
dans le Dauphiné, dans l’Efpagne même,
& parmi lefquelles il s’en trouve qui font
encore peu connues, comme fon Arâium
8t plufieurs autres.
En 1^26, naquit à Arras Charles de
l’Eclufe ( Clufius ) , homme d’un rare mérite
, l’un des plus favans Botanifles de fon
fiècle, ôt à qu i, dans tous les tems, l’on
ne pourra s’empêcher de donner les plus
grands éloges. Son ardeur pour perfectionner
la connoiflànce des plantes, oc pour
en découvrir de nouvelles , lui fit faire
plufieurs voyages dans l’Allemagne, l’Autriche
, la Hongrie, les Provinces du Nord
de la France, le Languedoc , l’Efpagne &
le Portugal, dans lefquels cet habile Bota-
nifte obferva & décrivit un grand nombre
de plantes, avec une exaâitude & une
précifion que les modernes mêmes n’ont
point furpaffée, excepté fans doute dans
les détails des parties de la fructification ,
dont l’importance n’étoit point encore fuffi-
famment fende au tems de Clufius. Dans
le premier des deux Volumes qu’il publia,
il traita des plantes rares , 8t les diftribua
en fix livres, d’après la confidération de
leurs grandeurs , de leurs qualités & de
leur port ou forme générale : dans le fécond
Volume , Clufius fait mention des plantes
étrangères à l’Europe, & donne la defcrip-
tion de beaucoup de fruits, amfi que des
autres parties des plantes exotiques dont il
a pu fe procurer la connoiffance.
Lobel, bien inférieur à Clufius, tant par
fes defcriptions , qui font courtes & d un
ftyle dur & incorreâ , que par le peu.
d’exaâitude de fes obfèrvations, diftribua
les plantes dont il fait mention dans fes
Ouvrages , en confidérant, comme tous
ceux qui l’ont précédé, leur grandeur, leurs
qualités & leur port. Il donna, dans fon
Livre intitulé , Adverfariâ fiirpium, & dans
celui qui a pour titre, Plantarumfeu fiirpium
Hifioria , les figures de plus de 2.000
végétaux , dont un grand nombre font les
mêmes que celles de Clufius. Il fut aidé
d’ailleurs par Pierre Pi'na, Provençal, qui
lui fit connpître la plupart des plantes qui
croiflènt aux environs de Narbonne ; de
manière , qu’il eft difficile de reconnaître,
parmi les plantes rares ou nouvelles qui
font mentionnées dans les Ouvrages que
je viens de citer, ce qui appartient vraiment
à l’un ou à l ’autre de ces Savans.
Outre les Botanifles dont nous venons
de parler, 8t qui vécurent dans le feizième
fiècle, il en parut encore dans ce même
tems beaucoup d’autres , qui certainement
contribuèrent chacun à l’avancement de la
Botanique , mais auxquels cependant les
bornes que nous fommes forcés de nous
prefcrire dans cet ouvrage, ne nous permettent
pas de nous arrêter : ainfi nous
ne dirons rien de Guillaume Turner, Médecin
Anglois , q u i, en , donna une
Hiftoire des Plantes d’Angleterre; de
Pierre Bellon , qui fit un affez long voyage
dans l’Egypte, PArabie & la Grèce , 8t fit
mention de plufieurs plantes rares dans les
obfèrvations qu’il publia; de Melchior Gui-
landinus, Pruffien, qui vécut en Italie ,
voyagea dans la Grèce 8t dans une partie
de l’Afie & de l’Afrique, 8t donna des
Commentaires particuliers, 8t un Ouvrage
fur les noms des plantes ; de Leonard Rau-
volfe, qui voyagea dans le Levant, recueillit
beaucoup de plantes de cette contrée,
8t en fit connoître quantité dansleVoyage
qu’il publia ; de Camerarius , Allemand ,
qui donna Une affez belle édition des plantes
de Matthiole , 8e l’enrichit de beaucoup
de figures qu’il avoit de Gefher , dont il
s’étoit procuré la Bibliothèque & les Ouvrages
imparfaits ; de Taberncrmontanus,
qui naquit dans la Principauté de Deux-
Ponts, & donna une Hiftoire dés Plantes,
dont on a tiré depuis un Volume contenant
plus de 2.000 figures'; de Profiper Alpin ,
■ qui voyagea en Egypte, & fit connoître un
grand nombre de plantes rares dans diffé-
rens de fes Ouvrages ; d s Fabius Columna,
d’une illuftre famille d’Italie , qui publia
en 1592 fon Phytobafanos , & vingt-quatre
ans après, fon Ecphrafis, Ouvrage? inté-
reffans & rares, dans lefquels on trouve,
les defcriptions & les figures d’un très-
grand nombre de plantes ; enfin , de Murant
a , Italien, Louis Anguillaria, Vénitien;
Nicolas Monard , Efpagnol ; J. B.
Porta, Napolitain; le Sarrafirt de Lyon;
Jean
Jean Gérard, Anglois, &c. qui tous, par
leurs obfèrvations Scieurs Ouvrages, contribuèrent
beaucoup aux progrès qu’on fit
alors dans l’étude des végétaux. Mais arrêtons
nous un inflant aux célèbres Bauhin ,
qui vécurent aüffi dans ce fiècle , 8c s’acquirent
par leurs travaux en Botanique une
réputation fi univerfelle 8c fi bien méritée*.
A la vérité., depuis le commencement
du feizième fiècle, dont nous nous occupons
, on étudioit réellement la Botanique
; on multiplioit les recherches de toutes
les manières pour avancer la connoiffance
des végétaux; on s’attachoit à trouver
des caraêtères pour en déterminer la d it
tinélion : le goût de cette étude s’accroif-
foit continuellement, 8c gagnoit dans dif-
férens pays : en un m o t, de toutes parts
on publioit des Ouvrages inftruCtifs fur
cette matière , 8c dans lefquels on trou-
voit déjà quelques traces de méthode ; mais
malheureufement le peu d’accord qui ré-
gnoit toujours entre les Auteurs, à l’égard
des noms qu’ils attachoient'aux plantes,
rendoit prefqu’inintelligibles , 8c par con-
féquent inutiles tant d’ouvrages intéreffans.
Heureufement enfin parurent ces deux
illuftres frères Jean 8c Gafpard Bauhin, qui,
parleurs travaux folides 8cimmenfes, jetèrent.
le plus grand jour fur l’étude des plantes
qui avoient été obfervées jufqu’alors.
Ces favans célèbres naquirent de Jean
Bauhin, originaire d’Amiens , l’un des plus
habiles Médecins de fon tems , qui fè
retira à Bâle , y exerça la Médecine avec
fuccès pendant quarante ans., 8c y mourut
l’an 1^82 ; laiffant deux fils vraiment
dignes de l’immortalité qu’ils ont acquife.
Jean Bauhin , l’un de ces deux hommes
illuftres, vécut quelque tems à Embrun ,
fut Difciple de Fuchs , 8c ami de Gefner,
avec qui il voyagea en Italie. Son ardeur
pour la Botanique lui fit parcourir les
montagnes de la Suiffe, celles des Alpes 8c
de la Souabe, le Mont Jurât , N Gaule
Narbonnoife , 8tc. oh il trouva un grand
nombre de plantes , dont il donna de
bonnes defcriptions. Il entreprit une Uifioïre
générale des Plantes , qui fut imprimée à
Embrun après fa mort, en trois volumes
Botanique, Tome I.
in-folio, 8c dans laquelle ce laborieux Bo-
tanifte fait mention d’un nombre confidé-
rable de végétaux. On y trouve en général
beaucoup de rapprochemens naturels, une
critique jufte, oc une fynonymie exaftè
de la plupart des Auteurs qui ont paru
avant lui.
Gafpard Bauhin, beaucoup plus jeune
que fon frère, eut la même paffion que lut
pour l’étude des plantes ; il fut vraiment
fon émule en Botanique , 8c le furpafla
même par l’étendue du plan qu’il avoit
concu, mais qu’il n’eut pas le tems de
mettre en exécution , fans doute par cela
même qu’il étoit trop valle. En effet, fon
Pinax, fruit de quarante années de recherches
8c de travail, 8c auquel encore aujourd’hui
l’on eft fouvent forcé de recourir
lorfqu’on veut confiilter les anciens ; n’eft
réellement qu’un expofé fiiccinct des titres,
de l’Ouvrage entier que ce Botanifte fè
propofoit d’exécuter. O r , on peut juger de
la manière dont il auroit traité ce grand
Ouvrage, par fon Prodromus, qui en eft
le premier Volume, dans lequel il a décrit
plus de 600 plantes, 8c où il obferve l’ordre
qu’il avoit projeté de fuivre par-tout.
Les différens noms des Auteurs fe trouvant
conciliés par les travaux précieux des
Bauhins , on peut dire que , dés ce moment
, la Botanique changea prefque totalement
de face, vu fur-tout que dans
l’étude de cette Science on eut alors la
commodité de pouvoir facilement conful-
ter les écrits qui avoient |été faits fur cette
matière ; ce qui mit tout le monde à portée
de profiter d’une infinité d’obfervations
intérefiàntes qu’ils renfermoient. Mais ce
n’étoit point tou t, il fàlloit encore un
ordre qui pût donner des idées générales
8c indiquer des rapports vus en grand; en
un m o t , il étoit néceffaire de claffer les
plantes, 8c ce fut à-peu-près dans ce même
tems ( c’eft-à-dire toujours dans le feizième
fiècle dont nous nous occupons ) , que
Coefalpin tenta le premier l’exécution de
cette grande entreprife.
Jufques-là en effet, perfonne ne s’étoit
appliqué à trouver dans les plantes des
caractères affez généraux pour en embraffer