
La manière
’de fonder par
enrochement
étoit fort en
ufage che[ les
anciens.
Divifio» de
çe chapitre.
Maxime*
C H A P I T R E X
Des fondations faites à pierres perdues, ou par enrochementi
8 J i a maniéré de fonder, qui va faire l’objet de ce chapitre,.
appartient principalement à la mer Méditerrannée, ainfï
qu’aux lacs & fleuves dont le fond n’eft jamais à fec , & où
l’on veut éviter de faire des batardeaux & des épuilèmens. Il
paroît, par ce qu’en a écrit V itruve, qu’elle étoit fort en ufage
chez les anciens , qui n’ont point trouvé de moyens plus furs
& plus commodes pour établir les grands ouvrages qu’ils
ont exécutés à leurs ports. Cependant comme cet auteur n’en
parle que fort fuperficiellement, de même que ceux qui ont
écrit après lui, & que nous ne voulons rien laiffer à defirer pour
fe conduire félon les circonftances , nous avons diyifé ce fü-
jet en deux ferions ; dans la première, on trouvera ce qui
appartient aux fondations faites à pierres perdues, & dans la féconde
, la compofition & l’emploi du mortier de béton, avec
lequel on établit au fond de l’eau la plus folide de toutes les maçonneries
, par la propriété qu’a çe mortier de s’y durcir en peu
de tems,
S E C T I O N P R E M I E R E .
Des fondations faites à pierres perdues.
Qn fùppofe, que voulant profiter de ce que la nature a déjà
ébauché pour l’etabliffement d’un p o r t, il eft queftion de renfermer
un certain efpace de mer qu’on veut féparer du relie, afin
d’y maintenir des vaiffeaux à l’abri de toute inquiétude : ce qui
fe fait, comme nous l’avons dit ( article 690 ) , en élevant un ou
plufieurs môles difpofés de maniéré à former une enceinte ; &
que pour la défenfe de ce port ou de la rade, il faut apfli établir
en pleine mer à dix , quinze, ving t, vingt-cinq, trente pieds
& plus de profondeur, les fondeiriens de quelquè fort ou d’un
fanal. ■ ' 818. Avant que de fixer la pofitiond’un mole , on doit avoir
examiné
examiné avec toute la circonfpeaion imaginable l’effet qu’il produira
, eu égard'à la facilité que les bâtimens trouveront pour
entrer dans le'port & en fortin ce qui ne peut être bien connu
que par une longue expérience de ce qui arrive à la côte dans
un gros tems, & en consultant les marins qui en font in fruits-
car comment pourrions-nous donner des maximes fur un fuiet
que la nature varie en mille maniérés différentes ? Cependant
on en pourra ] uger, 1 °. parles airs de vent qui peuvent êtreavan-
tageux ou contraires ; z°. par les courans qui faciliteront ou détourneront
la direction la plus naturelle à la route qu’il faudra
que tiennent les vaiffeaux ; 3 “. par les bancs de fable ou rochers
les plus a portée; 4 . par l’aftion & la réflexion des flots contre le
pied des eminences adjacentes à l’entrée du port. Il faut fur
toutes chofes obferver û les vagues qui viennent du large dans
les gros tems font fort elevées, & f i l’on nepourroit pas mettre
a labr, de leurs efforts les ouvrages que l’on veutconflruire,en
les plaçant a couvert de quelques rochers ou bancs de fable
hxes, quand meme ils ne feraient pas faillans, pourvu qu’ils ne
foient qu a quelques pieds fous la fuperficie des eaux , parce
qu ils n en bifferont pas moins le premier choc de la lame.
N Ion etoit prive de cet avantage, il faudrait faire, à vingt-cinq
ou trente toifes de l’ouvrage que l’on veut fonder , une con-
tre-jettee a pierres perdues, pour ne pas l’expofer en plein aux
tourmentes de la mer. Faute d’avoir ufé de cette précaution
pour conftruire le mole qui couvre l’entrée du port de Nice
on a éprouvé des difficultés qu’on fe fût épargné f i , au lieu
a avoir couvert le pied de ce mole d’une quantité prodigieufe
de pierres, on les avoit employées à former une contre-jettée à
trente toifes en avant ; alors la mer fût reliée prefque dormante
dans 1 intervalle des deux, & il n’y aurait eu que la jettée qui
eut efluye 1 effet des vents du fud. ' ^
819- Pour marquer-les alignemens qu’il faudra donner à
une contre-jettee, a un mole, ou à toute autre efpece d’ouvrage
qu on veut établir dans la mer , on fe fert de ce que les marins
appedent bouees, qui ne font autre chofe que des morceaux
de liege, chacun attaché à une corde appellée boirin, arrêtée à
i autre bout par une greffe pierre polée au fond de l’eau au-def-
lous de i endroit où l’on veut que la bouée paroiffe flottante, ce
qui le tait en proportionnant la longueur de la corde à la pro-
euï mer; Ces bouées ainfï placées de diftance en dif-
rance, tonnent enfemble une efpece de chapelet qui figure affez
drurtie i l . Tome I I , v
fur Vétablijfe-
ment des moles,
pour prévenir
tout inconvénient.
PL XXII.
fis-,-
Maniéré de
tracer fur la
furface dé la
mer les travaux
qu'on y
veut fonder.