
Quels font
les endroits
par où doit
pajfercecanal.
Son point de
partage, la dè-
penfe de fon
exécution 6»
fon produit.
Autre canal
propofè en
Bourgogne ,
ayant pour -
point de partage
V étang
du Longpen-
ds*é.
les lieux les plans & devis de M . d’Efpinaffi. Ces commiffaires,
après avoir examiné le to u t, firent leur rapport, & produifi-
rent leurs procès-verbaux au confeil, par lefquels la polfibilité,
la facilité & la dépenfe de cette entreprife ont été conftatées.
1099. Ce canal devoit commencer à S. Jean-de-Laune fur
la Saône, traverfer Dijon, Montbard,Tonnerre, S.Florentin,
& terminer fon cours à Brinon fur l’Àrmaçpn , de-là fe jetter
dans l’Y on n e , après un trajet de cent vingt-deux mille cinq cens
foixante-trois toifes, ou d’environ cinquante lieues. La facilité
de l’exécution a été affurée par la fixation du point de partage
à Pouilly en Auxois , où l’on conduira des endroits fupé-
rieurs des eaux de fources qui font intarriffables & fi abondantes
qu’ayant été jaugées dans le tems d’une médiocrité approchante
de la féchereffe, elles fe font trouvées en état de fournir
continuellement au paffage de cinquante-fix bateaux par
jo u r , chargés chacun de quinze cent quintaux de marchan-
difes, déduftion faite de ce qu’il faut palier en pure perte pour
les tranlpirations & évaporations.
On allure qu’il n’y a point de montagne à couper fur toute
la route que le canal doit parcourir, que le terrein eft par-tout
de bonne tenue , & que tous les matériaux font à portée des
ouvrages.
La dépenfe, fuivant le devis eftimatif de l’auteur, confirmé
par les ingénieurs que le roi a commis pour en faire la vérification
, monte à dix millions. O n prétend que fans faire une
grande diligence, il n’y a point de bateau qui ne puiffe venir en
onze jours par ce canal de Lyon à Paris ; que les frais du tranfi-
port n’excéderont j amais cent fols le quintal, & que le revenu annuel
du canal, eftimé au plus bas, ira au moips à deux millions.
1100. Dans le même tems parurent encore d’autres projets ,
tendant aulîi à la même fin; celui de M. Thomalfin, ingénieur
ordinaire du ro i, qui a beaucoup examiné le pays pendant plu-
fieurs années de fuite, eft de joindre la Loire à la Saône par
l’étang du Longpendu, qu’il prend pour point de partage, prétendant
que cette communication eft la feule poftible, & la plus
utile au bien de l’état.
La fttuation de l’étang du Longpendu, dit-il, jointe à celle
des deux petites rivières de Bourbince & de Dehune qui en
fortent, font d’heureufes produâions de la nature qui paroît fe
prêter pour procurer à la Bourgogne l’avantage d’une jonftion
des deux mers. Comme on ferait un gros livre des différent
C h a t .V. d e s C a n a u x e x é c u t é s p a r l e s m o d e r n e s . 373
écrits qu’on a produit à cet égard, auffi-bien que pour joindre
les autres rivières de France, ce royaume n’ayant point de province
où l’on ne puiffe faire des communicationspar eau, je ne
finirais point fi je voulois rapporter tout ce que l’on peut dire à
leur occafion ; -c’eft pourquoi je vais terminer ce chapitre par
le canal qui a été fait en Ruffie au commencement de ce
| B j jM De tous les fouverains qui fe font portés à faciliter à i f f i Ju
leurs fujets les moyens de s’enrichir par le commerce, il y eu c^rPuml,
a peu qui ait mérité plus juftement le titre de grand, que Pierre d‘
I empereur de Ruffie, dont la conduite a été fi remplie de
merveilles, qu’on pourrait la regarder comme fabuleufe , fi
elle ne s’étoit mapifeftée de nos jours , & pour ainû dire fous
nos yeux.
Les Ruffes formoient prefque un peuple féparé des autres nations
de l’Europe, parle peu de liaifon qu’ils avoient avec leurs
voifins, & ils n’étoient aucunement touchés des connoiffances
qui élevent l’efprit, ni dès arts en honneur chez les autres nations
, lorfque vers la fin du dix-feptieme fiecle, Pierre I , par le
droit de fa naiffance, fe trouva en poffeffion du trône de Ruffie,
dans un âge où l’on ne s’occupe ordinairement que des plaifirs
qui font le partage de la jeuneffe. Mais ce prince rempli de plus
nobles idées, qu’il ne tirait que delà bonté de fon propre fond,
forma fans confeil ni fans fecours qui puffent féconder fes vues,
le vafte deffein de créer en quelque forte dans fes états un peuple
nouveau, en lui infpirant par la- force de fbn exemple le goût
des fciences, l’induftrie du commerce, & l’amour de la gloire'
que l’on acquiert par les armes ; au lieu que la politique de fes
prédéceffeurs avoit été de fuivre des maximes toutes contraires,
jufqu’à interdire à leurs fujets ,nés dans l’efclavage, la liberté de
voyager, de crainte que devenant plus éclairés, ils.n’ouvrillent
les yeux fur la rigueur de leur état. Cependant les Ruffes ne
manquoient point de pénétration,ni de ce genie naturel qui ne demandé
qu’à être développé pour devenir capable des plus grandes
choies, comme l’experience 1 a fait voir depuis.
Je n’entreprends point de rapporter ici les traits glorieux, par
lefquels ce prince eft parvenu à rendre fon empire dans l’état
ftoriffant où il l’a laiffé, & le haut degré de réputation que fes-
armes ont acquife. Pour ne point m’écarter de mon fujet, il-
fuffira de dire qu’après qu’il eut voyage en Hollande , en An