Charlemagne
entreprend un
canal pour
joindre le Danube
& leRhin
parVentremife
de deux autres
rivières
Defcription
abrégée du canal
de laC hine.
Extrait de
Vhifioire des
voyages de M.
l'abbé Prévôt.
.354 A rchitecture Hydraulique , L ivr e IV.
coin. Comme il n’a pas été entretenu, il eft à préfeht en partie
comblé ; mais par ce qui en refte, il paraît avoir été fort large
& fort profond : on a lieu de croire qu’il a été fait fous le régné
de Domitien , à caufe des médailles de cet empereur qu’on y
trouve. : , ..
1078. L ’empereur Charlemagne étant a Ratisbonne * , ou il
faifoit faire un pont fur le Danube, pour aller dompter les Ava-
rois on lui infpira le deffein de faire un canal de communica-
tion’du Rhin au Danube, par conféquent de l’O cé an â la mer
N o ire , en fe fervant de la riviere d’Almuts qui fe décharge dans
le D anube, & de celle de Redits qui fe décharge dans le Mein,
lequel va tomber dans le Rhin près de Mayence. Ce prince entreprit
ce grand ouvrage, & 1 aurait poulie à fa perfection, s il
n’avoit été obligé de l’abandonner pour aller punir la révolte
des Saxons,& remédier aux événemens fâcheux qui furvinrent
en différons endroits de fon empire;il eft confiant que rien n eut
été plus commode que cette communication, pour remplir fes
vaftes deffeins. .
1079. Vers la fin du troifieme fiecle, l’empereur Chi-t-tu ,
après avoir conquis toute la Chine & s être rendu maître de la
Tartarie occidentale , réfolut de fixer fa demeure à Pékin ,
qui fe trouvoit au centre de fes vaftes états. Mais les provinces
voifines n’étant point affez abondantes pour fournir la fubfif-
tance de fa cour & de fes nombreufes armées , il prit le parti
de faire creufer le fameux canal de Yunlyangho qui traverfe
l’empire du nord au fud, fur l’efpaçe de trois cens lieues, joignant
plufieurs rivières, depuis|Canton jufqu a Pékin ; il paffe
pour l’ouvrage le plus merveilleux qu’il y ait à la Chine, dont
5 eft la fource des richeffes, étant continuellement couvert d’une
multitude infinie de vaiffeaux & de bateaux. Ainfi par le moyen
des rivières & des canaux, on peut voyager fort commodément
de Pékin jufqu’aux dernières extrémités de l’empire, c’eft-à-
dire , l’efpace de fix cens lieues. ;
Les principaux canaux fe déchargent des deux cotes dans un
grand nombre d’autres cjui répondent a la plupart des villes &
bourgs, pour la commodité des voyageurs & le tranfport des
denrées (ju’elles fe communiquent réciproquement \ ces petits
canaux font fubdivifés enfuite en quantité de ruiffeaux pour fer-
tilifer les plaines yoifines.
Toutes les relations des voyageurs parlent avec emphafe de
? Mezerai , hiftoire de France.
C har. IV.des C anaux exécutés par l e s a n c ie n s . 355
la magnificence & de la beauté des ponts de pierre qui font fur
le grand canal ; les piles ont fi peu a ’épaiffeur, par la bonté de!
matériaux , que dans le lointain les arches , qui font fort élevées
, paroîffent comme fufpendues en l’a ir , & forment la per-
fpeâîve du monde la plus agréable à vo ir , lorfqu’il fe rencontre
plufieurs ponts de fuite. ■ '
1080. Quoique les grands ouvrages qui font partie des ca- inconvénient
naux que l’on voit à la Chine foient, au dire des mêmes voya- $£»?’)'’ *
geurs, au-deffus de tout ce qu’on rencontre en Europe, il paraît voir point de
cependant par leur propre expofé, que les Chinois n’ont point [as à edufes--
encore fait ufage des fas pour palier les bateaux d’un canal à
un autre lorfqu’il fe rencontre des chûtes, & que ce qu’ils appellent
éclufes, n’a rien de commun avec celles que nous employons
en pareil ca s, puifque Magalhaens obferve qu’il u’eft
pas facile de paffer quelques-unes de ces éclufes. Les barques,
dit-il, font tirées par quatre ou cinq cens bateliers,-&quelquefois
par un plus grand nombre , avec des cables & des cordes attachées
à la proue, tandis que d’autres travaillent aux cabeftans,
Lorfque toutes les cordes ont été foigneufement attachées , ils
commencent à tirer avec beaucoup de mefure au fon d’unbaf-
fin, fur lequel on bat d’abord lentement ; mais aulfi-tôt que la
barque eft à demi levée au-deffus du canal fupérieur, le courant
devenant beaucoup plus fort, on bat plus vite fur le baffin,
& les bateliers réunifiant toutes leurs forces , pouffent la barque
& la font monter d’un feul coup ; il ne refte enfuite aucun
péril,parce qu’elle fe trouve en fûreté dans l’eau dormante qui
eft entre le bord du canal & le milieu du courant. Il ajoute qu’il
eft plus aifé de faire defeendre les barques à ces chûtes que de les
faire monter; c’eft-à-dire,que l’opération eft plus prompte, quoique
plus dangereufe.
Le pere Lecomte obferve auffi que dans quelques endroirs
où la difpofition du terrein ria pas permis de former une communication
entre deux canaux, on 11e laiffe pas de faire paffer
les barques de l’un à l’autre, ^quoiqu’il y ait plus de quinze
pieds de hauteur à furmonter. A l’extrêmite du canal fupérieur,
on a conftruit un double glacis ou un talud de pierre de taille ;
lorfque la barque arrive au bout du canal inférieur, elle eft
élevée avec le fe.cours des cabeftans jufqu’au fommet du premier
glacis , d’où fon propre poids la fait gliffer par le fécond
dans le canal fupérieur, & on la fait defeendre de même de ce-
■ lul-ci dans l’autre. Cet auteur a peine à comprendre comment
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