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 A ssurément  ce  n’étoit  point  allez  
 pour un fyftême completd’Aftrono-  
 mie,d’avoir établi l’arrangement des corps  
 céleftes,  l’immobilité du Soleil au centre  
 de leurs révolutions, & le double mouvement  
 de la Terre ; il falloit encore déterminer  
 la  forme  des  orbites  qu’ils  décrivent  
 ,  &  les  loix  fuivant  lefquelles  
 ils  fe  meuvent.  Aufli, tandis que Galilée  
 travailloit  avec tant de fuccès  à  démontrer  
 la première  partie  de ce  fyftême,  le  
 fucceffeur ou le contemporain de ce grand  
 Homme  s’occupoit  de  la  fécondé.  Une  
 fagacité admirable & des réflexions continuelles  
 furie mouvement  des  Planètes,  
 le conduifirent à la découverte des véritables  
 loix  de ces mouvemens. D ’après les  
 obfervations de Tycho-Brahé, dont il avoit  
 été  le Difciple , il trouva d’abord que  les  
 Aftronomes s’étoient trompés jufques-là,  
 en adoptant que les  Planètes  fe meuvent  
 dans  des  orbites circulaires, & que leurs  
 mouvemens  font  uniformes.  Il  reconnut  
 enfuite que  ces  corps céleftes  font  leurs  
 révolutions  dans  une  ovale  ou  ellipfe  
 dont le Soleil occupe l’un des foyers ; que  
 leur  vîteffe  dans  chaque  révolution  eft  
 inégale,  &  que  cette  inégalité  varie  de  
 telle  forte, qu’un  rayon  toujours tiré  de  
 la Planète au Soleil, décrit des aires égales  
 en temps égaux. Peu de temps après il  
 découvrit l’analogie qu’il y  a entre les dif-  
 tances des Planètes  au  Soleil, &  les périodes  
 dans lefquelles elles achèvent leurs  
 révolutions. Et par ces découvertes étonnantes, 
   il  dévoila  toute  la  théorie  des  
 Planètes, & s’acquit ainfî  une gloire immortelle. 
 Il fe nommoit Jean  K epler : il naquit  
 à Viel dans le Duché de  Vittemberg,  le  
 i y  Décembre  1 5 7 1 ,   de parens  nobles, 
 mais  réduits à  l’indigence  par leur mau-  
 vaife conduite. Son père avoit long-temps  
 fervi  dans les  troupes  du  Duc  de  Vittemberg  
 , en qualité d’Oflicier, & il avoit  
 mangé une grande partie de  fon bien à ce  
 fervice. En partant pour l’armée,  il  laifla  
 fon époufe enceinte, qui  accoucha  à fept  
 mois.  Cette  naiflànce  prématurée rendit  
 le  jeune  K epler  valétudinaire pendant  
 les  premières  années de' fa  vie.  Sa mère  
 l’abandonna  encore à des  mains étrangères  
 lorfqu’elle fut relevée de  fes couches,  
 pour aller voir fon mari à l’armée. Le peu  
 de  foin qu’on en  eut, joint  à  la  foiblefle  
 de  fon  tempérament,  le  mit  plufieurs  
 fois  au  bord  du  tombeau.  Ses  parens  le  
 trouvèrent à  leur retour très-dangereufe-  
 ment malade  de la petite vérole. Il  fe rétablit  
 pourtant,  mais  il  languit  jufqu’en  
 1 ? 77*  fanté s’étant alors un peu fortifiée  
 , lui fit commencer fes études, qu’il ne  
 continua  qu’une année, par  un malheur  
 qui  arriva à  fon  père. 
 Il  s’étoit  rendu caution pour un  de  les  
 amis qui  ne  fît point honneur  à  fesenga-  
 gemens :  il fut donc obligé de payer pour  
 lui ; ôc comme la dette étoit confidérable,  
 ce  payement le ruina fans  relïource. Elle  
 lui emporta fa maifon & tout ce qu’il pof-  
 fédoit. 
 Dépourvu  de  tout,  il  prit le parti  de  
 s’établir  cabaretier,  pour  pouvoir  fub-  
 lîfter.  Il  alla à Elmendig,  où  il  loua  un  
 cabaret. Le premier gain fut deftiné pour  
 l’éducation  de fon  enfant ; de  forte qu’en  
 *S79 ü  Ie remit à une école. 
 I l ne 1 y  laifla cependant que  deux  ans.  
 Son intention étoit qu’il s’occupât des travaux  
 de  la  campagne lorlqu’il feroit allez  
 robufte pour y  vaquer; mais  l’inclination  
 du  jeune homme ne féconda point ce def- 
 * Joannis Kcpleri vita ,  à la  tête  du  commerce  êpiP  
 tolaire  de K ep ler , publie' en  1718  par  Michel Hanf-  
 thtus,  fous ce  titre : Epiftola ad  Joannem Keplerum Ma-  
 -thtmatiCHm Ca/artum fcripta,  &e. Mémoires  du  P. Nice* 
 ron ,  tom.  x x xv iii. Diiïionnaire de  Bayle,  art. Kepler.  
 Diflionnaire hiftorique &  critique  de M.  Cbaufepie',  art,  
 Kepler. Et fes  Ouvrages.