meffieurs les Etats du
Languedoc y contribuèrent avec zele, vu que les. deniers qu’ils-
leveroient pour cela fur la province fe dépenferoient chez elle,,
& que cette levée, qui ne devoit durer qu’un certain tems, l’enrichirait
de plus en plus, par la facilité que le canal donnerait
au débit de fes denrées, joint à l’avantage de faire venir d’ailleurs.
celles dont elle pourrait manquer ÿl’événement a confirmé
les vues d’une auffi fage politique.-
Les oppofitions qu’avoit éprouvé M. Riquet de la part dey
feigneurs & communautés à qui appartenoit le terrein par lequel
le canal devoit paffer,. ayant fait connoître à M. Colbert
A n e c d o t e s
ü ce qui £
précédé la
conflruttïon dis
canal du Lan-
guedoc 3 com~
mencéem 66Cj
& achevé en